Le merveilleux spectacle des lucioles des Great Smoky Mountains

Des milliers de lucioles offrent un ballet lumineux unique en son genre au sein du parc national de Great Smoky Mountains.

De Amy McKeever
Publication 26 avr. 2021, 16:42 CEST
Syncronous Fireflies (Photinus carolinus) illuminate the lush forests Smoky Mountains National Park Tennesse USA July

Les lucioles Photinus carolinus illuminent les forêts du parc national de Great Smoky Mountains.

PHOTOGRAPHIE DE Nature Picture Library, Alamy Stock Photo

Chaque printemps, les lumières scintillantes de milliers de lucioles inondent les forêts de la région d’Elkmont dans le Tennessee, situées dans le parc national de Great Smoky Mountains. Ensemble, ces lucioles affichent leurs éclats dans une danse aux allures de ballet synchronisé avant que la scène ne replonge dans l’obscurité. Elles répètent ce schéma pendant des heures en quête d’un partenaire.

« Observer ces lucioles pour la première fois, c’est magique », déclare Orit Peleg, physicienne à l’université du Colorado-Boulder qui étudie cette espèce. « La forêt tout entière s’illumine à l’unisson. »

Les Photinus carolinus sont une des espèces sur les dix-neuf qui habitent les forêts du parc. Toutefois, elles sont celles qui attirent le plus l’attention. Chaque année, le National Park Service organise un évènement sur huit jours lorsque la saison reproductrice bat son plein. Cette période s’étend généralement sur deux semaines, de fin mai à début juin. Le festival connaît un succès tel que le parc a mis en place une loterie afin de remporter des places. L’année dernière, l’évènement a été annulé à cause de la pandémie. Sa tenue n’est pas encore annoncée pour cette année.

Les Photinus carolinus se servent de leur éclat unique pour trouver un partenaire, un comportement qui s’étend généralement sur deux semaines, de fin mai à début juin.

PHOTOGRAPHIE DE Philip Silver, Alamy Stock Photo

 

UN SPECTACLE DE LUMIÈRE NATUREL

En 1997, lorsque l’entomologiste Becky Nichols a commencé à travailler au sein du parc national, ces lucioles étaient plutôt considérées comme une curiosité locale que comme une attraction touristique. Pourtant, avec le développement des réseaux sociaux, cet étrange comportement a gagné en popularité. Aujourd'hui, des milliers de personnes parcourent les sentiers du parc de nuit, contemplant le spectacle dans un silence émerveillé.

C’est parce qu’il ne s’agit pas d’une luciole ordinaire, comme celles qui illuminent les jardins du monde entier. Sur plus de deux-mille espèces de lucioles, seule une douzaine peuvent synchroniser leurs éclats, dont Photinus carolinus, qui peuple le parc national.

Ces insectes luminescents partagent la même biologie de base que d’autres espèces. Les lucioles, de la famille des coléoptères, possèdent des organes sous leur abdomen qui associent l’oxygène avec une substance chimique appelée luciférine. Ainsi, elles peuvent produire une lueur jaune, verte ou même bleue. Cependant, le scintillement de chaque espèce est différent. Il joue un rôle majeur dans la parade nuptiale des lucioles en aidant les individus à reconnaître leur partenaire.

Le clignotement synchronisé des Photinus carolinus peut paraître décousu à première vue, signale Mme Nichols. Contrairement aux autres espèces synchrones qui affichent leur éclat en continu, les Photinus carolinus mâles génèrent quatre à huit éclats rapides avant de s’éteindre tous en même temps. Plus les mâles rejoignent cette nuée, plus le scintillement se fait rapide et synchrone.

« Ensuite, leurs [scintillements] ressemblent à des pulsations », explique Becky Nichols. « Ils ressemblent à une vague qui remonte la colline. C’est là que ça devient vraiment magique. »

Une fois que la colonie comporte assez de mâles scintillants, l’accouplement peut commencer. Au cours des brèves périodes d’obscurité entre les éclats, les femelles leur répondent depuis le sol. Grâce à deux clignotements rapides, elles font savoir aux mâles où les trouver.

Selon Mme Peleg, personne ne sait vraiment pourquoi ces lucioles agissent ainsi. La synchronisation des scintillements des mâles pourrait les aider à amplifier leur signal afin d’atteindre les femelles les plus éloignées. Il se pourrait aussi qu’elle serve à se protéger des lucioles prédatrices qui imitent les clignotements des autres espèces pour attirer leur proie. La thèse la plus probable serait que « les colonies seraient plus efficaces en collectivité ».

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    L’intervalle pour observer le spectacle de ces lucioles est toutefois assez bref. La période de reproduction de Photinus carolinus ne dure généralement que deux semaines vers le début de l’été, lorsque les températures dans la forêt dépassent les 50 °C.

