Le plus vieil animal du monde a 507 ans

Arctica islandica, une petite praire de l’Atlantique Nord, bat tous les records de longévité pour un animal ne vivant pas en colonie.

De Julie Lacaze
Publication 8 janv. 2018, 17:34 CET
Une coquille d'Arctica islandica avec les valves séparées, récoltée en mer du Nord.
Une coquille d'Arctica islandica avec les valves séparées, récoltée en mer du Nord.
PHOTOGRAPHIE DE CC0 Wikimédia

Pendant longtemps, la baleine boréale, dont un individu a atteint 211 ans, a détenu le record de longévité parmi les animaux non coloniaux (organismes vivants qui ont un mode de vie individuel). Puis, ce fut le tour du requin du Groenland, qui peut dépasser 400 ans. La tortue géante des Galápagos, dont l’âge peut atteindre 177 ans, est également connue pour être l’un des animaux terrestres pouvant vivre les plus vieux. Mais, en 2006, c’est un petit mollusque de l’Atlantique Nord, mesurant 8,7 cm de long, surnommé Ming, qui est devenu le nouveau champion de longévité… et de loin ! Âge estimé de l’animal : 507 ans.

Ming est un bivalve de l’espèce Arctica islandica (praire d’Islande ou cyprine), cousine de la palourde. Le spécimen a été récolté il y a une dizaine d’années dans les eaux côtières islandaises par des chercheurs britanniques de l’université de Bangor (pays de Galle). Il a été baptisé ainsi en référence à la dynastie chinoise qui régnait à l’époque de sa naissance. Pour dater l’animal, les chercheurs ont compté les stries de croissance de sa coquille, qui grandissent au rythme d’une par an, à l’image des cernes des arbres. En 2006, l’équipe estime son âge entre 405 et 410 ans. Mais elle commet une erreur en comptant les stries de la face interne, trop rapprochées les unes des autres pour bien les discerner. En 2013, les chercheurs refont le comptage, sur la face externe cette fois, plus grande et dotée de stries plus éloignées. Résultat : Ming a 507 ans ! Cet âge est ensuite confirmé par une datation par le Carbone 14. Combien de temps Ming aurait-il pu encore vivre au fond de l’océan ? On ne le saura pas : le mollusque n’a pas survécu à sa datation.

En plus de vivre longtemps, les praires d’Islande sont utiles à la recherche, notamment à la climatologie et à l’océanographie. En étudiant la composition des coquilles, les chercheurs peuvent reconstituer les températures de l’océan, les courants océaniques et les conditions de croissance sur plusieurs siècles. Leur présence dans les couches sédimentaires océaniques facilite également la datation de ces dernières.

Le paléoclimatologue américain Alan Wanamaker, de l'université de l’État del’Iowa, étudie les coquilles d’Arctica islandica de l'Atlantique pour trouver des indices sur l’évolution de l’océan à travers les siècles. Bob Elbert / Iowa State University
PHOTOGRAPHIE DE Bob Elbert, Iowa State University

Mais surtout, le petit mollusque constitue un parfait modèle pour examiner les mécanismes de vieillissement cellulaire. Les secrets de sa longévité font aujourd’hui l’objet de nombreuses études. Plusieurs pistes sont avancées. Une résistance particulière au stress oxydatif et génotoxique, affectant l’ADN des cellules ? Une régulation du phénomène de l’apoptose, la mort cellulaire programmée ? Un système de configuration et d’expression des protéines performant ?

La théorie de la longévité avance qu’en l’absence de prédateur, la sélection naturelle privilégie des individus dont les signes de vieillissement apparaissent les plus lentement, avec des capacités reproductives les plus longues. Ce qui pourrait être le cas de la praire d’Islande, qui vit dans les eaux profondes et glacées de l’Atlantique Nord, loin des prédateurs. Dans le domaine, un autre mollusque pourrait concurrencer son record de longévité. En juillet 2017, un scientifique américain a annoncé dans la revue The Science of Nature avoir estimé l’âge de vers marins (Escarpia lamina) du golfe de Mexique, vivant à plus de 1000 m de profondeur, entre 250 ans et 300 ans. Et il n’est pas exclu que ces organismes puissent vivre bien plus vieux.

Ces derniers records, enregistrés chez les animaux non coloniaux, sont largement dépassés par les animaux vivant en colonie. Les coraux et les éponges peuvent se maintenir en vie des milliers, voire plusieurs dizaines de milliers d’années. Enfin, les hydres d’eau douce et la méduse Turritopsis nutricula sont théoriquement immortels, grâce à leurs pouvoirs de régénération cellulaire hors normes.

Dans le numéro de janvier 2017 du magazine National Geographic, un reportage en Arctique sur le déclin de la faune et la flore causé par la fonte de la banquise.

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