Les dernières voix de la Seconde Guerre mondiale

Soixante-quinze ans après la fin des combats, alors que leur génération s’éteint, leurs souvenirs sont plus poignants que jamais.

De Lynne Olson, National Geographic
Photographies de Robert Clark
Publication 12 juin 2020, 15:53 CEST
Les dernières voix de la Seconde Guerre mondiale.

Les dernières voix de la Seconde Guerre mondiale.

PHOTOGRAPHIE DE Robert Clark

Voilà soixante-quinze ans, la guerre la plus étendue, destructrice et meurtrière de l’histoire touchait à sa fin. La Seconde Guerre mondiale porte bien son nom : elle a été un véritable conflit planétaire, opposant les puissances alliées – les États-Unis, l’Union soviétique, la Grande-Bretagne, la Chine et des alliés mineurs – à l’Allemagne, au Japon, à l’Italie et à quelques autres pays de l’Axe. Environ 70 millions d’hommes et de femmes ont combattu dans les forces armées. Mais le gros des tués et des blessés se compte chez les civils. Selon les estimations, sur les 66 millions de morts, près de 70 %, soit environ 45 millions, étaient des civils, dont 6 millions de juifs assassinés lors de la Shoah. Par dizaines de millions, des gens ont dû quitter leur maison et leur pays, et beaucoup ont vécu pendant des années dans des camps pour personnes déplacées.

Les répercussions de la guerre ont jeté les fondations du monde tel que nous le connaissons depuis plus de soixante-dix ans, de l’aube de l’ère nucléaire à la création de l’État d’Israël et à l’émergence des États-Unis et de l’Union soviétique comme superpuissances rivales de la planète. Ce conflit a également suscité la formation d’alliances internationales conçues pour éviter la répétition d’un tel cataclysme, comme les Nations unies, l’OTAN, ou encore l’ancêtre de l’Union européenne, sous l’impulsion du Français Robert Schuman.  

Mais, avec le temps, la sensibilisation du public à la guerre et à ses conséquences quasi  incommensurables s’estompe, à la façon des vieilles photographies sépia. En parallèle, le nombre des témoins directs du conflit diminue. Selon les statistiques du gouvernement des États-Unis, sur les 16 millions d’Américains ayant combattu, moins de 400000, soit 2,5 %, étaient encore en vie en 2019.

En acceptant de raconter leur histoire, certains des derniers rescapés nous font un inestimable cadeau: la possibilité de voir la guerre à travers leurs yeux. Avant le conflit, la plupart d’entre eux connaissaient peu le monde au-delà de leur milieu. La guerre les a arrachés à leur environnement familier pour les exposer à une diversité inouïe d’expériences nouvelles, et les a mis à l’épreuve de façons jusqu’alors inimaginables.

Betty Webb. Renseignement britannique. 

PHOTOGRAPHIE DE Robert Clark

Betty Webb, 97 ans, a commencé à travailler à Bletchley Park, le centre de décryptage ultra-secret des Britanniques, à 18 ans. Les nazis pensaient que les messages codés par leurs machines Enigma (le modèle ci-dessous pouvait générer 103 trilliards de combinaisons) étaient presque impossibles à décrypter. Elle figure parmi ces innombrables femmes dont le travail fut indispensable aux efforts de guerre de leur pays et qui, ce faisant, ont découvert un sentiment d’indépendance et une estime de soi qu’elles n’avaient pas connus auparavant.

« C’est là, dans cette pièce, que j’ai signé l’Official Secrets Act. » Du bout de sa canne, Betty Webb, 97 ans, désigne une pièce au rez-de-chaussée du manoir de Bletchley Park, le légendaire centre de décryptage ultrasecret des Britanniques au cours de la Seconde Guerre mondiale. « On m’a demandé de signer, et on m’a fait comprendre que je ne devais parler de ce que je faisais ici avec personne. J’ai signé. Cela a été un moment solennel. J’avais 18 ans. »

C’était en 1941. La Grande-Bretagne était en guerre. Les troupes allemandes avaient envahi une grande partie de l’Europe. Betty Webb a rejoint l’Auxiliary Territorial Service (la branche féminine de l’armée britannique). « Je voulais faire plus pour l’effort de guerre que des roulés à la saucisse », selon ses propres termes. Webb étant bilingue (elle avait étudié en Allemagne), on lui a ordonné de se présenter à Bletchley, à environ une heure au nord de Londres. « C’était tellement secret que je n’avais pas la moindre idée de ce que c’était – personne ne le savait ! –, et encore moins dans quoi je m’embarquais. »

