Les dinosaures étaient à leur apogée avant l’impact de l'astéroïde qui leur a été fatal

Une nouvelle datation de fossiles du Nouveau-Mexique remet en question l’idée que les dinosaures périclitaient avant leur extinction. Ils auraient formé des communautés épanouies.

De Riley Black
Publication 29 oct. 2025, 09:03 CET
Alamosaurus a été l’un des derniers dinosaures à arpenter le sud de l’Amérique du Nord. Des ...

Alamosaurus a été l’un des derniers dinosaures à arpenter le sud de l’Amérique du Nord. Des paléontologues ont récemment daté la formation rocheuse dans laquelle on l’a découvert, dans l’État américain du Nouveau-Mexique, à environ 340 000 ans avant la chute de l’astéroïde.

PHOTOGRAPHIE DE Natalia Jagielska

Il y a près de 66 millions d’années, au cours du printemps de l’hémisphère nord, un astéroïde de 10 kilomètres de diamètre a frappé ce qui est aujourd’hui la péninsule de Yucatan. Cette chute a causé l’extinction de 75 % des espèces terrestres, dont la quasi-totalité de la lignée des dinosaures, à l’exception des oiseaux à bec.

L’impact a été dévastateur, et ses conséquences apocalyptiques. Mais que se passait-il chez les dinosaures, juste avant ce cataclysme ?

Les paléontologues ont longtemps débattu : le déclin des dinosaures avait-il déjà commencé avant l’impact de l’astéroïde ? Ou prospéraient-ils tandis que de nouvelles espèces de ces géants voyaient le jour ? Des fossiles provenant de l’État du Nouveau-Mexique qui remontent à environ 340 000 ans avant la chute de l’astéroïde peignent un tableau saisissant. Une nouvelle étude suggère que les dinosaures ont prospéré jusqu’au moment de l’impact.

De véritables géants dominaient les paysages préhistoriques du Nouveau-Mexique à cette période, comme l’herbivore au long cou : Alamosaurus.

« Je m’imagine la scène : un instant, un dinosaure de la taille d’un avion faisait trembler le sol de ses pas. Puis, l’autre, la Terre entière tremblait à cause de l’énergie relâchée par l’astéroïde », raconte l’Explorateur National Geographic, Stephen Brusatte, paléontologue de l’université écossaise d’Édimbourg et co-auteur de la présente étude. Les découvertes, publiées le 21 octobre dans la revue scientifique Science, soutiennent l’idée que les dinosaures d’Amérique du Nord ne s’éteignaient pas avant leur soudaine extinction. L’étude fournit également des informations sur la diversité des espèces de dinosaures qui habitaient le sud-ouest de l’Amérique du Nord à la fin du Crétacé.

 

UNE NOUVELLE DATATION DES FOSSILES DU NOUVEAU-MEXIQUE

Beaucoup des informations que détiennent les paléontologues sur le sort des dinosaures terrestres proviennent de fossiles découverts dans la partie ouest de l’Amérique du Nord, tout particulièrement dans les formations de Hell Creek et de Fort Union. Ces affleurements rocheux des États du Montana, du Dakota du Nord et du Sud, et du Wyoming ont préservé des traces des espèces terrestres avant et après l’impact de l’astéroïde. Ils montrent que des dinosaures, tels que Tyrannosaure, Triceratops, Edmontosaurus et Ankylosaure habitaient les anciennes plaines inondables préservées autour de la chaine des montagnes Rocheuses.

Mais plus loin, au sud, dans le Nouveau-Mexique du Crétacé, une assemblée différente de dinosaures arpentait les plaines. Afin de comprendre comment l’espèce se comportait juste avant la chute de l’astéroïde, les chercheurs se sont tournés vers les dinosaures du Sud-ouest. On retrouvait parmi eux le dinosaure au bec en cuillère, Kritosaurus, Torosaurus et ses trois cornes, ainsi que Glyptodontopelta à la carapace aux allures d’armure.

