Mystère archéologique : les enfants sacrifiés des Chimù

En 2011, deux sites archéologiques ont été découverts au Pérou, témoignant d’un effroyable rituel. En tout, le peuple des Chimú immola 269 garçons et filles, lors d’un sacrifice rituel que les archéologues peinent à comprendre.

De Rédaction National Geographic
Dans cette scène reconstituée, un bourreau chimú attend une jeune victime du sacrifice collectif, à Huanchaquito. ...
Dans cette scène reconstituée, un bourreau chimú attend une jeune victime du sacrifice collectif, à Huanchaquito. Les archéologues n’ont trouvé aucun indice que les enfants étaient attachés. Toutefois, ceux-ci recevaient peut-être de la chicha (bière de maïs) pour les rendre apathiques et dociles durant le rituel.
PHOTOGRAPHIE DE ILLUSTRATION : SAMSON GOETZE. MÓNICA SERRANO, ÉQUIPE DU NGM ; PATRICIA HEALY. SOURCES : GABRIEL PRIETO, UNIVERSITÉ NATIONALE DE TRUJILLO ; JOHN W. VERANO, UNIVERSITÉ TULANE ; NICOLAS GOEPFERT, CNRS ; ANNE POLLARD ROWE

Des textes anciens, dont la Bible hébraïque, attestent la pratique de sacrifices d’enfants. Toutefois, les archéologues avaient peu de preuves solides de ces massacres. Jusqu’à la découverte de Huanchaquito, dans l’ouest du Pérou. Le sud de la ville de Huanchaco abrite les ruines de Chanchàn, l’ancienne capitale des Chimú, une importante civilisation précolombienne ayant vécu il y a plus de 500 ans.

En 2011, le propriétaire d’une pizzeria de Huanchaquito, un quartier de la ville, a informé l’archéologue Gabriel Prieto, natif de la région, que ses enfants – et des chiens du voisinage – avaient trouvé des ossements humains émergeant du sable, dans un terrain vague. Après avoir exhumé les restes de plusieurs enfants drapés dans des linceuls, datés par l’analyse au radiocarbone entre 1400 et 1450 de notre ère, l’archéologue a réalisé qu’il était tombé sur une découverte importante.

Les tombes n’étaient pas typiques des Chimú. Les enfants étaient enterrés dans des positions inhabituelles – allongés sur le dos ou couchés sur le côté, au lieu de se tenir assis bien droit, comme c’était la coutume. Ils n’étaient pas non plus entourés d’ornements, de poteries ou d’autres artefacts, pourtant courants dans les inhumations des Chimú.

En revanche, beaucoup d’enfants avaient été ensevelis à côté de jeunes lamas et, peut-être, d’alpagas. Or ces animaux figuraient parmi les biens les plus précieux des Chimú. Ils étaient une source vitale de nourriture et de fibres textiles, et servaient de moyen de transport.

Surtout, nombre d’enfants et d’animaux portaient des marques d’incisions sur le sternum et les côtes. Pour analyser ces éléments, Gabriel Prieto a fait appel à John Verano, anthropobiologiste et expert médico-légal à l’université Tulane en Louisiane. Après examen des restes à Huanchaquito, Verano a confirmé que les enfants et les animaux avaient été délibérément tués de la même façon – d’une entaille horizontale en travers du sternum, sans doute suivie par l’extraction du cœur.

Suite à cette série d’exhumations, le site de Pama La Cruz, situé un peu plus à l’ouest de la ville, a également été découvert. En tout, les deux lieux archéologiques comptent 269 squelettes d’enfants, âgés de 5 à 14 ans, 3 d’adultes et 466 de lamas. Si l’on savait la pratique courante chez les Aztèques, ce type de sacrifice était jusque-là inconnu chez les Chimú.

Qu’est-ce qui a bien pu pousser ce peuple à massacrer sa jeunesse ? Les historiens pensent que des pluies destructrices, sans doute dues à El Niño et la menace d’une invasion inca pourraient avoir décidé les chefs chimú à organiser des sacrifices désespérés à ses dieux. Mais ces rituels effroyables restent encore largement incompris des spécialistes.

Extraits de l'article « Les enfants sacrifiés » de Kristine Romey, dans le numéro de février 2019 du magazine National Geographic.

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