Au début, la jeune femme devait inventorier les milliers de messages radio codés allemands interceptés chaque jour par les stations d’écoute britanniques. Mais, la guerre progressant, on lui a confié une mission plus créative: paraphraser les renseignements recueillis par les casseurs de codes, afin que personne ne soupçonne qu’on les avait obtenus en décryptant des codes. « Nous devions faire croire que c’étaient des informations glanées auprès d’espions, dans des documents volés ou lors de reconnaissances aériennes, précise-t-elle. Le fait que nous ayons réussi à casser les codes militaires allemands et japonais était un secret jalousement gardé. »

Betty Webb aimait son travail. « J’en appréciais la complexité », confie-t-elle en souriant. Elle travaillait sur des messages japonais interceptés et en reformulait si bien le contenu que, en juin 1945, après la fin de la guerre en Europe, on l’a envoyée à Washington pour participer à l’effort de guerre américain dans le Pacifique. « J’y suis allée en hydravion, se souvient-elle. Je n’avais jamais pris l’avion. J’ai envoyé une carte postale depuis Washington à mes parents. Ils ont dû se demander ce que je faisais mais, bien sûr, ils ne me l’ont jamais demandé et, de toute façon, je ne pouvais pas le leur dire. » Des décennies s’écouleront avant que les employés de Bletchley Park soient autorisés à parler de leur travail pendant la guerre. « Mes deux parents étaient déjà morts, donc ils ne l’ont jamais su, raconte Betty Webb. À cause de ce secret, il était difficile de trouver du travail après la guerre, surtout pour les hommes, parce qu’on ne pouvait rien dire aux employeurs sur nos activités pendant la guerre, à part qu’on avait travaillé dans un endroit appelé Bletchley Park. » Betty Webb a fini par trouver un emploi dans une école dont le directeur avait aussi œuvré à Bletchley. « Je ne l’avais pas croisé, à l’époque, mais, quand il a vu sur ma candidature que j’étais aussi allée à Bletchley, il n’a rien dit ni posé de questions gênantes. J’ai eu le poste. » 

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    Une maquette artisanale de P-51 Mustang évoque des souvenirs forts pour Stewart ), qui a effectué quarante-trois missions de combat sur ce type d’avion.

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    Harry T. Stewart Jr, petit-fils d’un homme né en esclavage, a lui aussi fait ses preuves à 20 ans. Il est devenu pilote de chasse dans la célèbre unité des Tuskegee Airmen, composée uniquement de Noirs. Il a effectué quarante-trois missions de combat. Pourtant, ce qui domine, dans les récits des rescapés, qu’ils aient été du côté des Alliés ou de l’Axe, ce sont les tragédies vécues par tant d’entre eux. Ils témoignent de l’enfer que fut la Seconde Guerre mondiale – des brutalités, des souffrances et de la terreur subies et infligées par les deux camps.

    Près de 1000 pilotes afro-américains qui ont combattu pendant la Seconde Guerre mondiale ont appris à voler à Tuskegee, en Alabama, le seul aérodrome militaire des États-Unis qui formait les élèves officiers noirs. Dix de ces célèbres Tuskegee Airmen (« aviateurs de Tuskegee ») sont encore en vie, dont l’ancien lieutenant-colonel Harry T. Stewart Jr, 95 ans.

    Enfant, Harry Stewart a grandi dans le Queens, à New York. Il allait flâner près d’un aérodrome et rêvait de voler. En 1944, il a commencé à escorter des bombardiers américains en Europe. Le dimanche de Pâques 1945, Stewart et six compagnons d’escadrille volaient à 1 500 m au-dessus de l’Autriche (occupée par les nazis), quand des avions de la Luftwaffe, plus nombreux, ont surgi. Des combats ont suivi. Lorsqu’il a atterri sur sa base italienne, Stewart a été accueilli en fanfare pour avoir abattu trois appareils ennemis. Mais le pilote de chasse débutant pensait à ses trois camarades abattus. L’un est mort sur le coup, un autre a atterri en catastrophe en Yougoslavie, et le troisième a sauté en parachute – son corps aurait été découvert en Autriche après la libération du pays, intervenue deux semaines plus tard.

