Olivier Guyon, l'astronome chercheur d'exoplanètes

Cet astronome français de 43 ans développe des appareils optiques de pointe, qui, couplés à des télescopes au sol, permettent d’observer les exoplanètes. Zoom sur le parcours d’un passionné du ciel.

De Julie Lacaze
Publication 9 avr. 2019, 10:26 CEST
Des rayons laser jaillissent du Très Grand Télescope de l'Observatoire européen austral, dans le désert d'Atacama (Chili). Ils créent des étoiles guides artificielles, qui servent à corriger les distorsion dues aux turbulences atmosphériques. Ce télescope est l'un des rares outils capables de capter des exoplanètes géantes en lumière directe.
PHOTOGRAPHIE DE Gerhard Hüdepohl, Eso, Photo publiée dans le magazine National Geographic n° 234

Très tôt, Olivier Guyon a les yeux rivés sur le ciel étoilé. Tout commence en primaire, par un livre d’astronomie, cadeau qu’il reçoit d’un membre de sa famille. Rapidement, le jeune garçon cherche à confirmer la réalité de ce qu’il apprend dans son précieux manuel, en observant la Voie lactée depuis son jardin de la campagne champenoise, avec une paire de jumelles empruntée à ses parents. Il passe de longues heures à regarder les amas d’étoiles, la galaxie d’Andromède, et réalise que, comme notre Soleil, de nombreux objets physiques sont présents dans le ciel.

À 14 ans, ses parents lui offrent son premier télescope. Sa vocation est née : il sera astronome. Il ne dort plus beaucoup la nuit, mais sa passion le fait briller à l’école, surtout en physique et en mathématiques. Quand il estime que sa lunette astronomique devient trop petite, il en construit une autre de 50 cm de diamètre. Il n’a que 17 ans et vit désormais avec ses parents à Dublin.

Bien que le ciel irlandais soit souvent voilé, le club d’astronomie de la ville est très dynamique. Olivier Guyon observe des comètes, des planètes, des amas d’étoiles, des nébuleuses, qu’il reproduit en dessin à l’occasion. De retour en France, il se dirige tout naturellement, après le bac, vers une classe préparatoire scientifique et passe avec succès le concours de l’École normale supérieure (ENS). Puis, un doctorat en astrophysique le conduit à travailler avec une équipe de l’université d'Hawaii (États-Unis) sur l’optique adaptative et la coronographie. Deux domaines de la physique qui le mènent à se pencher, dès 2002, en fin de thèse, sur des corps étranges récemment découverts : les exoplanètes, dont la première a été décrite en 1995.

Observer les planètes extérieures à notre système solaire nécessite un très gros télescope au sol. Problème : la lumière qui provient de l’espace est déformée par notre atmosphère. L’optique adaptative permet donc de corriger ces erreurs de lumière. La coronographie, quant à elle, permet d’observer une planète sans être gêné par la lumière émise par son étoile. Olivier Guyon développe des techniques de pointe dans ces deux spécialités.

L’appareil SCExAo combine un coronographe et un correcteur d’optique adaptative. Lors de l’observation d’une exoplanète, ces deux technologies associées à un télescope au sol permettent de ne pas être gêné par la lumière produite par une étoile et de corriger les erreurs de lumière liés à l’entrée de celle-ci dans l’atmosphère terrestre.
PHOTOGRAPHIE DE Olivier Guyon

Il construit d’abord le coronographe SCExAO de Subaru, un télescope optique japonais parmi les plus grands du monde, installé sur l’île d’Hawaii. L'appareil est aujourd’hui l’un des plus performants de sa génération. Grâce à celui-ci, l’équipe d’Olivier Guyon prend des images spectaculaires d’exoplanètes. Leurs principales observations : des planètes gazeuses de la taille de Jupiter, situées dans notre galaxie, notamment celle de l’étoile Kappa d’Andromède et quatre autres gravitant dans un système stellaire nommé HR8799. En parallèle, il développe des outils d’observation pour la Nasa et enseigne à l’université de l’Arizona.

Son prochain objectif est d’adapter la technologie mise au point pour Subaru à de très grands télescopes au sol. Seuls ces appareils de dernière génération présenteront la technologie adéquate pour observer d’éventuelles biosignatures, c’est-à-dire la présence d’eau et d’oxygène dans l’atmosphère exoplanétaire. Pour y parvenir, trois télescopes d’une trentaine de mètres sont actuellement en construction : ELT (Extremely Large Telescope), projet de l’Observatoire européen austral dans le désert d’Atacama, au Chili ; GMT (Giant Magellan telescope), situé également au Chili et financé par plusieurs universités internationales, et TMT (Thirty Meter Telescope), à Hawaii, issu d’un partenariat entre Japonais, Canadiens, Américains, Indiens et Chinois.

Le Français Olivier Guyon, 43 ans, est astronome. Il développe des technologies d’observation des exoplanètes pour différents projets spatiaux internationaux.
PHOTOGRAPHIE DE Olivier Guyon

Guyon travaille actuellement sur les deux derniers projets. Il pense que, dans dix ans, ces observatoires au sol seront suffisamment au point pour prendre les premières images de planètes rocheuses de la taille de la Terre et de révéler, peut-être, la présence d’une biosignature sur certaines d’entre elles. Ces très grands télescopes se focaliseront sur l’observation d’étoiles de type M, qui sont à la fois les plus nombreuses et les moins lumineuses (cent fois moins que le Soleil) de notre galaxie. Dans l’état d’avancement actuel des technologies, un astre aussi brillant que le Soleil ne peut pas être observé depuis le sol, car il envoie trop de lumière, ce qui gêne l’observation de ses planètes.

Reste un certain nombre d’obstacles à franchir et d’interrogations en suspens. Comme les étoiles de type M sont de petite taille, leurs planètes sont très proches, ce qui induit un verrouillage gravitationnel. Une face est alors en permanence tournée vers son étoile, quand l’autre ne reçoit pas de lumière. Cette situation pourrait créer des climats aux températures extrêmes, peu compatibles avec la vie. De plus, leur proximité avec l’astre les expose aux explosions stellaires.

Mais Olivier Guyon se veut optimiste. Selon lui, les exoplanètes réservent bien des surprises, tant leur champ d’étude est nouveau et ouvre des voies encore inimaginables. L’astrophysicien juge probable que les exoplanètes des étoiles froides aient développé une atmosphère permettant de répartir la température de façon homogène sur l’ensemble de leur surface. Son rêve ultime serait d’assister à la découverte d’une présence biologique sur l’une d’entre elles.

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