L’Inde puise dans ses dernières réserves en eau

Les ressources en eau dans le sud du pays s’amenuisent et les États confrontés à cette pénurie peinent à trouver une solution.

De Juliette Heuzebroc
Publication 7 mai 2018, 17:01 CEST
En août 2010, une femme pakistanaise transporte de l'eau potable sur une route de Baseera, endommagée lorsque le fleuve Indus a submergé des dizaines de villes.
PHOTOGRAPHIE DE Aaron Favila, Ap

Samedi 5 mai, Bangalore et son état du Karnataka ont à nouveau été le théâtre de manifestations pour protester contre la libération d’une partie des ressources du fleuve Cauvery en faveur de l’état limitrophe, le Tamil Nadu. Ces manifestations dans le sud du pays sont récurrentes et mènent régulièrement à des affrontements très violents voire meurtriers.

Si l’Inde est depuis longtemps un pays particulièrement exposé à la sécheresse, l’entrée dans la « révolution verte » qu’a opéré le pays dans les années 1960 a été décisive dans l’aggravation de la crise de l’eau. L’objectif de cette révolution était d’empêcher autant que possible les récurrentes périodes de famine en devenant autosuffisant sur le plan de la production alimentaire. Pour ce faire, le pays a fortement développé son activité agricole et donc ses techniques d’irrigation. Les agriculteurs ont entamé les réserves souterraines, plutôt que celles de surface comme ils le faisaient à petite échelle auparavant.

« La révolution verte a entraîné un développement des engrais, mais surtout de l'irrigation. On est passés de l'utilisation des eaux de surface (lacs, fleuves…) aux eaux souterraines, avec 25 millions de forages dans le pays qui ont entraîné une baisse importante des nappes aquifères. » expliquait Jean-Christophe Maréchal du Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM) en 2016.

La révolution verte a effectivement permis à l’Inde de prendre son indépendance mais pas totalement puisque le pays fait encore partie des « moonsoon economy », c’est-à-dire que sa production et son économie sont fortement influencées par la période des moussons, principalement dans les zones rurales.

L’augmentation de la production, accompagnée d’une politique d’autorisation de pompe gratuite, a entraîné un développement démographique intrinsèque, faisant croître les besoins en eau par la même occasion. Une étude de 2016 menée par l’IRD estimait que « les eaux souterraines peu profondes (60 mètres, ndlr) seront vides d'ici 10 ans si le type de culture agricole ne change pas ». Par ailleurs, les provinces ne facilitent pas la résolution du problème avec des politiques contre-productives : si une province est en amont, elle construit des barrages tandis que celle en aval développe ses systèmes d’irrigation pour justifier d’un plus grand besoin en eau, et donc l’ouverture des barrages.

Des villageois constatent les dégâts de la tempête de sable qui a touché Kheragarh, dans les environs d'Agra en Inde, le 4 mai 2018.
PHOTOGRAPHIE DE AFP, Chandan Khanna

Ces difficultés sont principalement constatées dans le sud du pays, le nord étant fourni en eau par la chaîne himalayenne. Ce qui n’empêche pas les provinces du nord d’être fortement touchées par la sécheresse : une tempête de sable d’une extrême intensité causée par la sécheresse a frappé les États de l’Uttar Pradesh et du Rajasthan cette semaine, faisant près de 150 morts.

Bangalore est un exemple plus qu’éloquent de la crise d’eau et de l’épuisement des ressources de nos nappes phréatiques mais d’autres grandes villes mondiales, comme Le Cap, sont aussi menacées. La BBC a récemment dressé une liste des onze villes qui pourraient être les premières à affronter la pénurie.

 

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