Reconstituer les pièces de ce puzzle chronologique et y placer ces dinosaures a demandé aux chercheurs des années de recherches et de travaux sur le terrain, à la recherche d’indices dissimulés dans les roches et les sédiments.

« Ce projet a pris plus d’une décennie. Certains échantillons géochronologiques avaient été collectés avant que je ne commence mon master », explique Andrew Flynn, paléobotaniste au sein de l’université publique du Nouveau-Mexique, et premier auteur à figurer sur la présente étude.

Caitlin Leslie récolte des échantillons paléomagnétiques du début du Paléocène dans la formation de Nacimiento, située ...

Caitlin Leslie récolte des échantillons paléomagnétiques du début du Paléocène dans la formation de Nacimiento, située dans le bassin de San Juan, dans le nord-ouest du Nouveau-Mexique.

PHOTOGRAPHIE DE Daniel J. Peppe

Andrew Flynn et son équipe ont étudié des couches rocheuses découvertes dans le bassin de San Juan, au Nouveau-Mexique, une zone que les géologues connaissent sous le nom de « membre Naashoibito ». Jusqu’à présent, l’âge exact de ces roches était incertain, les chercheurs estimaient qu’elles étaient vieilles de 70 millions d’années, soit des millions d’années avant l’impact de l’astéroïde.

Mais la nouvelle étude d’Andrew Flynn et son équipe a fourni une nouvelle estimation de l’âge de ces roches : entre 66,4 et 66 millions d’années. Cela voudrait dire que les dinosaures découverts dans ces roches avaient vécu 500 000 ans avant que l’astéroïde ne frappe la Terre.

Cela suggère que ces dinosaures arpentaient le monde en même temps que ceux découverts dans les formations de Hell Creek et de Fort Union, dans l’Ouest nord-

américain. Cela montre que les dinosaures du Nouveau-Mexique préhistorique, tels qu’Alamosaurus, étaient encore plus près du point d’impact de Chicxulub, au Mexique, que Triceratops et ses compagnons du Montana.

Afin d’établir une chronologie précise de ces dinosaures, Andrew Flynn et ses collègues ont récolté de nombreux échantillons géologiques sur le site du membre Naashoibito du Nouveau-Mexique. Ils les ont ensuite soumis à une technique de datation spéciale, qui analyse les minuscules cristaux contenus dans la roche afin de déterminer le moment de leur dépôt. Tandis que d’anciennes études suggéraient que les dinosaures de Naashoibito vivaient des millions d’années avant l’impact, cette nouvelle étude affine les dates à environ 340 000 ans avant la fin du Crétacé.

Cela indiquerait que l’Amérique du Nord abritait de nombreuses communautés de dinosaures, qui évoluaient aux côtés des autres dans différents bassins, juste avant le désastre.

« Selon moi, la datation des dépôts du bassin de San Juan à la fin du Crétacé est une contribution remarquable et importante apportée à nos connaissances de la fin de cette période », déclare Manabu Sakamoto. Ce paléobiologiste de l’université de Reading, en Angleterre, n’a pas pris part à la récente étude.

 

DES DINOSAURES DIVERS ET PROSPÈRES

Non seulement les dinosaures prospéraient jusqu’à leur extinction, mais Andrew Flynn et ses collègues ont également découvert que les derniers dinosaures d’Amérique du Nord étaient divisés en différentes communautés d’espèces suivant leur lieu d’habitat.

Les experts qualifient ce comportement de « provincialité », lorsque de nouvelles espèces évoluent dans des poches géographiques et sont souvent séparées les unes des autres par des différences dans la végétation, les températures et d’autres phénomènes naturels.

Certains des derniers dinosaures du Crétacé à arpenter le Nouveau-Mexique étaient très proches de ceux découverts plus loin au Nord. Tyrannosaure, plus connu pour les squelettes découverts dans des lieux comme Saskatchewan, le Canada et le Montana, avait fait du Nouveau-Mexique son foyer juste avant la chute de l’astéroïde.

