Ce portrait de dinosaure serait le plus précis existant à ce jour

En éclairant au laser des os datant du Jurassique supérieur, une équipe de chercheurs est parvenue à affiner le portrait du célèbre dinosaure à plumes Anchiornis.

De Jason Bittel
Publication 15 oct. 2021, 09:40 CEST
03-late-jurrasic-anchiornis

Une technique d'imagerie laser a permis de révéler de nouveaux détails sur l'aile du dinosaure Achiornis, notamment la présence de peau repliée devant le coude et derrière le poignet.

PHOTOGRAPHIE DE Wang XL, Pittman M et al. 2017

Imaginez un croisement entre un pic à tête rouge et un petit vélociraptor et vous devriez obtenir une image mentale ressemblant à Anchiornis, un dinosaure haut de 30 centimètres qui nous vient du Jurassique supérieur.

C'est la conclusion à laquelle des scientifiques sont arrivés après avoir examiné neuf spécimens de cet animal disparu, en éclairant au laser ses tissus mous auparavant invisibles pour se faire une meilleure idée des véritables dimensions du dinosaure.

Selon leur étude, Anchiornis ressemblait fortement à un oiseau, avec de fines pattes et de longs avant-bras reliés par une couche de peau appelée patagium. Il avait également une queue élancée et des écailles sur les pattes rappelant celles des poules.

La découverte, récemment présentée dans la revue Nature Communications, renforce l'idée selon laquelle une variété de dinosaures disposait déjà de caractéristiques aviaires il y a 160 millions d'années.

« Anchiornis a d'abord été présenté comme un oiseau, » déclare le coauteur de l'étude, Michael Pittman, paléontologue à l'université de Hong Kong. « Mais depuis, différents auteurs ont apporté des preuves suggérant qu'il était soit un oiseau primitif, soit un dinosaure troodontidé ressemblant à un oiseau. »

Pour Pittman, « Anchiornis devrait être qualifié de parave basal, un membre primitif du groupe des dinosaures qui comprend les oiseaux ainsi que les dinosaures ressemblant aux oiseaux et partageant leur plus proche ancêtre commun avec les oiseaux. »

 

L'ÉPREUVE DU TEMPS

Si les créatures disparues depuis des millions d'années sont si difficiles à étudier, c'est parce qu'il n'en reste généralement pas grand-chose lorsque nous les retrouvons. Les squelettes analysés par les paléontologues ne sont presque jamais complets et même les spécimens les mieux préservés souffrent généralement d'un manque cruel de contexte de vie.

Néanmoins, même si Anchiornis ne jouit pas de la réputation des Tyrannosaurus rex, Stegosaurus ou autres Triceratops, nous en savons probablement plus sur la véritable apparence de cette demi-portion que sur tout autre dinosaure.

Cette illustration d'Anchiornis intègre les derniers détails relatifs à son apparence apportés par différentes études scientifiques.

PHOTOGRAPHIE DE Julius T Csotonyi

Les premiers fossiles d'Anchiornis ont été mis au jour dans le nord-est de la Chine en 2009. Grâce aux plus de 200 spécimens découverts depuis, nous savons désormais que les créatures de ce genre possédaient quatre ailes et une tonne de plumes. En 2010, une analyse révolutionnaire des mélanosomes porteurs de pigments contenus dans ces plumes a révélé qu'Anchiornis arborait une robe noir et gris parsemée de taches blanches et rehaussée d'une crête rouge.

Dans la nouvelle étude, Pittman et ses coauteurs ont pu extraire encore plus de détails des tissus cachés d'Anchiornis. Bien souvent, les tissus mous comme les organes, la peau et les muscles ne survivent pas à leur long voyage dans le temps. Il arrive toutefois que ces tissus soient encore présents dans le fossile, mais invisibles à l'œil nu.

L'équipe a eu recours à une technique appelée fluorescence induite par laser, qui consiste à balayer de puissants rayons laser un échantillon de fossile placé dans une pièce sombre, puis à enregistrer les longueurs d'onde réfléchies. Cette méthode permet de révéler des caractéristiques et des niveaux de détails invisibles dans d'autres conditions.

La fluorescence induite par laser « fait partie d'une vague d'outils émergents qui nous aident à comprendre l'évolution des tissus mous sur des lignées éteintes, » indique John Hutchinson, professeur de biomécanique de l'évolution au Royal Veterinary College de l'université de Londres.

En tant que spécialiste du mouvement des dinosaures, Hutchinson indique avoir grandement apprécié la « belle anatomie » et la « remarquable préservation » qui caractérisent cette étude.

« Je pense que leurs travaux complètent notre compréhension de la morphologie ; ils confirment de précédentes conclusions et peaufinent nos estimations de la forme des bras, » développe-t-il.

les plus populaires

    voir plus

    Dans ce schéma, les couleurs montrent les parties d'Anchiornis reconstruites à l'aide de l'imagerie laser.

    PHOTOGRAPHIE DE Wang XL, Pittman M et al. 2017

    Cela dit, Hutchinson souhaiterait tout de même tester la technique laser sur des oiseaux plus modernes et des fossiles de crocodiles pour vérifier sa capacité à révéler des formes en trois dimensions sur des spécimens réduits à deux dimensions par des millions d'années de pression.

    Même si Pittman reconnaît que tous les fossiles ne disposent pas de la minéralogie adaptée pour réagir à la lumière laser, il soutient que la technique d'imagerie pourrait profiter à un grand nombre de fossiles.

    « Nous pensons que la technique devrait avoir une place de choix dans la boîte à outils de tout paléontologue, car elle peut facilement étendre les données anatomiques disponibles dans un fossile sans l'endommager » explique Pittman.

     

    UN DINOSAURE VOLANT ?

    Outre l'importance des questions de taille, de forme et de couleur, un autre mystère entoure ce dinosaure depuis sa découverte : ce lointain cousin des oiseaux aurait-il pu utiliser ses ailes pour voler ?

    Là encore, les travaux de Pittman et ses coauteurs pourraient bien être instructifs. La présence d'un patagium, la peau reliant le bras à l'avant-bras, est généralement considérée comme une adaptation nécessaire pour le vol ou le vol plané, car elle contribue à générer de la portée. Les ptérosaures possédaient un patagium, tout comme les chauves-souris et les oiseaux modernes.

    Comprendre : Les dinosaures

    Cependant, les auteurs précisent que la simple présence d'un patagium ne garantit en rien la possibilité de prendre son envol, comme en atteste le wéka de Nouvelle-Zélande qui possède un patagium mais reste bien incapable de voler.

    « Ce que souligne notre travail, c'est la mesure dans laquelle les dinosaures ressemblant aux oiseaux expérimentaient avec leur anatomie et leurs capacités fonctionnelles avant même l'apparition des premiers oiseaux clairement aptes au vol ou au vol plané, » conclut Pittman.

    Retrouvez Jason Bittel sur Twitter et Facebook.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

    les plus populaires

      voir plus
      loading

      Découvrez National Geographic

      • Animaux
      • Environnement
      • Histoire
      • Sciences
      • Voyage® & Adventure
      • Photographie
      • Espace
      • Vidéos

      À propos de National Geographic

      S'Abonner

      • Magazines
      • Livres
      • Disney+

      Nous suivre

      Copyright © 1996-2015 National Geographic Society. Copyright © 2015-2024 National Geographic Partners, LLC. Tous droits réservés.