    La guerre finie, Harry Stewart a pu rester dans l’Air Force, le président Harry Truman ayant mis fin à la ségrégation raciale dans l’armée en 1948. Mais, en 1950, les restrictions budgétaires ont contraint des milliers d’officiers, dont Stewart, à quitter l’uniforme. Il a obtenu son brevet de pilote commercial grâce à une bourse de la «GI Bill » (loi sur la réinsertion des anciens combattants) et a posé sa candidature auprès de compagnies aériennes. Qui l’ont rejetée.

    À cette époque, elles n’engageaient pas de pilotes noirs. La perte de ses ailes de pilote et de sa dignité a commencé à le miner. Mais Harry Stewart avait surmonté d’autres obstacles. Il s’est inscrit à l’université de New York et a obtenu un diplôme en génie mécanique. Il a trouvé un emploi comme ingénieur. Son dernier poste l’a conduit dans le Michigan, où il a gravi les échelons de l’une des plus grandes entreprises de transport de gaz naturel du pays ; il en était le vice-président quand il a pris sa retraite.

    En 2018, Harry Stewart s’est rendu en Autriche pour la première fois depuis la guerre – mais, cette fois-ci, à l’invitation du gouvernement autrichien. Des chercheurs enquêtant sur le destin de pilotes alliés abattus avaient découvert que le compagnon d’escadrille de Stewart, Walter Manning, celui qui avait sauté en parachute pendant la sanglante mission de Pâques, avait été capturé vivant. Avant son transfert dans un camp de prisonniers de guerre, le jeune homme, âgé de 24 ans, avait été lynché par la foule, excitée par la propagande raciste des nazis. Soixante-treize ans plus tard, Harry Stewart et sa fille ont regardé les dignitaires autrichiens présenter leurs excuses et inaugurer une plaque commémorative.

    Harry Stewart explique qu’il ne s’attendait pas à ce que les Tuskegee Airmen soient un jour reconnus dans les musées, les livres d’histoire et les films hollywoodiens, ou sur les monuments commémoratifs. Quel souvenir espère-t-il que l’on conserve d’eux? « Je veux juste qu’on s’en souvienne comme de bons citoyens – de bons Américains, qui se sentaient le devoir de s’engager pour aider à protéger leur pays en des temps difficiles, malgré la discrimination qu’ils subissaient. »

     

    Maria Rokhlina. Infirmière militaire soviétique.

    PHOTOGRAPHIE DE Robert Clark

    Les combats ont cessé il y a soixante-quinze ans et, pourtant, à 95 ans, Maria Rokhlina sent encore la guerre dans ses doigts. Née en Ukraine, elle rêvait d’être pilote. Mais elle avait 16 ans en 1941, et l’armée allemande progressait dans sa patrie. « Je suis passée des bancs de l’école à la guerre », dit-elle. Devenue infirmière militaire, elle a servi dans les forces soviétiques pendant quatre ans.
    Un jour, alors qu’elle aidait à transporter un soldat blessé sur le Dniepr, sa rame a cassé et elle a dû pagayer à mains nues dans l’eau glaciale. La douleur qu’elle ressent encore aujourd’hui dans ses doigts est si forte qu’il faut des piqûres dans chaque articulation pour la soulager.

    En 1942, Maria Rokhlina s’est retrouvée piégée dans Stalingrad assiégée. La bataille a fait rage pendant plus de six mois, réduisant la ville en ruines et décimant sa population. Les températures hivernales plongeaient régulièrement sous les - 20 °C. Maria Rokhlina se terrait avec des soldats dans une usine de tracteurs, mais il n’y avait pas le moindre bout de papier ni morceau de bois à brûler. « Nous devions nous réchauffer mutuellement. Nous avons prêté serment là-bas : ne jamais oublier Stalingrad, ne jamais oublier ceux qui se sont serrés dans les bras » lors de ce qu’elle appelle «des cercles de chaleur». Il y a aussi les souvenirs que Maria Rokhlina a tenté d’oublier, en vain: la chaleur des intestins d’un soldat agonisant, alors qu’elle tentait de lui remettre les boyaux en place. Ou une camarade infirmière, violée et tuée par les Allemands, les seins tranchés. « Je ne peux pas leur pardonner ce qu’ils ont fait et ce que j’ai vu. »

    Mais, comme les cercles de chaleur, les horreurs ont créé des liens. Au premier regard, un soldat soviétique lui a promis de la demander en mariage s’ils survivaient à la guerre. Ils ont été mariés pendant quarante-huit ans. 

    Victor Gregg. Fusilier britannique.

