Sénégal : la Venise africaine face à la montée des eaux

L’érosion du littoral sénégalais et la montée constante des eaux créent chaque jour de nouveaux réfugiés climatiques.

De Juliette Heuzebroc
Publication 6 févr. 2018, 14:55 CET
Vestiges dans le Parc national de la Langue de Barbarie (Sénégal).
Vestiges dans le Parc national de la Langue de Barbarie (Sénégal).
PHOTOGRAPHIE DE Wikimédia Commons

Depuis sa construction en 1659, Saint-Louis est l’une des villes les plus importantes du Sénégal. En témoigne son inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2000. Mais aujourd'hui celle qu’on surnomme la « Venise africaine » est fortement exposée aux aléas climatiques. C’est tout particulièrement la Langue de Barbarie qui fait les frais d’une montée des eaux aussi rapide que violente.

La Langue de Barbarie est le front de mer le plus exposé à l’invasion des eaux qui frappe Saint-Louis. Également classé Parc National pour sa diversité ornithologique, l’espace est très vulnérable car situé à la jonction entre le fleuve Sénégal et l’océan atlantique.

La situation, historiquement difficile à gérer par les autorités, s’est aggravée en 2003. La région a connu de fortes crues du fleuve Sénégal. Dans l’urgence, le gouvernement a ordonné le creusement d’une brèche à 10 km de Saint-Louis afin d’évacuer les eaux. Le dispositif n’a malheureusement pas eu l’effet escompté : la brèche s’est immédiatement transformée en véritable bras de mer et s’est agrandie de 4 m à 80 m en seulement deux jours. Aujourd’hui, celle-ci mesure plus de 6 km.

Cette modification du paysage maritime dégrade fortement les conditions de pêche, activité centrale dans l’économie locale. Par ailleurs la salinisation du fleuve a rendu la nappe phréatique impropre à la boisson, et l’agriculture maraîchère impossible.

Coucher de soleil à Saint-Louis
PHOTOGRAPHIE DE Theodor paleolog

Une étude publiée en 2013 par la Banque Mondiale indiquait que le territoire perdait 5 à 6 mètres de plage par an. La région a ainsi vu des habitations et écoles détruites et des villages entiers engloutis par les eaux. Ce phénomène fait croître de jour en jour le nombre de réfugiés climatiques de la région.

Après la destruction de leurs maisons sur la côte, beaucoup de sinistrés ont déménagé dans le quartier de Guet Ndar. Depuis, le quartier est devenu le 3e le plus densément peuplé au monde avec 30 000 habitants par km². Plus de 800 familles sont directement menacées par l’avancée de l’océan.

Lors d’une tempête en août dernier, les vagues ont atteint les habitations et les ont envahies en pleine nuit. Environ 150 familles ont ainsi été évacuées pour le Camp Khaar Yallah où les réfugiés vivent jusqu’à 10 sous une même tente et où le sentiment d’abandon se fait sentir.

Les experts estiment que la Langue de Barbarie pourrait avoir disparue d’ici 30 à 50 ans. Certains locaux se sont donc mobilisés pour replanter des mangroves et ainsi ralentir l’effet d’érosion de la côte. En novembre 2017, un projet de digue de 3,5 km de long a été lancé et devrait servir de solution temporaire. Une aide internationale semble également s’organiser.

Lors de sa visite à Saint-Louis la semaine dernière, le président Emmanuel Macron a annoncé que la France investirait 15 millions d’euros dans la protection du littoral. À cette somme s’ajoutent 24 millions d’euros promis par Jim Yong Kim, président de la Banque Mondiale.

 

Retrouvez Juliette Heuzebroc sur Twitter.

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