Des milliers de pétroglyphes de l'âge du bronze ornent ce site antique

Les premiers occupants de la région de Tamgaly, au Kazakhstan, ont laissé leur empreinte sous la forme de 5 000 gravures rupestres, dont la plus ancienne a été datée du milieu de l'âge du bronze, il y a 3 500 ans.

De Antonio Ratti
Publication 9 oct. 2020, 16:16 CEST
Les longues cornes d'un animal dominent un pétroglyphe datant de l'âge du bronze à Tamgaly. Les traits ...

Les longues cornes d'un animal dominent un pétroglyphe datant de l'âge du bronze à Tamgaly. Les traits distinctifs sont typiques de l'art rupestre kazakh de cette période.

PHOTOGRAPHIE DE Marina Pissarova, Alamy, ACI

Des steppes verdoyantes s'étendent jusqu'à l'horizon dans l'extrême sud du Kazakhstan. Dans un paysage pris en étau entre la chaleur estivale et le froid hivernal, le site de Tamgaly, à environ 160 km au nord-ouest de l'ancienne capitale kazakhe, est un lieu privilégié, et ce depuis des millénaires. Les premiers occupants de la région ont laissé leur empreinte sous la forme de 5 000 gravures rupestres, dont la plus ancienne a été datée du milieu de l'âge du bronze, il y a 3 500 ans.

Ces pétroglyphes clairs se détachent par contraste de la roche sombre, révélant une myriade de dessins : des divinités du soleil dont des rayons couronnent la tête, des guerriers montés sur des chevaux, des chamans dansants non loin de troupeaux d'animaux.

Tous parlent des différents peuples qui ont vécu sur ces terres : leurs sujets retracent les changements dans la région, de l'âge du bronze à l'âge du fer jusqu'à la période médiévale, et même beaucoup plus tard : des bergers kazakhs du XXe siècle ont également laissé leur empreinte, représentant les plus récents occupants de la région avec des véhicules de l'ère soviétique.

 

LE "LIEU MARQUÉ"

Le site de Tamgaly est l'un des nombreux sites du Kazakhstan réputés pour leurs pétroglyphes. (Un autre site riche en pétroglyphes plus à l'est s'appelle Tamgaly-Tas). Tamgaly en kazakh signifie « lieu marqué » ou « lieu peint » et l'art rupestre de Tamgaly est connu des Kazakhs depuis de nombreux siècles.

En 1957, une équipe soviétique d'archéologues, dirigée par Anna Maksimova, a commencé à explorer et à documenter les œuvres d'art de la région. Ils ont entrepris cette tâche complexe en triant les milliers de gravures par groupes. Cette documentation et celles qui ont suivi - dont celles entreprises par Alexey Rogozhinsky au début des années 2000 - ont permis de dater et d'analyser les formes recensées et pour la plupart d'imaginer ce qu'elles représentaient pour les personnes qui les avaient réalisées.

Les travaux de Maksimova ont confirmé que Tamgaly avait été habitée, presque sans interruption, depuis environ 1500 avant J.-C., à l'âge du bronze moyen. L'abaissement des nappes phréatiques dans les steppes avait attiré davantage de nos ancêtres dans la région au cours de cette période, et les pâturages luxuriants autour de Tamgaly ont attiré des communautés d'éleveurs. Depuis la première enquête de Maksimova sur le site, d'autres colonies de l'âge du bronze et plusieurs complexes funéraires ont été identifiés.

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    Au cours des millénaires, les tremblements de terre ont fendu les roches de grès de Tamgaly et créé des surfaces planes et lisses. Les peuples de l'âge du bronze ont commencé à graver des pétroglyphes dans la roche douce et lisse à l'aide de pierres pointues ou d'instruments métalliques pour créer des images dans la patine sombre des parois rocheuses.

     

    CHAMANS ET DIEUX DU SOLEIL

    Les études archéologiques menées à Tamgaly divisent les 3 000 pétroglyphes les plus anciens en cinq groupes, regroupés principalement sur les pentes est du site.

    Le groupe I est celui situé le plus au nord, composé de 100 gravures soigneusement dissimulées représentant des êtres humains - peut-être des chamans, qui semblaient avoir accès au royaume des esprits - ainsi que des scènes de chasse et des représentations de la faune locale, notamment des loups. 

    Plus au sud se trouve le groupe II, composé de gravures plus visibles et comprenant des représentations de chamans, des représentations de rapports sexuels et d'animaux tels que des cerfs et des taureaux. 

