Découverte d'une nouvelle espèce de crabe-yéti velu en Antarctique

Ce crustacé des eaux profondes, qui vit à proximité des sources hydrothermales, n'est que la troisième espèce de crabe-yéti connue de la science.

De Jason Bittel
Ce gros spécimen de Kiwa tyleri mâle a les pattes recouvertes de bactéries, sa principale nourriture.
Ce gros spécimen de Kiwa tyleri mâle a les pattes recouvertes de bactéries, sa principale nourriture.
Photo Nerc conseil National Britannique De Recherche Environnementale

Il est blanc, il est velu, et il vit bien caché. C’est le yéti ! Enfin… le crabe-yéti. Découvrez Kiwa tyleri, le petit dernier de la famille des crabes-yétis et le premier à avoir été découvert dans les eaux froides de l’Antarctique.

Contrairement à l’abominable homme des neiges avec qui il partage son nom, ce crustacé à pinces varie en taille de 0,5 à 15 centimètres. Ce n’est que la troisième espèce de crabe yéti connue à ce jour ; le premier représentant de ce groupe de créatures aux pattes velues ayant été découvert en 2005 dans l’océan Pacifique Sud. 

En 2010, dans le cadre de recherches de nouveaux crabes-yétis, des scientifiques ont dirigé le véhicule qu’ils pilotaient à distance vers les sources hydrothermales de l’est de la dorsale Scotia, à plus de 2 600 mètres de profondeur.

C’est à cet endroit qu’ils ont trouvé d’importantes communautés de crabes-yétis. Ceux-ci vivent dans des conditions bien plus rudes que celles que leurs cousins.

« Nous avons su immédiatement qu’il s’agissait de quelque-chose de tout à fait nouveau et unique dans le domaine de recherche des sources hydrothermales, » se souvient Sven Thatje, directeur de l’étude et écologiste à l’université de Southampton au Royaume-Uni. 

L’analyse des crabes de l’Antarctique a révélé qu’il s’agissait d’une espèce génétiquement différente, peut-on lire dans l’étude publiée le 24 juin dans la revue PLOS ONE.

 

ZONE HABITABLE

Les températures des eaux autour de la dorsale de Scotia dépassent généralement à peine le point de congélation. En revanche, le liquide brûlant qui s’échappe des sources dépasse quant à lui la barre des 400 °C.

Comme l’eau se refroidit très rapidement dès sa sortie de la source, K. tyleri ne dispose que d’une petite zone habitable pour survivre. S’il se rapproche trop de la source, il cuit, et s’il s’en éloigne trop, il gèle.

Les crabes-yétis mâles et femelles se rassemblent sur une source hydrothermale de la dorsale de Scotia, dans les eaux au large de l'Antarctique.
Photo Nerc conseil National Britannique De Recherche Environnementale

Ainsi, explique Thatje, les yétis de l’Antarctique s’amassent en tas bien plus serrés que les deux autres espèces connues. Il les a observés se grimper les uns sur les autres, « comme dans une boîte de sardines, occupant tout l’espace. » Il y a environ 700 individus par mètre carré.

Thatje ajoute que cette espèce est plus adaptée à l’escalade que ses cousins grâce à ses membres antérieurs plus courts et plus robustes. K. tyleri est aussi plus trapu et plus compact que ses cousins des plaines abyssales. Ce physique lui permet probablement de mieux se positionner sur les surfaces verticales des sources.

L’équipe a observé des femelles s’aventurer en-dehors des zones habitables autour des sources. Pour l’expliquer, Thatje émet l’hypothèse que, comme c’est le cas chez de nombreuses autres espèces d’eaux profondes, les larves des crabes yétis ont besoin de températures plus basses pour se développer.

La mère doit donc faire un gros sacrifice. Le froid détériore leur corps sur la durée, ce qui laisse des traces visibles sur les femelles. Il est probable que les crabes femelles ne puissent se reproduire qu’une seule fois avant de mourir.

 

RIEN DE MIEUX QU'UN TORSE POILU

Dans l’ensemble, les crabes-yétis font preuve de grandes prouesses pour s’adapter à leur milieu difficile. En l’absence de rayons du soleil, ils ont trouvé un autre moyen d’obtenir de l’énergie en « cultivant » leur nourriture.

Ils possèdent une sorte de pilosité sur leur corps et leurs pinces, connue sous le nom de setae, qui attire les bactéries dont ils se nourrissent principalement. 

Ce corps velu lui vaut le surnom de « crabe Hoff », en hommage à la star d’Alerte à Malibu David Hasselhoff.

Thatje n’a rien contre David Hasselhoff, mais il avoue préférer le nom officiel de l’espèce, K. tyleri, qu’il a choisi avec son équipe pour rendre hommage à la carrière de Paul Tyler, professeur émérite de l’université de Southampton et pionnier de la recherche en eaux profondes.

Andrew Thurber, océanologue à l’université d’État de l’Oregon, salue la découverte de ce crabe-yéti comme « une découverte vraiment incroyable. »

C’est particulièrement vrai étant donné que personne ne connaissait l’existence de cet animal il y a encore dix ans, continue Thurber. Ce dernier avait participé à la description de la deuxième espèce de crabe yéti découverte au large du Costa Rica, en 2011.

« Cela montre bien que nous ne savons que peu de choses, » dit-il, « et que certaines des nouvelles espèces que nous découvrons sont parfois bien plus répandues qu’on ne le pense. »

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