L'accouplement de baudroies des abysses filmé pour la première fois

Parce qu'elles vivent dans les profondeurs de l'océan, les baudroies ont été très peu filmées.

De Elaina Zachos
L'accouplement de baudroies des abysses a été filmé pour la première fois

C'est en découvrant les corps de mâles attachés à celui de femelles mortes que les scientifiques ont découvert cet étrange rituel d'accouplement. Il n'est pas possible d'étudier les organismes vivants dans les abysses, comme les baudroies, en laboratoire car elles ne survivraient pas au changement brusque de pression et aux températures plus élevées.

 

UN SPECTACLE MORTEL

Le rituel d'accouplement de ce poisson, pour le moins étrange, n'est pas le seul élément à avoir été révélé par cette vidéo : la structure de leurs corps semble n'exister chez aucun autre poisson. Habituellement, les filaments reliés à la membrane des autres espèces bougent à l'unisson alors que chez les Caulophrynidae, les filaments lumineux disposent chacun de leurs propres muscles et nerfs et semblent fonctionner indépendament.

« Si une proie touche l'un de ces filaments, le baudroie s'oriente vers elle et la gobe », explique Ted Pietsch à la revue Science Magazine. « La nourriture est rare à cette profondeur et ils ne peuvent pas se permettre de rater un repas ».

Il estime que le « spectacle de lumière » donné par la femelle est une façon d'attirer les proies ou de se protéger des prédateurs potentiels en leur faisant croire qu'elle est plus imposante qu'elle n'y paraît. Il se peut aussi que la baudroie imite les méduses venimeuses pour éviter d'être dévorée.

Le sous-marin utilisé par les Jakobsen pour filmer la baudroie est en fonction depuis 2013. Les études sur ce poisson étrange sont peu nombreuses. À l'avenir, nous risquons donc d'en apprendre beaucoup à son sujet.

Exemple de baudroies en fusion.
PHOTOGRAPHIE DE Getty images

Dans le nord de l'océan Atlantique, à plusieurs centaines de mètres de profondeur, il se passe quelque chose d'intrigant.

Filmée par la Rebikoff-Niggeler Foundation et publiée en exclusivité dans la revue Science Magazine, une séquence vidéo rare montre une femelle Caulophrynidae qui tangue doucement d'avant en arrrière dans les eaux froides et sombres de l'Atlantique nord, à près de 800 mètres de profondeur. En regardant la vidéo avec attention, vous pouvez aperçevoir un petit mâle, un « parasite sexuel » accroché à son ventre.

Ces mystérieux habitants des abysses vivent dans des conditions extrêmes et il est rare de les observer vivants dans leur habitat naturel. En août 2016, au terme d'une excursion de cinq heures à bord d'un sous-marin en eau profonde près de l'île portugaise São Jorge, les photographes animaliers Kirsten et Joachim Jakobsen parviennent à filmer une baudroie. Ils montrent ensuite leur vidéo à Ted Pietsch, professeur émérite de la School of Aquatic and Fishery Sciences (école des sciences aquatiques et de la pêche) de l'Université de Washington. Un an plus tard, cette vidéo exceptionnelle est enfin dévoilée au grand public.

Dans une séquence de 25 min, on aperçoit une baudroie de la taille d'un poing flottant dans un nuage clairsemé de filaments semblables à des vibrisses bioluminescents. L'individu filmé est un Caulophryne jordani. Il existe 14 spécimens femelles au monde qui appartiennent à des collections d'histoire naturelle, mais aucun mâle vivant n'a été observé.

« C'est quelque chose d'unique et de jamais vu », a délaré Ted Pietsch dans un communiqué de presse. « C'est vraiment merveilleux d'enfin voir ce que nous n'avions qu'imaginé jusqu'à maintenant ».

 

UN AMOUR DE PARASITE

Il existe plus de 200 espèces de baudroies des abysses dans le monde entier, mais ces dernières sont particulièrement difficiles à étudier en raison de l'environnement hostile dans lequel elles vivent. D'après Ted Pietsch, ce n'est que la troisième fois que ce comportement chez les baudroies des abysses est filmé.

Vivants à une profondeur comprise entre 300 et 5 00 mètres, les femelles baudroies attirent leurs proies à l'aide d'un leurre bioluminescent appelé l'esca, situé sur leur museau. Les poissons utilisent leur bouche dentée et leur estomac extensible pour gober en une seule fois des proies plus grandes qu'eux.

La lumière émise par l'esca est produite par une bactérie symbiotique. Seules les femelles sont dotées de cette caractéristique. Les mâles baudroies, qui sont beaucoup plus petits que leurs partenaires et dotés de grands yeux, comptent sur leur très bonne acuité visuelle et leurs narines pour trouver les femelles grâce aux hormones qu'elles libèrent. Une fois qu'un mâle a trouvé une femelle, il la mord au niveau du ventre et s'accroche à son corps. Ses tissus et son système sanguin fusionneront ensuite avec ceux de la femelle. Le mâle se nourrira des nutriments présents dans le sang de la femelle, mais perdra ses yeux, ses nageoires, ses dents et la plupart de ses organes internes en échange du service rendu. Il ne servira donc que de banque de sperme lorsque la femelle sera prête à pondre.

« Une fois qu'un mâle trouve une femelle, il la mord et leurs tissus fusionnent », indique Bruce Robinson, biologiste marin des abysses au Monterey Bay Aquarium Research Institute à National Geographic

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