    Le groupe III comprend 800 gravures, dont beaucoup représentent des personnes se livrant à des rituels liés aux animaux, notamment aux taureaux, aux chevaux et au bétail.

    Danseurs rituels et chameaux dans une gravure de l'âge du fer à Tamgaly.

    PHOTOGRAPHIE DE Keren Su, Alamy, ACI

    Le groupe IV, le seul groupe sur le côté ouest du site, est dominé par un panneau représentant des figures humaines dansant autour d'une figure féminine qui semble en train d'accoucher. Ce groupe est situé sur les pentes supérieures et est clairement visible des visiteurs.

     

    OMBRE ET LUMIÈRE 

    Le groupe V, le plus au sud, rassemble environ 1 000 pétroglyphes. Leur organisation apparaît à la fois plus complexe et plus délibérée. Une hiérarchie liée à l'altitude s'impose au spectateur : la partie inférieure est dominée par des représentations d'adorateurs et de chamans. Plus haut sur la pente apparaissent des personnages distinctifs que beaucoup pensent être des dieux du soleil. Ils ont une forme humaine et leurs têtes sont surmontées de rayons lumineux. Plus haut encore, un panneau montre d'autres divinités solaires sur un char. 

    Un taureau porte sur son dos une figure distincte « à tête de soleil », que l'on croit être un dieu du soleil. Leur interaction est unique à Tamgaly et peut avoir représenté les forces antagonistes de la lumière et des ténèbres.

    PHOTOGRAPHIE DE Keren Su, Alamy, ACI

    Une autre figure qui prédomine les gravures de l'âge du bronze est le taureau, qui, comme les dieux du soleil, peut être vus sur d'autres sites de pétroglyphes de la région. Seulement à Tamgaly, il y a des exemples de dieux du soleil interagissant avec les taureaux. Dans un pétroglyphe du groupe IV, une divinité solaire se tient sur un taureau. Les chercheurs ont interprété cette représentation comme une idée dualiste de l'obscurité du taureau noir en opposition à la lumière émise par les rayons émanant du soleil.

    D'autres interactions sont représentées dans les pétroglyphes de Tamgaly : les Hommes interagissent avec les animaux, comme les chevaux, en les chevauchant ou en les maîtrisant. Dans d'autres scènes, des figures de chamans atteignent le monde des esprits en revêtant des peaux d'animaux. On pense que la scène du groupe IV dans laquelle des gens dansent autour d'une femme en train d'accoucher représente une danse rituelle exécutée lors d'une naissance afin d'obtenir la protection des dieux.

     

    EXPRESSIONS ARTISTIQUES

    L'occupation de la région a commencé à décliner à la fin de l'âge du bronze, mais les chercheurs pensent que la région est restée habitée. Ceux qui y vivaient pendant cette période ont laissé leur empreinte. Plus de 2 000 pétroglyphes supplémentaires datent de cette période de transition. 

    Les archers encerclent un cheval à cornes. Les artistes de l'âge du bronze de Tamgaly distinguaient les chevaux des taureaux en représentant les premiers avec des oreilles droites.

    PHOTOGRAPHIE DE Tom Till, Alamy, ACI

    Parmi ces pétroglyphes datant du début de l'âge du fer (500-332 avant J.-C.), on trouve des représentations plus détaillées d'animaux, tels que des chameaux et des cerfs aux longs bois. Ces scènes ont été réalisées lorsque la région était dominée par les Saka, un peuple iranien des steppes. Les figures humaines sont plus simplement rendues. 

    Plus tard, la région a été colonisée par des tribus turques, et des gravures beaucoup plus tardives (700-1300 après J.-C.) représentent des scènes de la vie aristocratique turque : on voit notamment des chevaliers avec des bannières et des scènes de chasse. Beaucoup de personnages turcs sont superposés à des représentations plus anciennes.

    Les nombreuses périodes englobées par le site présentent un défi pour les chercheurs, qui ont encore bien des mystères à élucider. Les chercheurs Alexey Rogozhinsky et Renato Sala, qui ont mené des enquêtes approfondies après que Tamgaly a été classé site du patrimoine mondial de l'UNESCO en 2004, font des distinctions plus fines au sein des groupes de l'âge du bronze.

    Les deux chercheurs et d'autres spécialistes des merveilles de Tamgaly soulignent que les gravures ne peuvent pas être considérées comme des images isolées. Elles doivent être étudiées comme faisant partie d'un tout, dont la signification globale et la relation au paysage n'ont pas encore été pleinement décodées.

     

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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