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    Victor Gregg a trouvé  la proposition d’un petit pain et d’une tasse de thé chaud fort alléchante, par un jour glacial d’octobre 1937, à Londres. Si bien qu’il a suivi un recruteur dans son bureau et s’est engagé dans l’armée britannique. « C’était le jour de mes 18 ans, se souvient le centenaire. Mais je ne l’ai jamais eue, cette tasse de thé. »

    À la place, il s’est retrouvé aux premières loges de la Seconde Guerre mondiale, du début à la fin. En septembre 1939, quand elle a éclaté, Gregg servait en Palestine. Il a passé les trois années suivantes dans le désert d’Afrique du Nord. Puis, devenu parachutiste, il a pris part au débarquement en Italie. En septembre 1944, il a été largué pour participer à la bataille d’Arnhem – vaine tentative alliée de s’emparer d’un pont sur le Rhin.

    « On nous a dit que ce serait une victoire facile, se souvient-il. Mais nous sommes tombés sur des divisions Panzer que personne ne semblait avoir vu venir. » Capturé, Victor Gregg a été envoyé dans un camp de travail, en Allemagne, près de Dresde. Cet hiver-là, il a tenté de s’évader deux fois et, à titre de sanction, a été envoyé travailler dans une fabrique de savon.

    Gregg et un autre prisonnier de guerre ont saboté l’usine, qui a été réduite en cendres – ce qui leur a valu d’être condamnés à mort. « Ils nous ont transférés dans une prison de Dresde et nous ont dit que nous serions fusillés le lendemain matin », se remémore le centenaire. Mais le destin s’en est mêlé. Cette nuit-là, les avions britanniques et américains ont commencé à faire pleuvoir des bombes incendiaires sur Dresde. La prison a été touchée de plein fouet. Gregg s’est évadé par une brèche dans le mur.

    Les horreurs qu’il a vues dans les jours suivants l’ont hanté toute sa vie, affirme-t-il, le remplissant de culpabilité et de honte. « Jusqu’alors, j’avais vu des soldats combattre d’autres soldats, mais là, il s’agissait de femmes et d’enfants, de civils. Je n’en revenais pas. Nous étions censés être les types bien. » Victor Gregg a fui Dresde au lendemain du bombardement. Il est allé vers l’est pour rejoindre les forces soviétiques qui avançaient. Il était à leurs côtés, à Leipzig, le jour de la capitulation allemande.

    Après avoir vécu avec le danger pendant six ans, s’adapter à la vie civile de l’après-guerre lui était impossible. Il recherchait le risque et le danger, dit-il, que ce soit en conduisant des motos, en effectuant du travail clandestin pour le MI6 (l’agence de renseignement britannique) ou en s’associant à des mouvements prodémocratiques clandestins derrière le Rideau de fer.

    Les souvenirs de Dresde ont été un fardeau particulièrement lourd à porter. Mais, récemment, Victor Gregg y a été invité pour donner une conférence sur son expérience. Dans le public se trouvait une femme de plus de 80 ans qui, jeune fille, avait survécu au bombardement de Dresde, mais y avait perdu une jambe. Quand ils ont parlé ensemble, après la conférence, confie le centenaire, il a trouvé la paix intérieure qu’il recherchait depuis des décennies. « D’une certaine manière, je me sentais enfin pardonné. » 

    Eugene Polinsky. Navigateur aérien américain. 

    PHOTOGRAPHIE DE Robert Clark

    Eugene Polinsky, producteur, dramaturge et acteur, a réalisé des missions aériennes clandestines au-dessus de la Belgique, de la France et de la Norvège occupées. Au lieu de lâcher des bombes, son équipage – huit Américains – larguait des agents alliés, des armes, des motos, de l’argent et d’autres ravitaillements essentiels à la Résistance, dans le cadre de l’opération Carpetbagger («parachuté»). « À l’époque, je ne savais pas ce que je faisais, explique Polinsky, qui a 99 ans. Je ne savais pas ce que je transportais. J’aurais été terrifié ! »

    Les Carpetbaggers étaient l’arme aérienne de l’Office of Strategic Services (OSS), l’agence de renseignements américaine, qui menait des opérations d’espionnage et de sabotage. En 1944 et 1945, les Carpetbaggers ont parachuté plus de 500 agents et environ 4500 t de ravitaillement en territoire occupé. « On nous disait: “Si vous êtes abattus, s’ils vous capturent, vous serez fusillés comme espions. Alors, ne vous faites pas abattre”, raconte Polinsky. Excellent conseil. » Quelques heures avant une mission, l’équipage au sol chargeait des caisses de ravitaillement dans la soute à bombes de l’avion. Parfois, juste avant le décollage, des agents que les aviateurs ne connaissaient que sous le surnom générique de «Joe» ou «Josephine» se glissaient à bord. En tant que navigateur, Polinsky était accroupi sur une caisse de mitrailleuse, vers le nez exigu et glacial du Liberator, d’où il dirigeait le pilote vers l’objectif.

