Trente ans après Magellan, la NASA remet le cap sur Vénus

Pourquoi Vénus ressemble-t-elle à une version infernale et toxique de la Terre ? C'est la question à laquelle deux sondes spatiales de la NASA devraient permettre de répondre.

De Nadia Drake
Publication 4 juin 2021, 15:04 CEST
Venus

Désormais capables de voir au-delà de l'épaisse atmosphère de Vénus, des sondes spatiales nous révèlent une surface extraterrestre qui, d'une certaine façon, ressemble étrangement à celle de la Terre.

PHOTOGRAPHIE DE NASA, JPL

À la grande surprise des planétologues, la NASA vient d'annoncer son intention de faire de la tumultueuse et toxique Vénus la cible de ses deux prochaines missions dans le cadre du célèbre programme Discovery.

« Ces deux missions jumelles, dont l'objectif est de comprendre comment Vénus est devenue ce monde infernal où même le plomb fond en surface, offriront à l'ensemble de la communauté scientifique la chance d'étudier une planète que nous n'avons pas visitée depuis plus de 30 ans, » a déclaré l'administrateur de la NASA, Bill Nelson, lors de la conférence de presse. « Nous espérons que ces missions permettront d'approfondir notre compréhension de l'évolution de la Terre et des raisons pour lesquelles notre planète est aujourd'hui habitable, à la différence d'autres planètes rocheuses de notre système solaire. »

L'une des sondes, baptisée DAVINCI+, étudiera l'atmosphère toxique de Vénus où le dioxyde de carbone se mélange aux nuages d'acide sulfurique pour donner naissance à un voile ténébreux. L'autre, VERITAS, réalisera des cartes détaillées de la surface et tentera de reconstituer son histoire géologique.

Le binôme a battu deux autres finalistes dont l'objectif était l'envoi de sondes vers la lune volcanique de Jupiter, Io, ou Triton, un satellite de Jupiter, deux destinations pourtant haut placées sur la liste d'envies des planétologues depuis plusieurs décennies.

La sonde New Horizons de la NASA a capturé cette image de Io, une lune de Jupiter, et l'un de ses volcans en éruption, lors d'une rencontre avec Jupiter en 2007 sur la route de Pluton.

PHOTOGRAPHIE DE NASA, Applied Physics Laboratory de l'université Johns-Hopkins, Southwest Research Institute, Goddard Space Flight Center

L'annonce coïncide avec un regain d'intérêt pour une mission américaine à destination de Vénus, considérée par certains planétologues comme « la planète oubliée ». Vénus est remarquablement similaire à la Terre, tant en taille qu'en poids, et bien qu'elle soit aujourd'hui un monde hostile digne des enfers, il n'est pas exclu qu'elle ait un jour été une planète tempérée recouverte d'océans comme la nôtre. Comprendre comment Vénus est devenue aussi inhospitalière est crucial pour évaluer la fréquence à laquelle on peut espérer trouver de réelles jumelles de la Terre.

« Nous sommes voisins d'une planète de la taille de la Terre qui ne lui ressemble en rien, pourquoi ? C'est une question capitale, » souligne Paul Byrne, planétologue à l'université d'État de Caroline du Nord. « Nous avons beaucoup à apprendre sur la formation, les caractéristiques et l'évolution des mondes aux dimensions terrestres. »

 

DOUBLE RATION

Le programme Discovery de la NASA finance des missions plus petites et moins onéreuses que celles des programmes New Frontiers et Flagship. Avec un lancement tous les 36 mois environ, les missions Discovery sont généralement plafonnées à 450 millions de dollars, sans tenir compte des lanceurs et des dépenses opérationnelles, alors que le plafond des expéditions New Frontiers est fixé à 850 millions de dollars. Quant au programme Flagship, auquel appartiennent notamment les rovers martiens Perseverance et Curiosity, les investissements peuvent atteindre plusieurs milliards de dollars. 

Actuellement, la NASA supervise deux missions Discovery. La sonde Lunar Reconnaissance Orbiter, lancée en 2009, a passé plus de dix ans à cartographier la surface de la Lune. Quant à l'atterrisseur InSight, il étudie les entrailles de Mars depuis le 26 novembre 2018.

L'année 2021 verra le lancement de deux autres missions : Lucy examinera divers astéroïdes et utilisera ces données pour en savoir plus sur les premières heures du système solaire, pendant que Psyche rendra visite à l'astéroïde du même nom, un colosse extrêmement riche en métal. À l'époque, les scientifiques avaient accueilli froidement la sélection de deux missions visant des astéroïdes, au détriment de plusieurs propositions à destination de Vénus, dont VERITAS et DAVINCI+.

 

UNE MISSION ATTENDUE

Ces missions vont enfin avoir la chance de percer le voile de ce monde voisin pour nous en révéler les secrets.

La dernière mission américaine pour Vénus, Magellan, a pris fin en 1994 lorsque la sonde a exécuté un plongeon programmé dans l'atmosphère de la planète. Depuis, la jumelle tourmentée de la Terre a été visitée par des sondes européennes et japonaises, sans oublier les télescopes terrestres régulièrement pointés par les scientifiques sur cette intrigante planète.

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    Malgré ces efforts, les mystères de Vénus n'ont fait que s'épaissir. Par exemple, un ensemble grandissant de preuves suggère l'existence d'un volcanisme à la surface de Vénus alors que la planète est dépourvue du type d'activité tectonique qui alimente les régions volcaniques les plus intenses de la Terre. Vient ensuite la détection controversée de phosphine gazeuse dans l'atmosphère de la planète qui pourrait être interprétée comme un signe de vie.

    Bientôt, peut-être d'ici 2030, la sonde DAVINCI+, acronyme de Deep Atmosphere Venus Investigation of Noble gases, Chemistry, and Imaging, Plus, mettra le cap sur Vénus. Elle descendra ensuite à travers l'atmosphère de la planète, 90 fois plus dense que celle de la Terre, pour recueillir des échantillons et transmettre des données qui aideront les scientifiques à comprendre son évolution et à déterminer si elle a un jour été recouverte d'océans.

    Pendant que DAVINCI+ étudiera le voile vénusien, la sonde VERITAS, pour Venus Emissivity, Radio Science, InSAR, Topography, and Spectroscopy, se chargera de cartographier la surface de la planète depuis son orbite. Ces images, ainsi que des informations détaillées sur les propriétés chimiques de la surface et sa topographie, permettront de reconstituer l'histoire géologique de Vénus et alors peut-être saurons-nous ce qui a conduit notre voisine à devenir la bouche des enfers qu'elle est aujourd'hui.

    « Toute ma carrière j'ai attendu ce moment, » a tweeté David Grinspoon du Planetary Science Institute, membre de l'équipe DAVINCI+. « Le lancement de la dernière mission américaine pour Vénus remonte à 1989, l'année où j'ai terminé mes études. Il y a tellement à apprendre sur le climat, l'histoire et la vie des mondes semblables à la Terre dans l'univers. »

     

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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