Mais d’autres présentaient des différences significatives, comme Alamosaurus.

Alamosaurus était le plus grand dinosaure du Nouveau-Mexique à la période du Crétacé. Il pouvait dépasser les 25 mètres de long et pesait plus de 30 tonnes. Ce spécimen a marqué le retour des grands dinosaures sauropodes dans l’Ouest nord-américain, descendants des titanosaures qui vivaient plus loin au sud.

« La présence d’Alamosarus, l’un des plus grands dinosaures de tous les temps, au moment de l’impact de l’astéroïde, illustre au mieux la prospérité des dinosaures, jusqu’à leurs derniers instants », affirme Stephen Brusatte.

les plus populaires

    voir plus

    Une fois les nouvelles dates des sédiments rocheux établies, Andrew Flynn et ses collègues ont comparé les espèces de dinosaures qui vivaient à travers l’Ouest nord-américain entre 75 et 66 millions d’années plus tôt. Cette comparaison pourrait révéler si le continent n’abritait qu’une poignée d’espèces de dinosaures avant leur extinction, ou bien s’ils étaient nombreux à habiter cette région.

    Les découvertes de l’équipe viennent s’ajouter à un grand nombre de preuves attestant que la vie préhistorique s’organisait en communautés de différentes espèces plutôt qu’en une seule communauté de dinosaures à travers le continent, explique Manabu Sakamoto.

    Selon Andrew Flynn et ses collègues, la principale explication à la division entre les communautés de dinosaures du Nord et du Sud aurait été la température.

    L’herbivore géant, Alamosaurus, habitait dans des régions plus chaudes, au sud, à la fin du Crétacé, mais était absent des habitats plus frais du nord, qui abritait beaucoup plus de dinosaures à cornes et au bec en cuillère. Les dinosaures étaient de grands animaux capables de se déplacer sur de grandes distances, et certaines espèces, comme Tyrannosaure, habitaient dans les deux régions. La température semble alors avoir été plus importante dans la formation de ces différentes communautés de dinosaures que ne pouvait l’être une barrière géographique, comme une chaîne de montagnes ou un système de rivières, expliquent les chercheurs.

    Une telle sensibilité à la température et aux conditions naturelles sur le continent indique que des communautés de dinosaures uniques n’attendent que d’être découvertes. Non seulement en Amérique du Nord, mais aussi dans le reste du monde.

    « Je pense que nos nouveaux travaux montrent que plus de recherches doivent être menées sur l’extinction massive du Crétacé-Paléogène dans de nouvelles zones », déclare Andrew Flynn, surtout depuis l’hémisphère sud. Une étude en cours en Amérique du Sud commence à assembler les pièces du puzzle des derniers dinosaures du continent, et de ce à quoi ils ressemblaient par rapport aux autres dinosaures découverts autre part sur la planète. L’identification des espèces

    importantes et de l’époque à laquelle elles vivaient est un composant essentiel pour se faire une image exhaustive de cette extinction.

    Bien que le sort des grands dinosaures soit bien connu, les paléontologues commencent à peine à découvrir les dinosaures qui ont été témoins de la fin du Crétacé.

    Daniel Peppe récolte des échantillons des premiers rochers formés après l’extinction des dinosaures dans le bassin ...

    Daniel Peppe récolte des échantillons des premiers rochers formés après l’extinction des dinosaures dans le bassin de San Juan, dans le nord-ouest du Nouveau-Mexique.

    PHOTOGRAPHIE DE Thomas Williamson

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeogrpahic.com en langue anglaise.

    les plus populaires

      voir plus
      loading

      Découvrez National Geographic

      • Histoire
      • Santé
      • Animaux
      • Sciences
      • Environnement
      • Voyage® & Adventure
      • Photographie
      • Espace

      À propos de National Geographic

      S'Abonner

      • Magazines
      • Livres
      • Disney+

      Nous suivre

      Copyright © 1996-2015 National Geographic Society. Copyright © 2015-2025 National Geographic Partners, LLC. Tous droits réservés.