Tasmanie, l'île aux trésors

Sauvage et splendide, lointain mais accueillant, l’archipel australien est une véritable île aux trésors.

De Sarah Reid, National Geographic Traveler
Photographies de Ewen Bell
Le parc national du mont Cradle-lac St Clair fait le bonheur des randonneurs avec ses sentiers ...

Le parc national du mont Cradle-lac St Clair fait le bonheur des randonneurs avec ses sentiers qui serpentent dans un payage de forêts anciennes et de landes alpines.

PHOTOGRAPHIE DE Ewen Bell

Autrefois considéré comme un trou perdu, l’archipel compte désormais parmi les destinations qui connaissent la plus forte croissance touristique d’Australie. Son attractivité vient de la beauté de sa nature sauvage, qu’il doit en grande partie à son éloignement – des projets d’extension de l’aéroport sont en cours, mais les vols internationaux ne sont pas pour demain – et à la mentalité profondément écologique de son demi-million d’habitants. Couvert d’arbres vieux de 2 000 ans et abritant de véritables « diables » (des marsupiaux carnivores qui ne vivent qu’en Tasmanie) – et même des « tigres », si l’on en croit les rumeurs selon lesquelles le thylacine, espèce officiellement éteinte, serait toujours en vie –, l’État le plus méridional du continent est fait pour les loisirs de plein air.

Une fois sur place, on réalise que la plupart des attractions de « Tassie » – son surnom local – sont étonnamment faciles d’accès. L’île se parcourt en quatre heures de voiture. Peu importe où vous vous installez, les occasions de s’immerger dans la nature ne sont jamais loin : près de la moitié de l’État est classé « parc national ».

« Plus mignon que le serpent-tigre, non ? », plaisante le guide Joel Kovacs, tandis qu’un pademelon (une sorte de mini-kangourou) traverse en sautillant la piste des Trois caps (Three Capes Track). S’arrêtant quelques mètres plus loin, il nous observe à travers un rideau d’herbes coupantes que les Palawas (les aborigènes de Tasmanie) utilisaient pour la vannerie. Avec le trio de wallabies de Bennett et le serpent-tigre mortel que nous avions déjà croisés sur le chemin, côté observation de la vie sauvage, nous sommes gâtés.

Des wallabies à cou rouge ont trouvé refuge dans le parc national de Narawntapu.

PHOTOGRAPHIE DE Ewen Bell

Mais les panoramas restent le point fort de ce parcours de quatre jours qui longe sur cinquante kilomètres les falaises de dolérite hérissant la péninsule de Tasman, une étendue sauvage battue par les vents à la pointe sud-est de l’État. Dévoilé en 2015 après avoir été très attendu, le sentier de grande randonnée le plus récent de Tasmanie est assorti de refuges dessinés par des architectes et de « sièges d’histoires », des bancs design qui permettent de se reposer en feuilletant son guide.

« Même les pistes les mieux aménagées n’entament pas le sentiment d’être immergé dans la nature sauvage », souligne Joel Kovacs, natif de Hobart, qui en a foulé beaucoup en dix ans de carrière. « Ici, les chemins n’ont pas été élargis pour accueillir les foules, comme c’est le cas en Nouvelle-Zélande ou ailleurs, et j’espère qu’ils resteront en l’état. » Sa randonnée préférée emprunte le sentier de l’Overland, une traversée de six jours du parc national du mont Cradle-lac St Clair.

Sur ma liste d’envies, j’ai placé en bonne position la promenade de Wukalina, lancée en 2018, un trek de quatre jours guidé par des aborigènes dans  la baie des Feux. Celle-ci doit son nom en partie à ses rochers de granit couverts de lichen orange. Les marcheurs occasionnels disposent quant à eux d’un vaste choix de randonnées à la journée. J’ai fait une balade rapide aux chutes de Russell et à celles du Fer à cheval, au coeur du parc national du mont Field. Ce décor de forêt pluviale a été immortalisé sur la première série de timbres de Tasmanie dessinés pour promouvoir le tourisme, en 1899.

La baie des Feux, sur la côte nord-est, doit peut-être son nom aux feux de camps que les Aborigènes allumaient sur la plage et qu’apercevaient les marins britanniques. À moins qu’elle ne le tienne de ses rochers couverts de lichen orange.

