Certains geysers du parc de Yellowstone connaissent un regain d’activité

Dans certaines zones du parc de Yellowstone, l’activité importante des geysers démontre leur nature imprévisible.

De Robin George Andrews
Une petite éruption de Steamboat Geyser (ou geyser-bateau à vapeur en français), dans le parc national ...
Une petite éruption de Steamboat Geyser (ou geyser-bateau à vapeur en français), dans le parc national de Yellowstone. Ce geyser est récemment entré en éruption 32 fois en une année, un record.
PHOTOGRAPHIE DE Fedor Selivanov, Alamy

Les geysers du parc national de Yellowstone sont aussi beaux qu’imprévisibles. Si Old Faithful (vieux fidèle en français) est en partie célèbre pour sa prédictibilité, la plupart des autres sources naturelles du parc sont bien plus mystérieuses.

Alors, lorsque Steamboat Geyser est entré en activité en 2018, les géologues étaient fous de joie. En temps normal, les éruptions majeures de ce geyser se produisent à des intervalles comprises entre quatre jours et 50 ans. Mais depuis mars 2018, les éruptions de Steamboat Geyser se produisent aussi souvent qu’une fois par semaine.

Selon l’Observatoire volcanologique de Yellowstone, le geyser est entré en éruption 32 fois en 2018, un véritable record sur une année. La dernière fois que Steamboat a été (presque) aussi actif, c’était en 1964, avec 29 éruptions.

D’autres geysers situés à proximité se comportent aussi de façon intéressante depuis quelques temps. Par exemple, le geyser Ear Spring, plutôt calme depuis 1957, est entré en éruption de façon spectaculaire voilà quelques mois, recrachant des ordures datant des années 1930.

Cette hyperactivité hydrothermique est-elle inhabituelle ? Si oui, quelle en est la cause ?

 

DES ÉRUPTIONS PLUS FRÉQUENTES, BIEN QU’IMPRÉVISIBLES

Bien que Yellowstone compte d’innombrables geysers à admirer, Steamboat est particulièrement remarquable. Plus grand geyser actif au monde, il peut projeter de l’eau jusqu’à 90 m de hauteur. Et récemment, ses éruptions se sont faites plus fréquentes.

Selon l’Institut d'études géologiques des États-Unis, qui tient un registre de toutes les éruptions d’eau de Steamboat, la représentation que donne le geyser a débuté le 15 mars 2018. Depuis, Steamboat est très actif : il est déjà entré en éruption à cinq reprises en 2019.

Bien que ses éruptions soient fréquentes, elles ne sont pas exactement prévisibles. Deux ont eu lieu en juillet 2018, contre six en septembre de la même année par exemple. Pour Michael Poland, scientifique responsable de l’Observatoire volcanologique de Yellowstone, il s’agit là d’un caractère irrégulier et tout à fait normal pour les geysers du parc. « C’est une bonne leçon sur la façon dont les geysers fonctionnent », confie-t-il. « Dès que vous commencez à identifier une tendance, elle change. »

Steamboat est l’une des nombreuses sources qui gargouillent dans le Norris Geyser Basin, le site thermal le plus changeant et le plus chaud de Yellowstone selon le Service des parcs nationaux. « Steamboat est un geyser ordinaire en ce qui concerne ces éruptions imprévisibles et irrégulières », explique Michael Poland. « C’est son nom et le fait qu’il soit un très grand geyser qui le rendent si intéressant. »

Giant Geyser (ou le geyser géant en français), qui se trouve dans une autre partie du parc, est également un bon exemple de la nature généralement imprévisible des geysers. Lui aussi entre plus souvent en éruption que par le passé.

« Mais en 2007 et 2008, Giant a perdu les pédales », se souvient le scientifique. « Il est entré en éruption bien plus souvent que l’an dernier, alors que Steamboat n’a rien fait de tel. »

 

CHAQUE GEYSER EST UNIQUE

Le fonctionnement des geysers est une science bien connue. Selon Philippa Demonte, experte en acoustique, dont ceux des systèmes volcaniques, à l’université de Salford, les trois principales conditions déterminantes requises pour la formation d’une éruption sont : l’apport de chaleur géothermique provenant d’une source magmatique sous-jacente, l’approvisionnement en eau et la présence d’un « système de plomberie rocheux ».

