Tecumseh : l’Amérindien qui se battit pour les terres autochtones et devint un héros populaire

Le chef Shawnee dévoua sa vie à protéger les terres de ses ancêtres. Après sa mort, il devint une figure légendaire autant pour les populations autochtones que pour les colons.

De Erin Blakemore
Publication 15 nov. 2022, 19:07 CET
Le chef Shawnee, Tecumseh, et le gouverneur américain du territoire de l’Indiana, William Henry Harrison, entrèrent ...

Le chef Shawnee, Tecumseh, et le gouverneur américain du territoire de l’Indiana, William Henry Harrison, entrèrent en confrontation lors de négociations portant sur la vente de terres tribales le 27 juillet 1811. Des mois plus tard, les forces armées de Harrison attaquaient les partisans de Tecumseh lors de la bataille de Tippecanoe.

Un guerrier. Un orateur. Un homme d’état. Voici qui était Tecumseh, membre de la tribu Shawnee, qui résista fermement à l’invasion des colons blancs sur les terres autochtones. Lors de sa courte vie, il fit de sa détermination un sujet d’histoire, de rumeurs et de légende.

L'on raconte que Tecumseh naquit dans l'actuel Ohio en 1768 lors d’une pluie de météorites, raison pour laquelle il aurait été baptisé « Étoile filante » ou « Jaguar céleste ». Ce nom préfigurait peut-être sa vie d'influence, qui l'ammena à franchir la jeune frontière américaine à de nombreuses reprises et à combattre lors de la guerre anglo-américaine de 1812, lui forgeant ainsi un héritage encore contesté aujourd'hui, entre héroïsme et défiance.

(À lire : L'histoire de ces cinq dirigeants mêle réalité et fiction)

 

LA MENACE DES COLONS BLANCS POUR LES SHAWNEES

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Fils d’un chef Shawnee, Tecumseh fut influencé pendant son adolescence par les diverses tentatives visant à constituer une confédération panindienne. Celle-ci avait pour but d'unifier les peuples autochtones afin qu'ils puissent défendre leurs terres ancestrales contre les colons blancs.

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Grâce à ses qualités d’homme d’état et à ses talents de négociateur, Tecumseh finit par constituer sa propre confédération autochtone. On le voit ici porter une médaille et un uniforme britanniques : lors de la guerre anglo-américaine de 1812, Tecumseh et ses partisans s’allièrent aux Britanniques qui promirent de leur restituer leurs terres.

Dès son plus jeune âge, Tecumseh se retrouva mêlé aux conflits entre les peuples autochtones et les colons blancs qui souhaitaient s’emparer de leurs terres. Son père, le chef Shawnee Puckshinwa, est mort au combat en 1774 lors de la guerre de Dunmore qui opposa les peuples Shawnee et Mingo aux colons blancs de la colonie de Virginie.

Même s’ils n’étaient que quelques milliers, les Shawnees étaient connus pour être de féroces guerriers, prêts à tout pour protéger leurs terres et leurs traditions. La colonisation britannique menaçait leurs terres. Ainsi, lorsque les colons américains se détachèrent de la Grande-Bretagne lors de la révolution américaine, les Shawnees s’allièrent aux troupes britanniques dans l’optique de parer la menace de cette nation en devenir qui cherchait à s’installer le long de la rivière Ohio.

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Tenskwatawa, le frère de Tecumseh, était surnommé « Le Prophète » par les Shawnees. Ensemble, les deux frères fondèrent une alliance panindienne et établirent un campement appelé Prophetstown.

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 Même si Tecumseh et son frère partageaient les mêmes idées, l’historien Peter Cozzens souligne qu’ils ont souvent été représentés en désaccord, ce qui alimenta l'image de « noble sauvage » de Tecumseh et celle de « charlatan délirant » de son frère.

Cependant, la défaite de la Grande-Bretagne donna lieu à un traité qui attribua aux États-Unis, nouvellement constitués, les terres situées au nord de la rivière Ohio, y compris le territoire des Shawnees.

Les représentants de plusieurs tribus dont les Delawares, les Creeks, les Mohawks, les Ottawas et d'autres se réunirent en 1783 pour créer une confédération visant à repousser les futures intrusions sur les terres autochtones. Ces tribus formèrent la Confédération de l’Ouest, promettant de ne céder leurs terres qu'avec l'accord unanime du groupe. 

 

TECUMSEH À LA TÊTE DE L’ALLIANCE

Cette alliance panindienne fit la notoriété du jeune Tecumseh, qui se distinguait lors des raids contre les colons qui essayaient de pénétrer le territoire de la confédération. Cependant, si les Amérindiens parvinrent d'abord à repousser les colons, les États-Unis eurent vite fait de renforcer leur puissance miliaire et de porter un coup décisif à la confédération lors de la bataille de Fallen Timbers en 1794.

La Confédération de l’Ouest s’effondra mais Tecumseh, devenu un guerrier accompli, resta convaincu de la nécessité d’une alliance panindienne. Il se tourna vers son frère Tenskwatawa pour lui demander de l’aide.

On raconte que Tecumseh empêcha ses hommes d'attaquer les prisonniers blancs capturés lors du siège de Fort Meigs dans l’Ohio lors de la guerre anglo-américaine de 1812, ce qui alimenta le mythe du « noble sauvage ».

Après avoir consommé de l’alcool, Tenskwatawa, surnommé « Le Prophète », eut une vision dans laquelle des peuples autochtones dirigeaient leur territoire selon leurs propres traditions. Tecumseh s’appuya sur l’influence grandissante de son frère et, en 1808, les deux hommes établirent Prophetstown à la confluence des rivières Wabash et Tippecanoe, dans l’actuel Indiana.

