Des fossiles de hyènes ont été mis au jour en Arctique

Ces prédateurs préhistoriques auraient eu une épaisse fourrure dont la couleur évoluait au fil des saisons.

De John Pickrell
Des fossiles de hyène appartenant au genre éteint Chasmaporthetes (illustré ci-dessus) ont été découverts pour la première fois en Arctique. Cette trouvaille permet d'apporter une explication au voyage entrepris par les animaux du Pléistocène depuis l'Eurasie vers l'Amérique du Nord.
PHOTOGRAPHIE DE Illustration de Julius T. Csotonyi

Deux dents fossilisées mises au jour au nord-ouest du Canada démontrent que les hyènes enduraient autrefois les conditions extrêmes du continent Arctique. Elles se nourrissaient probablement de carcasses de caribous ou de mammouths lorsque la chasse ne suffisait pas à combler leurs besoins au beau milieu de la steppe-toundra, il y a environ un million d'années.

Découverts sur les rives de la rivière Old Crow dans les années 1970, ces fossiles présentés hier dans la revue Open Quaternary constituent la trace la plus au nord de la présence de hyènes. Avant cette découverte sur le territoire du Yukon, les fossiles de hyènes les plus au nord avaient été trouvés dans l'état du Kansas, aux États-Unis, soit près de 4 000 km plus bas.

Ces fossiles appartiennent à des animaux du genre éteint Chasmaporthetes, qui rôdaient sur Terre il y a environ 800 000 ans à 1,4 millions d'années. À cette époque les conditions en Arctique étaient probablement encore plus rudes qu'aujourd'hui avec une couche permanente de neige et de glace.

« Ces nouveaux fossiles agrandissent l'aire de répartition biologique et géographique des hyènes, » indique l'auteur principal de l'étude Jack Tseng, paléontologue à l'université d'État de New York à Buffalo. Ils constituent également une nouvelle preuve du voyage entrepris par les hyènes depuis leur point de départ évolutionnaire en Eurasie vers l'Amérique du Nord à travers le pont terrestre septentrional de Béringie, et ce, malgré les conditions polaires.

« Nous avons la preuve que des hyènes se trouvaient là-haut ou du moins qu'elles étaient capables d'atteindre un point aussi éloigné au nord. Peut-être qu'elles sont mortes en arrivant, mais dans tous les cas elles y sont passées, » déclare Tseng.

 

UN PRÉDATEUR LAINEUX

De nos jours, les quatre espèces de hyènes existantes sont principalement établies en Afrique, elles se sont adaptées aux savanes de basse altitude et à un climat plus chaud et sec. Les paléontologues ont toutefois connaissance d'environ 70 espèces de hyènes préhistoriques réparties à travers l'hémisphère nord.

« Si l'on ne s'intéresse qu'aux espèces vivantes, alors on n'observe que 10 % de la diversité des hyènes, » indique Tseng.

Les chasmaporthetes avaient de plus longues pattes que les hyènes modernes et courraient probablement plus vite, ce qui faisait d'elles de meilleurs prédateurs mobiles, ces animaux chasseurs qui se lancent à la poursuite de leur proie. À l'époque, ces hyènes chassaient probablement des animaux de l'Arctique comme le caribou, les chevaux et peut-être même des mammouths. Sa mâchoire puissante et ses crocs aiguisés leur permettaient par ailleurs de dépecer aisément leurs victimes ou la charogne qu'elles trouvaient.

« On ne dit pas qu'elles chassaient des mammouths adultes, ce serait une incroyable prouesse pour n'importe quel carnivore, » précise Tseng. « Mais les jeunes éléphants d'Afrique sont par exemple à la portée des hyènes tachetées. Je pense que c'est une bonne analogie pour déduire les potentielles proies des Chasmaporthetes. »

L'équipe pense également que ces hyènes arctiques avaient une fourrure dense similaire à celles des mammouths ou des rhinocéros laineux, une fourrure dont la couleur aurait évolué au fil des saisons à la manière des renards et lièvres arctiques modernes.

« Il n'est pas totalement insensé d'imaginer ces hyènes arctiques dotées d'un pelage fourni qui évolue et devient plus pâle en hiver pour leur permettre de chasser sans être repérées dans la neige, » explique Tseng.

 

MIGRATION DES HYÈNES

Alors que les hyènes évoluaient en Eurasie, Chasmaporthetes faisait partie d'une lignée arrivée en Amérique du Nord il y a environ 5 millions d'années avant de se propager jusqu'au Mexique. Ces hyènes auraient disparu il y a environ un million d'années, ce qui fait des nouveaux fossiles de dent les preuves les plus récentes de la présence des hyènes en Amérique du Nord.

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    Les chercheurs supposent depuis longtemps que les hyènes seraient arrivées en Amérique du Nord via le pont terrestre de Béringie qui reliait la Sibérie à l'Alaska lorsque les eaux étaient à un niveau inférieur. Cette découverte est toutefois la première preuve solide démontrant que les hyènes pouvaient survivre à l'environnement polaire de manière à pouvoir effectuer ce voyage.

    « C'est réellement amusant et passionnant de voir que les hyènes étaient bel et bien en Arctique et qu'elles ont emprunté cette route migratoire, » commente Larisa DeSantis, experte des fossiles de carnivores à l'université Vanderbilt, non impliquée dans l'étude. « Cela confirme ce que la communauté scientifique pensait depuis longtemps : ces hyènes sont arrivées depuis le pont terrestre de Béringie pour rejoindre les régions méridionales de l'Amérique du Nord. »

    « Nous découvrons des carnivores du Pléistocène bien plus au nord que nous ne l'avons jamais fait, » ajoute Ashley Reynolds, paléontologue à l'université de Toronto qui a récemment présenté la toute première preuve de la présence des tigres à dents de sabre, ou Smilodons, au Canada.

    « Les carnivores sont des maillons importants des écosystèmes, » poursuit-elle, « mais ils n'apparaissent que très rarement dans la chronique fossile, chaque découverte revêt donc une importance toute particulière. »

     

    Retrouvez John Pickrell sur Twitter.
    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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