Ce bébé dinosaure a été découvert recroquevillé dans sa coquille

Cet embryon de dinosaure, l’un des plus complets à avoir été mis au jour, a été découvert recroquevillé dans une position étonnamment semblable à celles de poussins dans leur coquille.

De Maya Wei-Haas
Publication 22 déc. 2021, 15:21 CET
dino embryo

Surnommé « Baby Yingliang », ce fossile nouvellement décrit a été découvert recroquevillé dans une position pré-éclosion.

PHOTOGRAPHIE DE Lida Xing

Tout recroquevillé, la tête entre les pattes, ce bébé dinosaure semblait à deux doigts de sortir de sa coquille. Mais avant même que la petite créature ne puisse prendre une première bouffée d’air frais, son œuf a été enterré, la préservant pendant des dizaines de millions d’années dans l’actuel sud de la Chine.

C’est la société Yingliang Group, spécialisée dans l’extraction de pierres, qui a mis au jour l’œuf en 2000. Mais il aura fallu attendre 15 ans avant que les scientifiques ne mesurent l’importance de cette découverte, lorsqu’une fissure à la surface de l’œuf a laissé entrevoir le trésor qu’il renfermait : quelques os fragiles.

Comme l’ont annoncé cette semaine les scientifiques dans la revue iScience, la coquille ridée de l’œuf fossilisé abrite l’un des embryons de dinosaures les plus complets jamais mis au jour.

« Je n’en croyais pas mes yeux ; il est en parfait état de conservation », confie Darla Zelenitsky, autrice de l’étude et paléontologue spécialiste des œufs de dinosaures à l’université de Calgary, au Canada.

Surnommé « Baby Yingliang », ce dinosaure juvénile a été découvert dans des roches vieilles d’environ 70 millions d’années (l’âge précis reste à déterminer). Il s’agit d’un oviraptorosaure, un groupe de dinosaures théropodes à bec étroitement apparenté aux oiseaux modernes qui a existé entre 130 et 66 millions d’années avant notre ère. Ces créatures ont de nombreuses caractéristiques en commun avec les volatiles, et l’embryon en dévoile une supplémentaire : une position recroquevillée pré-éclosion.

« Avoir un aperçu des premiers instants de la vie d’animaux qui ont vécu il y a plus de 70 millions d’années est formidable », écrit dans un e-mail Lindsay Zanno, responsable du département de paléontologie du musée des sciences naturelles de Caroline du Nord, aux États-Unis, et chercheuse à l’université d’État de Caroline du Nord. « Il est prouvé de manière convaincante que les oiseaux sont des théropodes vivants ».

La similitude entre la posture recroquevillée de Baby Yingliang et celle des poussins modernes suggère que les origines de ce comportement propre aux oiseaux remontent à plusieurs dizaines de millions d’années.

PHOTOGRAPHIE DE Lida Xing et al

UNE DÉCOUVERTE RARE

Cet œuf remarquable a été redécouvert en 2015, alors que le personnel de Yingliang triait les fossiles mis au jour par la société dans l’optique d’ouvrir un muséum d’histoire naturelle. Légèrement plus long qu’un œuf d’autruche et en forme de gélule, il présentait une fissure en surface, ce qui a permis à un employé de repérer quelques morceaux d’os.

« Il a alors compris qu’il renfermait sans doute un embryon », explique Waisum Ma, autrice de l’étude et doctorante à l’université de Birmingham, au Royaume-Uni.

Un technicien a soigneusement retiré la coquille d’un côté du fossile et les sédiments qui avaient pénétré dans l’œuf, révélant ainsi le dinosaure juvénile recroquevillé comme s’il était encore vivant. Prenant la mesure de la découverte, Yingliang a contacté l’auteur principal de l’étude, Lida Xing, de l’université de géosciences de Chine, à Pékin. Celui-ci a constitué une équipe pour étudier le bébé dinosaure en parfait état de conservation.

Si de nombreux œufs de dinosaure ont été découverts, rares sont les embryons, et encore plus les embryons en bon état de conservation. « Ce sont surtout des amas d’os au fond de l’œuf », remarque Matthew Lamanna, paléontologue au muséum d’histoire naturelle Carnegie de Pittsburgh, aux États-Unis, qui n’a pas pris part à l’étude.

