7 femmes scientifiques qui ont changé le monde

National Geographic rend hommage à sept femmes scientifiques qui ont, par leurs découvertes, changé le monde.

De Juliette Heuzebroc, Romy Roynard

« Femmes scientifiques » résonnait comme un doux oxymore aux oreilles d'une communauté de recherche largement dominée par les hommes. Plusieurs d'entre elles ont été boudés par les récompenses ou se sont vu voler leurs découvertes parce qu'elles étaient des femmes.

Pendant des siècles, les chercheuses devaient se porter « volontaires » pour assister des membres de facultés des sciences, et leurs découvertes majeures ont été attribuées à leurs collègues masculins et leurs noms ont été retirés des protocoles expérimentaux.

Il leur fallait bien souvent se battre pour ne serait-ce qu'avoir « la reconnaissance accordée naturellement à leurs époux ou confrères » explique Anne Lincoln, sociologue à l'Université méthodiste du Texas, qui a étudié les obstacles opposés aux femmes dans l'histoire des sciences.

Selon une étude conduite en 2014, les femmes sont toujours sous-représentées en sciences : seul un tiers des chercheurs sont des chercheuses. Pourtant de nombreuses femmes scientifiques ont participé à des découvertes qui ont changé notre monde.

À l'occasion de la Journée internationale du droit des femmes, National Geographic rend hommage à sept femmes scientifiques qui ont permis des découvertes majeures sans toujours recevoir le crédit qu'elles méritaient, pour la seule raison qu'elles étaient nées femmes.

 

HENRIETTA LEAVITT

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    PHOTOGRAPHIE DE Marie Crayon, National Geographic

    Née en 1868 dans le Massachusetts, Henrietta Swan Leavitt est une astronome américaine. En 1893, elle est recrutée à l'Observatoire de l'université d'Harvard pour rejoindre « Harvard Computers », un groupe de femmes engagées pour établir un traitement mathématique des données astronomiques ; les femmes n'ayant à l'époque pas le droit d'utiliser des télescopes. Henrietta Leavitt est chargée d'examiner des plaques photographiques prises à différentes périodes afin de mesurer et classifier la luminosité des étoiles.

    En 1908 et 1912, elle publie les résultats des travaux qu'elle a menés sur les nuages de Magellan, un groupe de galaxies naines. Ses observations lui ont permis de détecter la variation de luminosité périodique de certaines étoiles, les céphéides. Elle établit ainsi le rapport période-luminosité, nommé « Loi de Leavitt », qui a permis aux astronomes de développer un système de calcul de distances dans l'univers et ainsi de mesurer la distance entre notre planète et les autres galaxies.

    Henrietta Leavitt est nommée à la tête du département de photométrie stellaire de l'Observatoire de Harvard en 1921, quelques mois avant sa mort.

    Gösta Mittag-Leffler, mathématicien suédois, tente de la nommer en 1926 pour le Prix Nobel de physique. Il n'obtient pas gain de cause, cette distinction ne pouvant être attribuée à titre posthume. Mais un astéroïde et un cratère lunaire ont été nommés Leavitt en hommage à l'astronome.

     

    GERTRUDE BELL

    Née en 1868 dans l'Angleterre victorienne, Gertrude Bell est l'une des scientifiques les plus pluridisciplinaires du 20e siècle : une des premières femmes diplômées d'Oxford, elle est archéologue, alpiniste, photographe, écrivain et analyste politique britannique.

    Pendant la Première Guerre mondiale, elle demande à s’engager au Moyen-Orient où, sous les ordres de Winston Churchill, elle travaille à l'instauration des relations arabo-britanniques.

    Grâce à sa connaissance approfondie de l'Histoire, des peuples et des cultures de la région, elle est missionnée pour dessiner les frontières d'un État-nation sous mandat britannique - l'Irak actuel. Son influence conduit à la création d’un pays à majorité chiite au sud, et à minorités sunnite et kurde au centre et au nord. Seule femme officier chargé d’affaires politiques de l’armée britannique, et confortée par ses recherches archéologiques et anthropologiques, elle lutte activement pour favoriser la compréhension et le respect des peuples orientaux.

