Des produits cosmétiques antiques découverts dans l'ancienne cité de Jéricho

Des cosmétiques antiques égyptiens et un tombeau royal ont été découverts dans l'une des plus vielles villes du monde. Une preuve s'il en est de la puissance de Jéricho et de ses liens étroits avec l'Égypte.

De Philippe Bohström
Publication 3 janv. 2018, 11:59 CET
Le squelette de 3 800 ans d’une jeune aristocrate parée de bijoux en bronze et de scarabées égyptiens est une nouvelle preuve des siècles de relations commerciales et culturelles entre Jéricho et l'Égypte.
PHOTOGRAPHIE DE Sapienza Universita di Roma

Bien avant que ses murailles ne s’effondrent suite à une attaque contée dans un célèbre passage biblique, Jéricho était une cité florissante et prospère située sur la rive ouest du Jourdain.

Une équipe d’archéologues italo-palestinienne a procédé à des fouilles sur le site de Tell es-Sultan, à 20 kilomètres au nord-est de l'actuelle ville de Jérusalem. Au cours de leur dernière session d’excavation, le groupe a fait une découverte extraordinaire dans une maison occupée il y a environ 5 000 ans : cinq coquillages nacrés posés les uns sur les autres, qui ne pouvaient alors provenir que du Nil.

Deux de ces coquillages renferment des résidus d’une substance foncée que les analyses en laboratoire ont identifié comme étant de l’oxyde de manganèse. Ce minéral sous forme de poudre est le composant de base du Kohl, jadis utilisé comme eye-liner pour marquer le regard.

Les chercheurs supposent que la poudre parvient du Sinaï, et qu'elle était extraite dans des mines de manganèse que les Égyptiens exploitaient.

Une vue aérienne de Tell es-Sultan (l’ancienne cité de Jéricho) dans l'actuelle Cisjordanie. La population a commencé à s’installer dans cette région il y a environ 12 000 ans.
PHOTOGRAPHIE DE Sapienza Universita di Roma

« La découverte révèle l’existence d’une relation commerciale étroite entre l’ancienne cité de Jéricho et l'Égypte », explique Lorenzo Nigro, archéologue à l’université de Rome La Sapienza, « elle démontre aussi l'utilisation des produits de beauté par l’élite locale de Jéricho. »

 

UNE OASIS ANCIENNE ET CONNECTÉE

La cité de Jéricho, actuelle Cisjordanie, s’est développée autour d’une terre fertile. Dès 10 500 av. J.-C., la population commence à se rassembler autour de cette oasis. Les hommes s'installent et commencent à pratiquer la culture de la terre et l'élevage.

Au début du troisième millénaire, la cité se fortifie, et se pare d’un palais édifié pour le gouverneur. Son approvisionnement constant en eau fraîche, ressource la plus précieuse de la région, contribue à la rapide prospérité de la ville et à la mise en place de commerces avec les autres territoires.

La dernière saison d’excavation a également mis en évidence des preuves de commerce avec l'Égypte dès 1 800 av. J.-C., période du Moyen Empire égyptien. 

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    Le scarabée égyptien retrouvé sur la poitrine de la jeune fille représente un lion accroupi et le soleil se levant sur une colline.
    PHOTOGRAPHIE DE Sapienza Universita di Roma

    Contrairement aux explorations précédentes menées dans l'enceinte de l'ancien palais, qui avaient permis la découverte de riches tombes, probablement royales, l’équipe a cette fois découvert une tombe bien différente dans les sous-sols du palais, signe d'un statut singulier.

    Cette chambre funéraire renferme deux corps, celui d'une fille de 9 ou 10 ans parée de bijoux et de pierres précieuses et celui d'une femme adulte, probablement une servante. Les os d’une gazelle et d’une chèvre sacrifiées et 6 poteries ont été aussi découverts dans la chambre funéraire.

    La petite carafe noire brunie retrouvée à côté du squelette de la jeune fille est sans doute le récipient le plus fascinant. Elle contenait un parfum ou un onguent et a été ainsi disposée pour couvrir les odeurs de putréfaction par arômes plus doux.

    Les ornements de la jeune aristocrate comprenaient deux boucles d’oreilles, d’un bracelet, d’une broche en bronze sur son épaule gauche qui servait sans doute à fermer sa robe, un collier de perles avec une parure de cornaline et une bague à sceau en bronze surmontée d'un scarabée et de signes protecteurs.

    Un second scarabée en pierre posé sur la poitrine de la jeune fille est marqué de hiéroglyphiques, prouvant une nouvelle fois l’influence de la culture égyptienne sur les élites de Jéricho.

    Les objets retrouvés dans la tombe de la jeune fille incluaient des bijoux en bronze, un collier en perles et une carafe brunie, contenant du parfum.
    PHOTOGRAPHIE DE Sapienza Universita di Roma

    Les deux signes sur le scarabée dj et mr sont distinctifs du titre d' « Administrateur du canal » qui remonte à l’Ancien Empire égyptien (2 572 - 2 150 av. J.-C.). Ce titre aurait été adopté par les gouverneurs de Jéricho trois siècles plus tard.

    On distingue deux autres signes sur le scarabée : un lion accroupi et le soleil se levant sur une colline représentant rw et ha, formant le nom Rwha ou Ruha. « Aucun nom personnel de ce type n’a été identifié chez les Égyptiens ou parmi la population locale de Canaan », selon Nigro, « Mais cela pourrait être l’ancien nom de Jéricho. » Si c’est le cas, cette jeune fille de sang royal aurait été enterrée avec un scarabée portant le titre de l’ancien gouverneur.

    Le déclin de Jéricho remonte à environ 1 550 av. J.-C., lorsqu’une attaque violente a réduit la cité en ruines. Jéricho n’a été reconstruite que plusieurs siècles plus tard. La violente destruction de la cité antique a pour résonance le récit biblique de Josué, qui raconte la destruction de Jéricho sur les commandements de Dieu.

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