    À l’approche de la zone de largage, le pilote descendait jusqu’à 100 m. Lorsqu’il repérait les signaux lumineux des Alliés, au sol, le largueur parachutait la cargaison de la nuit. De retour en Angleterre, les officiers attendaient en espérant que le nombre d’équipages qui avaient décollé la veille au soir correspondrait au nombre de ceux qui atterriraient avant le lever du soleil. Mais 42 avions des Carpetbaggers ne sont jamais revenus, 21 autres ont subi des dommages irréparables, et plus de 200 compagnons aviateurs de Polinsky ont été portés disparus, emprisonnés ou tués au combat. « On voyait ceux qui avaient 18 ou 19 ans venir pour les remplacer, se souvient Polinsky. On était un vieil homme si on était encore là à 23 ans. Il ne fallait pas que nous y pensions trop, cela nous aurait détruits. Il fallait juste continuer. »

    En août 1944, après un largage réussi sur la Belgique, l’équipage de Polinsky est revenu de sa trente-cinquième mission, nombre magique qui donnait le droit de rentrer au pays. Le dernier ordre qu’on lui a donné: «Tout oublier». C’est ce qu’il a fait pendant de nombreuses années. Puis, en 2001, Eugene Polinsky a reçu une mystérieuse invitation pour une réception en Belgique, à l’occasion de la sortie d’un livre sur une opération alliée complexe destinée à libérer le port d’Anvers, en 1944. Le navigateur américain n’avait jamais connu le rôle important qu’il avait joué dans la mission, jusqu’à ce que son hôte, l’ex-chef de la résistance belge, lui relate l’histoire. « Pendant toutes ces années, lui a déclaré ce dernier, nous étions amis. Seulement, vous étiez dans les airs, et moi, j’étais au sol. »

    « Toute sa vie, on veut réaliser quelque chose d’important, dit Polinsky. Découvrir qu’on l’a faite quand on était tout jeune et qu’on ne le savait pas... C’est un sentiment étrange. » 

     

    En découvrir plus sur le site de National Geographic. Des anciens combattants et rescapés du monde entier partagent leurs témoignages sur la guerre sur natgeo.com/ww2.

    La genèse de ce dossier :
    Tous nos remerciements au photographe Robert Clark et à son père, R. R. «Russell» Clark, ancien combattant de l’US Navy, qui ont inspiré ce reportage, ainsi qu’aux nombreuses personnes qui ont accueilli Robert et nos rédacteurs chez eux pour raconter leurs souvenirs. 

    R. R. « RussellS » Clark. Marin américain. 

    PHOTOGRAPHIE DE Robert Clark

    Quand Russell Clark  a contracté une hernie en jouant au football, il a su qu’il serait exempté de service militaire. Mais il avait 18 ans, avait grandi dans une ferme du Kansas et était bien décidé à rejoindre ses deux frères à la guerre. Il a payé pour se faire opérer, puis s’est engagé. Au début de 1945, Russell Clark s’est retrouvé dans l’Atlantique Nord, où il travaillait dans la salle des machines du destroyer d’escorte USS Farquhar. « C’était chaud et humide là-dedans, il faisait 38 °C », se souvient Clark, aujourd’hui âgé de 95 ans.

    Malgré les heures longues et étouffantes passées sous le pont, Clark considérait qu’il avait de la chance. « Les pauvres gars qui devaient être sur le pont dans l’Atlantique Nord, ils avaient sacrément froid. » Son seul contact avec l’ennemi s’est produit le lendemain matin de la reddition allemande. Un sous-marin nazi,  lui n’avait apparemment pas reçu la note de service, a foncé sur le Farquhar. « Nous n’avons pas eu le choix, dit-il. Nous les avons torpillés. » Du sous-marin n’est restée qu’une nappe de pétrole. 

    Extrait de l'article paru dans le numéro 249 du magazine National Geographic.

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