Égypte : un temple dédié à Zeus-Kasios a été sorti de terre

Un ancien temple érigé en l’honneur de Zeus-Kasios a été exhumé, près de trente ans après sa première découverte. Sur le site antique de Péluse, les archéologues ont pu confirmer que sa reconstruction avait été voulue par l’empereur Hadrien.

De Margot Hinry
Publication 2 juin 2022, 14:39 CEST
La forteresse romaine de Péluse, vue en direction de l'ouest. La zone fouillée par les Égyptiens ...

La forteresse romaine de Péluse, vue en direction de l'ouest. La zone fouillée par les Égyptiens avec le temple de Zeus-Kasios se trouve juste dans l'angle supérieur gauche de la photo, hors les murs. Photo capturée pour D. Valbelle (Mission franco-égyptienne de Tell el-Herr), Ch. Bonnet et M. Abd el-Maksoud (Mission Farama zone sud-est de la forteresse).

PHOTOGRAPHIE DE J.-F. Gout

Au début du 20e siècle, l’égyptologue français Jean Clédat s’attelait à fouiller la région du Sinaï pour y découvrir des traces d’empreintes grecques. Son travail de l’époque mentionne et prouve la présence des Grecs à travers plusieurs inscriptions. Même si le temple est connu par les experts, il n’est pas encore sorti de terre.

Il y a près de trente ans, l’archéologue et actuel professeur à l’université Sorbonne Paris Nord Jean-Yves Carrez-Maratray était sur place. Avec d'autres archéologues et le directeur de l’époque des sites archéologiques du Sinaï, ils découvrent une « énorme forteresse qui fait 400 mètres de long sur 200 mètres de large » ainsi que « plusieurs vestiges de l’époque byzantine ». Déjà, l’archéologue souhaitait déterrer le temple de Zeus, dont l’existence était sous-entendue par les travaux de Jean Clédat, mais les conditions n'étaient pas réunies. « Le site est gigantesque, il n’est fouillé qu’à 10%. Les 90 % restants sont, pour le moment, du sable et des graviers ».

Aujourd’hui, les archéologues égyptiens ont achevé de mettre ce temple au jour. Quelques images de la fouille ont été diffusées par les autorités et permettent à Jean-Yves Carrez-Maratray d’apporter son œil d’expert. On observe notamment des inscriptions qui permettent aux archéologues d’affirmer que ce temple aurait été reconstruit par l’empereur Hadrien.

Jean-Yves Carrez-Maratray parvient à traduire les quelques inscriptions visibles sur les blocs de granit qui ont été dégagées par l’équipe égyptienne. « C’est écrit "depuis les fondations" et en-dessous, on peut lire "Égypte". Ça veut dire que quelqu’un a refait le bâtiment depuis ses fondations, quand Mr X était préfet d’Égypte. À mon avis, il ne s’agit pas d’un texte complet, mais d’un morceau d’une inscription monumentale qui était sur plusieurs blocs ».

L’archéologue connaît particulièrement bien la région du Sinaï puisqu’il a consacré sa thèse au site antique de Péluse. On ne sait pas exactement quand a été fondée cette ville, mais Jean-Yves Carrez-Maratray confirme qu’il s’agit d’un site très ancien, qui aurait été habité environ de -500 avant notre ère jusqu’au Moyen-Âge.

« On est à la frontière entre l’Égypte, le Sinaï et le Liban. Zeus-Kasios est un dieu protecteur des marins. On retrouve son nom dans divers endroits de la Méditerranée. […] Comme il était souverain, les Grecs disaient Zeus, ce qui veut dire le grand Dieu. […] La population qui y vivait était Égyptienne mais il y avait aussi des Libanais, des Arabes, des Grecs. Leur dieu, Zeus-Kasios, est sympathique pour tout le monde puisqu’il protège les navigateurs » affirme le professeur.

L’empereur Hadrien était un grand voyageur. D’après ses mémoires, « il est allé partout. Là où il passait, comme il avait de l’argent et afin de manifester la bienveillance de l’empereur romain, il faisait reconstruire des bâtiments » indique Jean-Yves Carrez-Maratray.

Le site antique de Péluse regorge encore de nombreux mystères archéologiques. « Il fait 1 kilomètre de long sur 300 mètres de large, il est couvert de ruines d’époque romaine et byzantine. Il faut dégager des kilos de gravas pour descendre petit à petit et arriver au niveau de l’empereur romain Hadrien, par exemple. Si l’on continue de descendre, on arrive au temps des Grecs, si l’on continue encore de descendre, il y a de l’eau, alors on n’en sait pas plus. On connaît très bien Péluse aux époques récentes mais pas très bien aux époques anciennes ».

Selon sa propre expérience, « lorsque l’on creuse à plus de 3 mètres de profondeur, on se retrouve avec les pieds dans l’eau, au milieu de notre trou de fouille ». Situé à 1 kilomètre de la mer Méditerranée, le site antique ne permet pas encore à ce jour de creuser profondément dans le sol pour y découvrir l’histoire plus ancienne.

Tel El-Farama, de son nom archéologique en arabe moderne, se traduit littéralement par la ville de la boue, la ville boueuse. « Pelos en grec, cela signifie bouillasse » précise le professeur.

Cette ancienne cité de la basse Égypte antique appartient au Sinaï ; de par sa localisation « elle est à l’est du canal de Suez. Quand Ferdinand de Lesseps a fait creuser le canal de Suez, il a laissé à l’est un petit bout du delta égyptien. Il y avait le port le plus à l’est de Péluse, les bateaux descendaient à l’époque depuis le Caire, sur une branche du Nil, et ils arrivaient à la ville de Péluse. Ensuite, ils prenaient un bateau pour le Proche-Orient, pour longer le Sinaï, aller vers Gaza ou bien vers Beyrouth ».

« Cette ville, est-ce qu’elle existait avant 500 av J.-C. ? On ne le sait pas. Mais on sait qu’elle n’existait pas au temps des grands pharaons » conclut le spécialiste.

Péluse reste, encore à ce jour, un site archéologique d’une grande richesse qui promet aux archéologues de belles découvertes à travers le temps.

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