     

    POURQUOI IL FAUT LES PROTÉGER

    Bien que ces lucioles bénéficient d’une popularité croissante grâce au tourisme, notamment dans des lieux comme le parc national des Great Smoky Mountains, leurs populations sont en déclin dans le monde entier. De fait, le National Park Service s’est vu obligé de mettre en place des mesures pour le protéger.

    « C’est la porte d’entrée vers un [monde] miraculeux », assure Sara Lewis, professeure à l’université Tufts. Elle a fait partie d’un groupe de travail international chargé d’établir des directives relatives à la conservation de ces lucioles. « Mais le côté négatif, c’est que des milliers de personnes partent se promener dans la forêt lors de cette saison particulière. »

    Pour les lucioles, les efforts de reproduction et de conservation sont étroitement liés. Elles cessent de scintiller lorsqu’elles sont exposées à une forte pollution lumineuse. Par conséquent, en plus de perturber leur reproduction, cette lumière peut entraîner une diminution du nombre de lucioles dans les générations futures.

    Parallèlement, les foules envahissantes peuvent provoquer des dommages conséquents sur ces insectes. Lorsque les promeneurs flânent ou installent des chaises sur l’habitat des lucioles, ils peuvent tuer les femelles, qui n’ont pas la capacité de voler, ou même écraser les larves qui se développent sur le sol de la forêt.

    « C’est une expérience incroyable, alors vous avez envie de vous promener dans la forêt, là où peu de touristes vont, et de vous allonger », déclare Mme Lewis. « Mais vous vous allongez sur les larves des lucioles. »

    L’entomologiste Becky Nichols recommande de s’installer dans des zones dégagées le long du sentier pour mieux voir ces insectes luminescents.

    PHOTOGRAPHIE DE Nature Picture Library, Alamy Stock Photo

    Pour éliminer toute pollution lumineuse du parking, le parc fait circuler des chariots entre le Sugarlands Visitor Center et Elkmont. Les gagnants de la loterie remportent également des lampes torches à lumière rouge. Beck Nichols explique que les lucioles ne réagissent pas autant à cette lumière. La loterie aide également le parc à contrôler son nombre de visiteurs chaque nuit.

     

    COMMENT ASSISTER À CE SPECTACLE ?

    Que se passe-t-il si vous êtes assez chanceux pour remporter cette loterie ? Après avoir emprunté un chariot jusqu’au point de vue d’Elkmont, préparez-vous à respecter les consignes pour protéger les lucioles. Restez sur les sentiers balisés et éteignez votre téléphone, à défaut enveloppez-le dans du cellophane rouge pour couvrir sa lumière.

    Mme Nichols recommande de s’installer dans des zones dégagées le long du sentier pour mieux voir ces insectes luminescents. Les employés du parc pourront également vous indiquer les meilleurs lieux où observer ces lucioles. Ils pourront également vous en dire plus sur le phénomène que vous observez.

    Les Photinus carolinus commencent généralement à sortir aux alentours de 21 h 30. « Elles sont réglées comme une horloge », assure Mme Nichols. En deux heures, la colonie aura sûrement atteint sa taille maximale.

    Si vous ne parvenez pas à obtenir de tickets, il reste encore de l’espoir. Becky Nichols vous suggère de vous rendre au parc quelques jours avant ou après le festival car il se pourrait que la colonie poursuive son spectacle. Vous pouvez également partir à leur recherche aux alentours des petites clairières du parc, là où le sol est jonché de feuilles humides, propices au développement des chrysalides.

    « Il faut vraiment éteindre toutes les lumières et observer », conseille Mme Nichols. « En faisant de la sorte, nous avons découvert que les lucioles étaient présentes dans certains endroits du parc que l’on ne soupçonnait pas. »

    COMPRENDRE : La pollution lumineuse

    Mme Lewis espère qu’en plus d’être émerveillés par ces lucioles, les visiteurs auront envie de participer à la conservation environnementale.

    « Ne repartez pas comme ça. Réfléchissez. Voulez-vous vivre dans un monde où vos petits-enfants ne pourront jamais observer un tel [spectacle] ? Ou pensez-vous que cette expérience mérite d’être protégée ? »

     

    COMMENT VENIR EN AIDE À NOTRE PLANÈTE ?

    Tout le monde a un rôle à jouer pour la conservation des lucioles, jusque dans son jardin. Si votre région abrite des lucioles, quelle que soit l’espèce, vous pouvez contacter les autorités locales afin de créer un sanctuaire pour ces insectes. Évitez d’utiliser des pesticides. Ils peuvent tuer les chrysalides qui se développent sous terre. Vous pouvez également faire des dons ou devenir bénévole pour des associations.

     

    Amy McKeever est une auteure basée à Washington, D.C.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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