Découverte d'une planète rocheuse supermassive à 730 années-lumière de la Terre

Avec une masse 40 fois supérieure à celle de la Terre, ce nouvel objet cosmique force les astronomes à repenser les théories de formation planétaire.

De Nadia Drake
Publication 2 juil. 2020, 17:16 CEST
La planète TOI-849b est presque aussi grande que Neptune, mais c'est un monde rocheux à l'incroyable ...

La planète TOI-849b est presque aussi grande que Neptune, mais c'est un monde rocheux à l'incroyable densité qui orbite à faible distance de son étoile.

PHOTOGRAPHIE DE Illustration de Mark Garlick, University of Warwick

À 730 années-lumière environ, une broutille à l'échelle de notre galaxie, une étonnante planète orbite autour d'une étoile similaire à notre Soleil. Grande, dense et étroitement liée à son étoile, la planète ne ressemble en rien à ce que les astronomes ont pu observer jusqu'à présent, dans notre système solaire ou ailleurs.

TOI-849b, c'est le nom donné à cet astre torréfié, la plus massive des planètes rocheuses affichant près de quarante fois la masse terrestre. Avec un tel gabarit, TOI-849b devrait être une géante gazeuse, comme Jupiter, mais elle est quasiment dépourvue d'atmosphère. Pour les scientifiques, expliquer l'émergence d'un tel objet remet en question les connaissances actuelles au sujet de la formation des planètes.

« Il est très difficile de produire une planète aussi dense et massive que TOI-849b sans en faire une géante gazeuse, » indique par e-mail David Armstrong, chercheur en exoplanètes à l'université de Warwick et auteur principal de l'étude introduisant la nouvelle planète publiée dans la revue Nature. « Il y a eu un problème au cours de ce processus standard. » D'après Armstrong et ses collègues, ce monde serait le noyau exposé et dépourvu d'air d'une planète géante qui aurait dû surpasser Jupiter en taille.

« C'est l'un de ces objets qui repoussent les limites de la théorie et rendent aussi palpitant le domaine des exoplanètes et de la planétologie, » déclare par e-mail Ravit Helled, coauteur de l'étude rattaché à l'université de Zurich.

« C'est vraiment bizarre ! » ajoute Jonathan Fortney, directeur de l'Other Worlds Laboratory de l'université de Californie à Santa Cruz, non impliqué dans les observations. « Mais je ne sais pas ce qu'on peut en déduire. »

 

CURIOSITÉS COSMIQUES

Au cours de la dernière décennie, les chasseurs de planètes ont identifié des milliers de mondes reculés parmi les champs d'étoiles de la galaxie. La plupart sont décidément étranges et appartiennent à des catégories telles que les « Jupiters chauds », de grandes planètes gazeuses orbitant près de leur étoile, ou les « super-Terres », des planètes rocheuses plus grandes que la nôtre et plus petites que Neptune. Mais de son côté, TOI-849b défie toute classification.

La planète a été détectée par le télescope chasseur d'exoplanètes TESS (Transiting Exoplanet Survey Satellite) de la NASA dont la mission consiste à scruter les alentours de 200 000 étoiles parmi les plus proches et brillantes. TOI-849b a trahi sa présence en passant devant son étoile et en masquant brièvement un petit point de lumière. Ces ombres passagères ont révélé que ce monde extraterrestre faisait le tour de son étoile en 18 heures, ce qui implique une température de surface avoisinant les 1 500 °C.

Les observations de TESS ont également montré que la planète était 3,4 fois plus grande que la Terre, ou d'une taille équivalente à 85 % celle de Neptune, ce qui en fait un astre anormalement grand pour une telle proximité avec son étoile. Jusqu'à présent, les astronomes ont surtout observé des Jupiter chauds ou des super-Terres bien plus petites sur des orbites aussi rapprochées et rien ne peuplait la zone connue sous le nom de désert des Neptune chauds.

« Il n'y a vraiment aucune planète de cette masse à cet endroit, » assure Fortney. Le rayon de TOI-849b en fait une bonne candidate à la catégorie des Neptune chauds, mais sa masse est deux à trois fois supérieure.

En analysant les oscillations gravitationnelles de l'étoile hôte avec l'instrument HARPS de l'observatoire de La Silla au Chili, les chercheurs ont découvert qu'alors même que la taille de TOI-849b était équivalente à celle de Neptune, sa masse était au moins deux fois supérieure, ce qui suggère une densité extrême. La planète rocheuse est peut-être dotée d'une fine atmosphère, probablement composée d'hydrogène et d'hélium, bien loin de la quantité de gaz à laquelle un monde aussi imposant devrait s'accrocher.

« Nous pensons qu'elle se compose d'un mélange de métaux, silicates, eau et peut-être une (très) petite atmosphère, » indique Helled.

 

RELIQUE D'UN LOINTAIN PASSÉ ?

Pour Armstrong et ses collèges, les curieuses propriétés de la planète suggèrent que ce monde mystérieux ne serait probablement que le noyau d'une géante gazeuse née pour surclasser Jupiter. Les géantes de gaz de notre système solaire se composent sans doute d'un noyau dense de roche et de matériaux exotiques, mais aucun ne rivalise avec TOI-849b.

« Cela va peut-être vous surprendre, mais nos estimations de la masse du noyau de Jupiter sont encore incertaines, » déclare Armstrong. « Néanmoins, certains travaux récents suggèrent une limite supérieure autour de 25 masses terrestres. TOI-849b est encore plus massive que ça. »

D'après les théories actuelles, les planètes se formeraient à partir de petites graines de roche et de glace plantées dans les disques tourbillonnants de gaz et de poussière qui entourent les jeunes étoiles. Certaines planètes amassent un peu de matière et restent petites, c'est le cas de la Terre, alors que d'autres se gonflent de différents gaz pour devenir des mondes aux atmosphères gargantuesques, comme Jupiter ou Saturne.

Comme nous l'explique Armstrong, lorsqu'une planète atteint environ 10 masses terrestres, elle entame un processus d'accrétion des gaz et sa gravité parvient rapidement à capter l'hydrogène et l'hélium environnant. Une planète de 40 masses terrestres devrait, selon toute vraisemblance, accumuler un extraordinaire volume de gaz mais ce n'est pas ce que l'on observe aujourd'hui avec TOI-849b.

« On peut déjà affirmer que les planètes comme TOI-849b sont rares, mais elles n'en existent pas moins pour autant ; il nous reste encore à trouver comment et pourquoi, » déclare Helled.

Il est possible que TOI-849b ait créé un vide de gaz autour de son étoile avant d'être à court de matière à agglomérer pour finalement rester telle quelle. Il existe également une autre possibilité : TOI-849b serait le noyau d'une ancienne planète géante qui aurait perdu son atmosphère d'une façon ou d'une autre, peut-être à cause de la proximité avec son étoile. Le cas échéant, les scientifiques restent dans l'incapacité d'expliquer comment la planète se serait séparée de plusieurs centaines de masses terrestres de gaz en à peine quelques milliards d'années.

Un troisième scénario voudrait que des cataclysmes survenus dans les jeunes années de la planète aient à la fois contribué à former le noyau de la planète et la délester de son atmosphère, par exemple une collision avec d'autres graines planétaires de taille similaire.

« Je pense que l'indice clé est la présence de TOI-849b dans le désert des Neptune chauds, signe d'une histoire singulière, » conclut Armstrong. « Pour moi, cette anomalie suggère un scénario hors du commun. »

 

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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