À ce jour, seuls deux autres embryons d’oviraptorosaures presque complets ont été mis au jour, souligne Waisum Ma. Elle se souvient avoir été impressionnée en voyant les premières photos du fossile. « C’est le plus bel embryon de dinosaure que j’ai jamais vu », confie-t-elle. Seuls quelques os manquent, dont une patte avant et une section de la queue.

Pour les deux autres fossiles, les scientifiques ont eu recours au scanner pour voir en détail les os dissimulés à l’intérieur de la coquille. Mais, à cause du type de sédiments contenus à l’intérieur des œufs, les scientifiques ne sont pas parvenus à discerner correctement le squelette. L’équipe a toutefois pu étudier minutieusement la surface exposée du fossile de Baby Yingliang pour la comparer à celle des deux autres embryons d’oviraptorosaures précédemment mis au jour.

La tête de celui-ci repose sur son ventre, tandis que ses genoux sont repliés jusqu’au niveau de ses minuscules pattes avant. Son dos recourbé est appuyé contre l’une des extrémités de l’œuf, où un espace contenait sans doute le sac aérien, aujourd’hui disparu. Toutes ces caractéristiques sont semblables à celles des embryons de poussins modernes : au fil de leur développement, ces derniers se recroquevillent petit à petit, nichant alors leur tête sous leur aile droite. Cette position est essentielle pour une éclosion réussie.

Si Baby Yingliang n’est pas aussi recroquevillé qu’un poussin sur le point de briser sa coquille, « il y est presque », précise Darla Zelenitsky. La légère différence de position par rapport aux deux autres embryons d’oviraptorosaures pourrait illustrer les changements de postures semblables à ceux observés chez les poussins au cours de leur développement. Selon les chercheurs, les origines de recroquevillement des oiseaux dans la coquille remontent à des millions d’années, à l’époque des bébés oviraptorosaures.

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    Les oviraptorosaures avaient de nombreux traits communs avec les oiseaux. Comme l’illustre cette vue d’artiste, certains couvaient probablement leurs œufs, à l’instar des oiseaux modernes.

    PHOTOGRAPHIE DE Masato Hattori

    UN COMPORTEMENT COMMUN AVEC LES OISEAUX

    Grâce à cette étude, de nouveaux comportements et caractéristiques physiques ont été ajoutés à la liste de ceux transmis par les dinosaures théropodes aux oiseaux modernes, comme en témoigne la découverte d’un oviraptorosaure accroupi tel un oiseau couvant ses œufs. Si le comportement de Baby Yingliang n’est pas forcément surprenant, Matthew Lamanna insiste sur le fait que les fossiles de ce type sont essentiels pour comprendre les rebondissements de l’évolution.

    « Nous pouvons émettre des suppositions à ce sujet pendant très longtemps », déclare-t-il. Mais sans fossile pour étayer ces hypothèses, ces comportements primitifs relèvent de la spéculation.

    Pour Timothy Rowe, paléontologue à l’université du Texas aux États-Unis qui n’a pas pris part à l’étude, le fossile peut livrer des indices supplémentaires sur l’évolution des oiseaux modernes. Par exemple, l’une des phases clés de leur évolution a été le remplacement des pattes avant par des ailes suffisamment longues pour le vol. Pour l’heure, les scientifiques ignorent comment et combien de fois ce changement s’est produit chez les dinosaures. Mais des indices relatifs à ces transformations évolutives pourraient être trouvés dans le développement précoce des animaux. « Elles commencent à se produire dans l’œuf », indique-t-il.

    Pour Waisum Ma, la rareté des embryons en bon état de conservation empêche de tirer des conclusions définitives. Mais cela pourrait bientôt changer : la société qui a mis au jour Baby Yingliang a également découvert d’autres œufs sur le même site. « Il est donc possible qu’il y ait d’autres embryons », révèle la chercheuse. Et donc, d’autres indices sur les origines anciennes des oiseaux qui volent, planent et se dandinent parmi nous.

    La position de Baby Yingliang, dos appuyé contre une extrémité de l’œuf (là où se situait probablement le sac aérien), est l’une des nombreuses caractéristiques que l’embryon partage avec les oiseaux modernes.

    PHOTOGRAPHIE DE Julius Csotonyi

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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