PHOTOGRAPHIE DE Ewen Bell

Parmi les autres possibilités, figurent le circuit du lac de Dove, surplombé par la silhouette dentelée du mont Cradle, le belvédère de la baie de Wineglass, qui offre le plus beau panorama du parc national de Freycinet, et le trek Springlawn Nature Walk, réputé pour sa faune, dans le parc national Narawntapu. Et ce ne sont que trois des 60 promenades désignées comme les plus belles de l’État par le Service des parcs et de la vie sauvage de Tasmanie.

De gros aménagements sont par ailleurs en cours. Un projet de construction de six refuges écologiques le long du South Coast Track, le sentier le plus sauvage de Tasmanie, a été approuvé en 2018. Et en juillet 2019, était annoncée la création d’un chemin de randonnée dans la chaîne de montagnes des Tyndalls, en bordure de la Zone de nature sauvage de Tasmanie, inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco.

Ouvert en 2015 au bord de l’eau, en pleine nature, Pumphouse Point offre une vue imprenable sur le paysage hivernal du lac St Clair.

PHOTOGRAPHIE DE Ewen Bell

Jetant un coup d'oeil par-dessus mon guidon à la piste rocailleuse et en pente raide qui zigzague entre les eucalyptus, je me demande si je n’ai pas surestimé mes capacités. Mais après avoir négocié quelques virages serrés sans tomber, je m’installe dans l’une des descentes du bike park de Maydena.

Tandis que nous dévalons plus de 800 m sur un réseau qui compte plus de 62 pistes tracées sur les flancs d’une colline au nord-ouest de la ville d’Hobart, je m’autorise à voler de plus longs aperçus du paysage. « J’aime voir dans cette zone notre Jurassic Park », me dit son directeur adjoint, Luke Reed, tandis que nous slalomons entre les hautes fougères de la forêt tempérée humide qui tapisse ses pentes. Depuis qu’il a quitté le continent trois ans plus tôt après avoir eu vent du développement de Maydena, il n’a pas regardé en arrière. « Il y a tant à faire ici. On a les chutes de Marriott et le mont Field, tout près, et je n’ai toujours pas épuisé les pistes du parc. »

Le brouillard s’installe sur la rivière Tamar

PHOTOGRAPHIE DE Ewen Bell

Mon guide, Liam Weaver, est le premier à le voir. À sa suite, je pagaie lentement vers la petite bosse brune qui se meut dans l’eau. Soudain, l’animal s’immobilise, nous laissant admirer son corps aux poils luisants et son célèbre « bec de canard », alors qu’il s’arrête quelques secondes à la surface. Puis il plonge dans une eau colorée par les tanins des végétaux alentour.

« Quand il m’a amenée ici en kayak pour la première fois, j’ai eu l’impression qu’on nous offrait l’occasion de créer une expérience de tourisme durable unique en son genre », m’explique Fiona, l’épouse et associée de Liam. Elle anime aussi Wild Island Women, la première communauté de voyageuses de Tasmanie. « Il y a encore des habitants qui ignorent que nous avons cette incroyable faune sauvage à notre porte », ajoute-t-elle.

Même sans voir d’ornithorynque, pagayer sur cette rivière toute une après-midi est des plus pittoresque. Depuis l’ouverture du parcours il y a trois ans, Tassie Bound est resté le seul tour-opérateur à y organiser des excursions, ce qui ajoute au sentiment d’aventure qui nous envahit. Les kayakistes passionnés, en quête de sensations fortes hors des sentiers battus, trouveront leur bonheur avec les expéditions de plusieurs jours créées par Roaring 40s Kayaking sur les cours d’eau accidentés et secrets de la Zone de nature sauvage de Tasmanie. La région abrite aussi le site de rafting le plus spectaculaire du pays : les rapides de la rivière Franklin, sauvée d’un projet de barrage dans les années 1970 grâce à l’une des campagnes de protection de l’environnement les plus cruciales de l’histoire du pays.

« Descendre à la pagaie dans la nature indomptée de la Franklin, qui ne compte pas le moindre équipement artificiel, est une expérience incroyablement puissante », résume Elias Eichler, originaire de Tasmanie, le cogérant de Franklin River Rafting. « L’eau est si pure qu’on a attaché un gobelet au flanc du bateau ; il suffit de le plonger dans la rivière si vous avez soif. Où pourriez-vous faire ça de nos jours ? »

 

Extrait de l'article publié dans le numéro 18 du magazine National Geographic Traveler

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