Il faut imaginer un geyser comme une bouilloire sur le feu, explique Philippa Demonte. Des nappes phréatiques peuvent parfois circuler librement jusqu’à la surface et, comme lorsque l’on fait chauffer de l’eau dans une poêle peu profonde, le liquide mettra plus de temps à bouillir. Mais si le chemin est parsemé de roches et resserré, comme cela est le cas dans une bouilloire, alors l’eau bout bien plus vite. Plus la chaleur est importante, plus il est possible de faire bouillir quelque chose rapidement et plus vous avez d’eau, plus il faudra de temps pour que le liquide arrive à ébullition. Mais à la fin, vous aurez une quantité d’eau plus importante pour l’éruption.

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    Chaque geyser étant singulier, il n’est toutefois pas possible de faire des généralités. Ainsi, si Lone Star Geyser, qui entre en éruption toutes les trois heures, est assez prévisible, d’autres geysers, à l’image de Sawmill Geyser, peuvent être actifs pendant un certain temps avant de se calmer, précise Philippa Demonte.

    « La tendance de ces systèmes est indescriptible », ajoute Michael Poland. C’est l’une des raisons pour lesquelles il est si difficile de comprendre pourquoi les geysers agissent de la sorte.

    Il reste encore beaucoup à apprendre sur le phénomène, comme le démontrent les tests menés en laboratoire qui reproduisent des geysers. Une étude de 2014 avait découvert qu’en fonction de la façon dont les bulles s’élevaient dans les conduits géologiques et de l’endroit où l’eau se mettait à bouillir, un même geyser pouvait produire une éruption plus ou moins forte, décrit Helen Robinson, spécialiste en géothermie et doctorante à l’université de Glasgow.

    La chimie de l’eau joue aussi un rôle très important, ajoute la scientifique. Si elle est par exemple capable de briser des roches riches en silice ou en carbonate de calcium, ces minéraux pourraient précipiter un peu plus haut dans le système à mesure que la pression et la température de la « plomberie » changent. Les fractures par lesquelles l’eau s’est écoulée pourraient se sceller et le geyser éventuellement s’éteindre.

     

    LA NEIGE, RESPONSABLE IDÉALE ?

    Compte tenu de tout cela, que savons-nous sur ce qui se passe actuellement à Yellowstone ? Selon Michael Poland, il n’y a eu aucun changement géologique majeur ou relatif à la source de chaleur sous-jacente.

    Toutefois, la quantité de neige tombée ces dernières années a été exceptionnelle : un changement affectant l’approvisionnement en eau sous la surface pourrait donc potentiellement constituer une cause majeure de ce regain d’activité. De plus, en 2017, le parc a connu son second plus long essaim de séismes jamais enregistré. Une étude suggère, mais sans certitude, que les fortes chutes de neige auraient pu provoquer une importante lubrification des failles impliquées dans les séismes, permettant à ces dernières d’avancer sans limite.

    Il est difficile de tirer des conclusions définitives de ces deux scénarios, car il n’existe pas vraiment de mesure directe de l’eau souterraine dans le parc et de telles déductions se fondent sur les niveaux de précipitations et de l’eau en surface enregistrés. « Nous ne faisons qu’émettre des hypothèses », précise pour le moment Michael Poland.

    S’il y a bien une chose sur laquelle il n’est pas nécessaire de spéculer, c’est l’état notoire du système volcanique de Yellowstone. Chaque regain d’une activité quelconque au sein du parc semble susciter des inquiétudes relatives à une éruption catastrophique de l’immense caldeira de Yellowstone, même si de telles craintes sont infondées.

    Aucun changement ne s’est produit dans le réservoir magmatique sous-jacent au cours des dernières années, souligne Michael Poland. De plus, les éruptions des geysers du parc, qui se forment juste sous la surface terrestre, n’ont aucune influence sur le réservoir de magma, qui est principalement solide et se trouve à plusieurs kilomètres de profondeur sous terre.

     

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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