Le comportement des calamars serait déterminé par leur date de naissance

Ce n’est pas de l’astrologie pour calamars, mais le résultat d’une très sérieuse étude. La date de naissance change la vie des calamars de l’espèce Heterololigo bleekeri – et, surtout, leur comportement en période de reproduction, de janvier à mai.

De Manon Meyer-Hilfiger
Publication 27 mai 2024, 09:44 CEST
Natif de l'ouest de l'Océan Pacific, le long des côtes de l'Asie, le calamar lance ne ...

Natif de l'ouest de l'Océan Pacific, le long des côtes de l'Asie, le calamar lance ne vit pas plus d'un an. Sa chair est très consommée au Japon.

PHOTOGRAPHIE DE Shota Hosono

Ce n’est pas de l’astrologie pour calamars, mais le résultat d’une très sérieuse étude parue dans la revue  Proceedings of the Royal Society B Biological Sciences. La date de naissance change la vie des calamars de l’espèce Heterololigo bleekeri – et, surtout, leur comportement en période de reproduction, de janvier à mai.

Né entre le 11 avril et le 23 juillet ? Le calamar risque d’être un séducteur agressif. Il n’hésitera pas à défier les autres mâles pour s’assurer une descendance. Il est du genre à se mettre « en couple » avec une femelle, déposer son sperme directement à l’intérieur d’elle, puis la protéger jalousement pendant qu’elle pond ses œufs.

Né entre le 2 juin et le 24 août ? C’est un calmar furtif et malin qui verra sans doute le jour. Au moment des amours, plus chétif que ses congénères nés avant lui, il est conscient de n’avoir que peu de chances au combat. Alors pour se reproduire, il doit user de la ruse. Quand la femelle dépose ses œufs quelque part, il dépose discrètement son sperme juste à côté, dans l’espoir de les fertiliser.

Comment l’expliquer ? Les scientifiques y travaillent. Mais voici ce que l’on peut d’ores et déjà affirmer. La vie des calamars est courte : un an en moyenne. La course pour devenir le plus « musclé » ne dure donc pas bien longtemps, et ceux qui partent tôt ont un avantage à vie.

Ce n’est pas tout. Les scientifiques soupçonnent aussi une influence de l’environnement. La température de l’eau pendant le stade embryonnaire du calamar (relativement long, qui dure de 18 à 111 jours) pourrait contribuer à créer un bagage plus ou moins favorable, qui changerait la tactique de reproduction ensuite. Ce serait donc une sorte de « déterminisme épigénétique» selon Shota Hosono, l’un des auteurs de l’étude. En fonction des conditions environnementales lors du développement des calamars, les gènes vont ensuite s’exprimer de différentes manières.

Le calmar, prédateur des profondeurs

Le mécanisme reste à préciser. Mais il pourrait expliquer cet étonnant phénomène : à la saison des amours, si certains mâles destinés à être « costauds » constatent qu’ils sont plus petits que les autres, ils vont attendre de grossir avant de faire le premier pas vers une femelle. Hors de question d’opter pour la stratégie furtive. Autre fait intéressant : en juin et en juillet, les calamars peuvent devenir soit des séducteurs agressifs, soit furtifs. Les scientifiques pensent que c’est à cause des courants, qui dispersent les embryons des calamars dans des eaux plus ou moins froides.

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    Vue en coupe transversale d’un statolithe. Ces calamars possèdent un épais dépôt, appelé « contrôle d’éclosion » qui apparaît le jour de leur naissance. Jours après jours, des stries de croissance viennent s'y dessiner, indiquant l'âge du calamar, à la manière des cernes de la souche d'un arbre qui indiquent le nombre d'années qu'a duré sa vie. 

    PHOTOGRAPHIE DE Shota Hosono

    Pour parvenir à ces premiers résultats, les chercheurs ont analysé plus de 350 calamars, qu’ils ont pêchés eux-mêmes ou bien prélevés sur des prises commerciales, entre 2020 et 2023. Pour connaître l’âge et la date de naissance des invertébrés, ils ont compté leurs « statolithes». Ce sont des bandes qui apparaissent chaque jour sur la peau des calamars. Comme pour les cernes des arbres, il suffit de les compter pour savoir si le calamar est tout jeune ou proche de la fin de vie. Avec cette étude, c’est la première fois que l’on prouve que la date de naissance a une influence sur des invertébrés aquatiques. Jusqu’ici, ce phénomène avait été observé uniquement chez les poissons. Selon les chercheurs, cette nouvelle découverte suggère que le jour de la naissance pourrait donc influencer bien plus d’animaux qu’on ne le pensait par le passé.

    Retrouvez nos reportages sur les superpouvoirs des pieuvres dans le numéro 296 du magazine National Geographic. S'abonner au magazine

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