Tenir la distance : l'extraordinaire odyssée des oiseaux migrateurs

Reportage embarqué sur les traces de « 15J » - une des rares espèces de grues blanches encore sauvages. Ces oiseaux doivent parcourir chaque année près de 8 000 km à travers l'Amérique du Nord pour assurer la survie de l'espèce.

De Rene Ebersole, photographies par Michael Forsberg
Publication 26 mars 2024, 11:14 CET
Des grues blanches se posent sur un bassin d’eau de pluie dans le Nebraska pour y ...

Des grues blanches se posent sur un bassin d’eau de pluie dans le Nebraska pour y passer la nuit.

PHOTOGRAPHIE DE Michael Forsberg

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Nous nous trouvons à 250 mètres d'altitude, à bord d'un hélicoptère, avec une équipe de scientifiques, au-dessus de la forêt boréale englobant le parc national de Wood Buffalo, au Canada, quand l’un d’entre eux s’est écrié: «Oiseau à 9 heures ! » Paul Spring, le pilote, a alors viré sur la gauche, inclinant l’appareil pour mieux voir l’un des innombrables plans d’eau s’étendant à perte de vue. Au milieu de la zone marécageuse, nous pouvions distinguer deux taches blanches, hautes d’environ 1,50 m au-dessus du niveau du sol. 

«Je vois un gruon», a signalé John Conkin, biologiste de la faune d’Environnement et changement climatique Canada (ECCC), en braquant ses jumelles sur un oiseau couleur rouille, légèrement plus petit que ses parents, qui marchait à grandes enjambées dans le marais. Le pilote a repéré un terrain où se poser et John Conkin, son collègue écologue de l’ECCC Mark

Bidwell, Dave Brandt, biologiste au Service géologique des États-Unis (USGS), et Sandie Black, vétérinaire canadienne de la faune sauvage, ont déboulé de l’hélicoptère. 

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    Une jeune grue blanche (au centre) et ses parents traversent à grandes enjambées les zones humides du parc national de Wood Buffalo, au Canada.

    PHOTOGRAPHIE DE Michael Forsberg

    Ils ne disposaient que de douze minutes pour retrouver et capturer l’objet de leurs recherches : un poussin de grue blanche sauvage parfaitement à l’aise dans une boue épaisse et collante, au milieu de ronces et de joncs. En restant plus longtemps, l’équipe risquait de trop stresser les oiseaux. 

    Pendant que les chercheurs disparaissaient dans la végétation, Paul Spring et moi avons redécollé pour les assister depuis les airs. Sentant l’approche des humains, les parents grues ont battu de leurs ailes géantes aux extrémités noires et se sont enfuis, laissant derrière eux leur progéniture incapable de voler. Par talkie-walkie, Paul Spring informa le groupe: «Je surveille le petit. Il est juste en dessous de l’hélico. Venez vers l’appareil. »

    Aussitôt renseignée, l’équipe s’est lancée dans les broussailles, avançant aussi vite que le terrain détrempé le lui permettait. Dans une manœuvre parfaitement rodée, John Conkin s’est approché du gruon, a saisi son bec, sa tête et ses pattes, et l’a soigneusement calé sous son bras.

    Deux adultes et un juvénile, reconnaissable à son plumage rouille, migrent vers le sud en survolant les Grandes Plaines à la fin de l’automne. Les parents enseignent à leurs petits l’emplacement des haltes fiables pendant le voyage.

    PHOTOGRAPHIE DE Michael Forsberg

    Coup d’œil sur le chrono : 6  minutes et 36 secondes. L’oiseau était maîtrisé, mais la partie plus technique restait à venir. En sueur, le groupe a déballé son matériel. Dave Brandt, biologiste chevronné, tenait le gruon sur ses genoux, guidant John Conkin pendant que celui-ci fixait un émetteur sur une patte et des bagues de couleur (bleu, jaune, vert) sur l’autre. En même temps, la vétérinaire Sandie Black lui faisait un bilan de santé, vérifiant ses yeux et son état corporel. Elle effectua plusieurs prélèvements –sang, plumes, salive et matières fécales– pour les analyser ensuite en laboratoire afin de déterminer son sexe et savoir s’il avait été exposé à des produits chimiques ou à des maladies, dont la forme hautement pathogène de la grippe aviaire (IAHP). Il fut aussi pesé. 

    Tous parlaient à voix basse. Une fois le travail terminé, Dave Brandt a porté l’animal jusqu’au bord du marais et l’a posé délicatement sur le sol avant de filer. Ce gruon – désormais connu sous le nom de 15J – s’est enfui dans la direction opposée, s’enfonçant dans le marais pour y retrouver ses parents. 

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