Tecumseh rallia de nombreux autochtones à sa cause. Il se créa ainsi un groupe de partisans à Prophetstown, désireux de créer une alliance panindienne. Ce faisant, il se fit un farouche ennemi, William Henry Harrison, gouverneur du territoire de l’Indiana, ce qui posa les jalons d’une bataille historique.

 

LA BATAILLE DE TIPPECANOE

En 1809, Harrison réussi à convaincre la plupart des tribus de la région de signer un traité leur imposant de céder leurs 12 000 km2 de terres en échange de subventions. Tecumseh, qui vivait au nord de la zone concernée par le traité, décria le Traité de Fort Wayne et s’en servit pour rallier d’autres Amérindiens à sa cause.

 Illustration des derniers efforts des alliés de Tecumseh lors de la bataille de Tippecanoe, près de la ville de Lafayette, en Indiana, en 1811.

Cependant, alors que Tecumsheh était parti rendre visite à d'autres nations pour les convaincre de le soutenir en 1809, Harrison attaqua le campement de Prophetstown lors de ce qui fut appelé la bataille de Tippecanoe. Les habitants de Prophetstown opposèrent d’abord une résistance farouche aux assaillants mais les troupes américaines gagnèrent in extremis. Elles réduisirent le campement en cendres après que ses habitants, désabusés par les piètres qualités de meneur de Tenskwatawa, eurent pris la fuite.

Ce fut une victoire symbolique pour Harrison, qui fut élu président des États-Unis en 1840 avec le slogan « Tippecanoe et Tyler aussi », faisant référence à son accolyte, John Tyler. La bataille de Tippecanoe renversa la Confédération de Prophetstown menée par Tecumseh et renforça la rancœur des autochtones vis-à-vis des Américains avides de terres.

 

TECUMSEH ET LA GUERRE ANGLO-AMÉRICAINE DE 1812

Tecumseh était un négociateur de talent, qui convainquit non seulement d'autres peuples autochtones mais aussi les Anglais, qui détenaient encore des terres près de la région des Grands Lacs et qui étaient en conflit avec les États-Unis à propos d'affaires commerciales, de leur présence navale et de leur désir d’expansion territoriale. Tippecanoe avait bousculé les alliés de Tecumseh. Pourtant, quand les États-Unis déclarèrent la guerre au Royaume-Uni en 1812, les Amérindiens rejoignirent les forces britanniques, qui avaient promis de leur laisser leurs terres ancestrales.

Tecumseh trouva la mort lors de la bataille de la rivière Thames le 5 octobre 1813, en Ontario. Cette victoire décisive des Américains démoralisa les guerriers autochtones. Ils rendirent les armes alors que le vent tournait en faveur des Américains lors de la guerre anglo-américaine de 1812.

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Personne ne sait qui a véritablement tiré sur Tecumseh lors de la bataille de la rivière Thames mais plusieurs hommes ont revendiqué sa mort. Parmi eux se trouve le Colonel Richard M. Johnson, qui servit après sous les ordres du président Martin Van Buren en tant que vice président des États-Unis.

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Gravure sur bois de 1818 représentant Tecumseh. Après sa mort, le chef Shawnee devint un héros populaire pour les peoples autochtones nord-américains ainsi que pour les Blancs américains.

Tecumseh devint rapidement un allié respecté de l’armée britannique. En août 1812, il sortit victorieux de la prise de Détroit, dans l’actuel Michigan. La défaite américaine fut cinglante, mais éphémère. En 1813, les forces américaines obligèrent les Britanniques à se replier au Canada. À la fin de l’année, ils abandonnaient Tecumseh en plein milieu de la bataille de la rivière Thames, le 5 octobre 1813.

Alors que les troupes britanniques battaient en retraite, Tecumseh et ses alliés autochtones firent front mais dans l'échaufourrée qui suivit, Tecumseh se fit tirer dessus et succomba. Apprenant la mort de leur grand chef, les quelques forces tribales qui restaient perdirent courage et baissèrent les armes. Les Américains, s’appuyant sur leur victoire à la rivière Thames, récupérèrent alors le contrôle de leurs frontières. Le corps de Tecumseh disparut et ne fut jamais retrouvé.

 

L’HÉRITAGE DE TECUMSEH

Il emporta dans sa tombe les espoirs d’un mouvement panindien qui conserverait la mainmise sur ses terres et ses traditions. En quelques décennies, les peuples autochtones installés à l’est du Mississippi furent expulsés de leurs terres par divers traités et par la Piste des larmes.

La mort de Tecumseh lança la carrière politique de l’une des nombreuses personnes qui avaient affirmé l'avoir tué : le Colonel Richard M. Johnson, qui avait dirirgé l’armée américaine lors de la bataille de la rivière Thames. Johnson devint plus tard vice-président des États-Unis, remportant l’élection avec le slogan « Rumpsey Dumpsey, Rumpsey Dumpsey, le Colonel Johnson a tué Tecumseh ».

Tecumseh s’opposa à l’invasion des personnes blanches durant toute sa vie. Après sa mort, il devint un héros populaire pour les peoples autochtones nord-américains ainsi que pour les natifs américains qui débattirent des circonstances de sa mort, la commémorèrent et se l’approprièrent dans des œuvres d’art dramatiques. L’homme qui avait rêvé d’une union des peuples autochtones inspira de nombreux chants, poèmes et œuvres d’art, qui, à leur tour, alimentèrent le mythe du « noble sauvage »,  dont le décès héroïque ouvrit la voie à la colonisation et à la Destinée manifeste.

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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