Munazza Alam, l'astrophysicienne partie à la recherche de planètes habitables

Munazza Alam n'a pas grandi la tête dans les étoiles, c'est la passion d'une enseignante qui l'a conduite à s'immerger dans la recherche de planètes habitables.

De Catherine Zuckerman
Astronome et bénéficiaire d'une bourse National Geographic, Munazza Alam traque les planètes par delà notre système solaire avec un climat similaire au nôtre, susceptibles d'accueillir la vie.
PHOTOGRAPHIE DE Randall Scott, National Geographic Creative

Sommes-nous seuls dans l'univers ? Cette question est souvent au cœur de vifs débats. Pour Munazza Alam, elle est au cœur d'une carrière toute entière.

Alam n'a pas toujours été intéressée par le cosmos. « En grandissant, je n'étais pas passionnée par l'espace, » nous confie-t-elle. On ne trouvait pas de télescope dans son jardin et les excursions au musée concernaient surtout les expositions sur les dinosaures. Enfant, elle préférait jouer dehors et faire du vélo plutôt que contempler les étoiles.

Pourtant, avant la fin de sa première année à l'université elle était tombée sous le charme de l'astronomie. 

 

CHAMP DE VISION

Alam, 24 ans, est brillante dans tous les sens du terme. Elle est intelligente, vive d'esprit et s'exprime d'une voix chaleureuse. Elle peut discuter des mérites de la théorie de la matière condensée aussi facilement et clairement que de son ressenti vis-à-vis de son environnement familial.

Américaine musulmane de première génération, Alam a grandi à Staten Island, un arrondissement de New York City majoritairement blanc. Sa mère est née à Hyderabad, en Inde, et son père est originaire de Lahore, au Pakistan. « J'ai toujours eu cette sensation d'être différente et j'ai toujours porté en moi cette question d'appartenance, » explique-t-elle. D'un côté, sa famille du sous-continent indien les percevait, elle et ses sœurs, comme des Américaines et de l'autre elle raconte : « nous étions considérées comme des non-Américains car nos parents étaient des immigrés. »

Un autre aspect important de son expérience : Munazza Alam et ses sœurs ont toutes été scolarisées dans une école catholique, de la maternelle au lycée. L'école avait été une réussite pour un de leurs cousins et les parents de Munazza souhaitaient offrir à leurs enfants la meilleure éducation possible. Ils y ont donc inscrit leurs trois filles. « C'était une bonne façon de favoriser cette idée d'appartenance, le fait d'évoluer parmi différents groupes et simplement d'apprendre à comprendre les croyances d'autres personnes et l'éthique qu'elles respectent, » explique Alam.

 

DÉCOLLAGE

Son intérêt pour la physique s'est éveillé au lycée, grâce à une enseignante à l'enthousiasme contagieux. Munazza Alam avait toujours apprécié les mathématiques, les sciences, le raisonnement critique et la résolution de problèmes, mais la passion de l'enseignante pour les sciences physiques et sa capacité à expliquer simplement des concepts complexes ont fait forte impression sur Alam.

« Mes deux sœurs travaillent également dans les sciences », raconte Alam. Sur cette photo prise en 1995 au Musée de l'air et de l'espace de la Smithsonian Institution, Munazza alors âgée d'un an est assise dans une poussette pendant que son père, Mubasher Alam, se tient derrière avec ses sœurs Abeeha (droite) et Bareah.
PHOTOGRAPHIE DE Muneera Alam

Son enseignante était également une source d'inspiration sur un tout autre plan. « Lorsqu'elle était encore enfant, elle avait quitté Israël pour New York City, » raconte la jeune femme. Elle ajoute qu'elle avait la sensation de partager une « sorte d'identité commune : elle aussi était de la première génération [d'immigrés] et elle adorait la physique. En tant que femme, elle faisait partie des étudiants minoritaires lorsqu'elle a commencé ses études supérieures. »

À son entrée au Hunter College (CUNY) de Manhattan, Alam s'était spécialisée en sciences physiques. Très vite elle entama son premier projet de recherche sur les objets de faible masse connus sous le nom de naines brunes et à la fin de l'année, elle avait eu l'opportunité de visiter l'observatoire national de Kitt Peak, près de Tucson en Arizona.

« J'avais 19 ans, raconte-t-elle, et c'était la première fois que j'apercevais la voie lactée. » Cette vue la conforta dans sa décision d'entreprendre de longues études d'astronomie. Elle lui rappela également le chemin qu'elle avait parcouru : « J'ai grandi en ne voyant qu'une poignée d'étoiles à la fois, » dit-elle en riant.

 

UNE ÉTOILE MONTANTE

Bénéficiaire d'une bourse National Geographic, Alam est aujourd'hui en passe d'obtenir son diplôme d'études supérieures au Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics de Cambridge, dans le Massachusetts. Ses recherches s'intéressent actuellement à une catégorie de grandes et brillantes exoplanètes appelées Jupiters chauds.

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    À l'aide de données issues du télescope spatial Hubble, elle « établit le spectre des atmosphères de différentes planètes afin de déterminer de quoi elles se composent et s'il y a présence de nuages et de brume », explique-t-elle. Elle complète ensuite ces observations en utilisant des télescopes terrestres au Chili pour déterminer comment ces corps célestes se sont formés et ont évolué.

    L'un des rêves d'Alam est de découvrir une planète jumelle de la Terre, une planète en dehors de notre système solaire au climat similaire au nôtre et capable d'accueillir la vie. Ce type de recherche, c'est comme un puzzle sans image de référence, dit-elle. Cela exige de la collaboration afin de comprendre comment les pièces s'assemblent.

     

    RECHERCHE FEMME SCIENTIFIQUE

    Alam espère également devenir une source d'inspiration et inciter d'autres femmes à embrasser ce type de carrières. « Je n'ai pas vraiment de modèle qui me ressemble ou dont l'identité est similaire à la mienne, » confie-t-elle. « J'aimerais être cette personne pour d'autres filles dont le bagage culturel est semblable au mien. »

    D'un point de vue statistique, la parité homme-femme est meilleure dans le domaine de l'astronomie que pour les autres domaines des sciences physiques, « mais ce n'est toujours pas suffisant, » indique Alam. Le cursus qu'elle suit à Harvard compte 52 étudiants, dont moins de la moitié sont des femmes. Malgré cette disparité, Alam peut compter sur des influences féminines fortes, comme sa mère ou sa directrice de thèse.

    Et bien que les projets sur lesquels elle se penche puissent sembler ésotériques, elle tient à insister sur le fait que l'astronomie s'adresse à tous. « Il y a quelque chose d'incroyablement humain et naturel dans l'observation des étoiles et la contemplation du cosmos. »

     

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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