    La « reine sans couronne », comme elle était surnommée par les Irakiens, a également dirigé de nombreux chantiers de fouille dont les artefacts mis au jour ont été réunis dans le nouveau Musée archéologique de Bagdad (musée national d'Irak). Malade, elle meurt en 1926 d'une overdose de médicaments. Elle a reçu le titre de commandeur de l'ordre de l'Empire britannique.

     

    ROSALIND ELSIE FRANKLIN

    Biologiste moléculaire, Rosalind Elsie Franklin est sûrement l'une des scientifiques les plus connues du 20e siècle. Dès 1935, elle décide d'entreprendre des études de physique, projet de carrière ambitieux et courageux pour une femme britannique à l'époque. Elle obtient son doctorat en physique-chimie à l'université de Cambridge en 1945. Elle part ensuite pour Paris afin d'étudier les nouvelles techniques de diffraction des rayons X.

    De retour au King's College de Londres, elle mène des travaux sur l'analyse de l'acide désoxyribonucléique (ADN). En 1953, grâce à son expertise en diffractométrie de rayons X, elle fait plusieurs radiographies de l’ADN, dont la « Photo 51 », qui permet la découverte de la structure à hélice.

    Trois chercheurs obtiennent le prix Nobel de médecine en 1962 pour cette découverte, après avoir eu accès et avoir utilisé les travaux de Rosalind Franklin à son insu et sans la citer.

    Rosalind Elsie Franklin meurt en 1958, à 37 ans, d'un cancer des ovaires certainement causé par une surexposition aux rayons. Elle est distinguée en 2008 d'un Prix d'honneur Louisa-Gross-Horwitz, haute distinction scientifique décernée par l'université de Columbia.

     

    ADA E. YONATH

    Issue d'une famille ayant fui la Pologne, Ada E. Yonath grandit à Jérusalem auprès de son père rabbin dans les années 1940. Après avoir commencé ses études en biochimie à l'université hébraïque de Jérusalem, elle obtient son Philosophiæ doctor en 1968 à l'Institut Weizmann pour sa recherche en cristallographie. Après un passage par le Massachusetts Institute of Technology (MIT), Ada Yonath revient en 1970 à Tel Aviv pour y fonder le premier laboratoire israélien en cristallographie à l'Institut Weizmann.

    La cristallographie est la science dédiée à l'étude des substances cristallines à l'échelle atomique. En tant que biochimiste moléculaire, Ada Yonath s'est fortement intéressée à la biosynthèse des protéines par l'étude des ribosomes, agents moléculaires à l'origine de cette synthèse.

    Ses travaux ont été récompensés par le Prix Nobel de chimie en 2009, avec deux co-récipiendaires américains, Thomas Steitz et Venkatraman Ramakrishnan, pour leurs travaux sur l'identification moléculaire du ribosome par cristallographie qui ont permis d'ouvrir « de nouvelles perspectives concernant l'élaboration de nouveaux antibiotiques ».

    Elle est la première femme moyen-orientale à recevoir cette distinction. Elle a également reçu une douzaine d'autres prix internationaux et a été nommée membre de l'Académie pontificale des sciences par le pape François.

     

    JOCELYN BELL BURNELL

    Souvent consacrée comme l’une des plus grandes scientifiques du 20e siècle, Jocelyn Bell Burnell est une astrophysicienne britannique. Elle est principalement reconnue pour avoir découvert le premier pulsar en 1967. Elle intègre l'université de Cambridge pour y effectuer son Philosophiæ doctor, qu'elle obtient en 1969, sous la direction de l'astrophysicien Anthony Hewish.

    Lors de ses études à Cambridge, elle participe activement à la fabrication d'un radiotélescope dédié à l'étude des quasars. En 1967, c'est lors d'analyses faites à partir de ce radiotélescope que Jocelyn Bell détecte un signal radioastronomique inconnu jusqu'alors.

    Elle découvre ainsi le tout premier pulsar, un reste d'étoile résultant d'une supernova qui produit un signal périodique. Les pulsars sont la preuve que lorsque les astres explosent, ils ne se diluent pas mais deviennent de minuscules étoiles à neutrons très denses et tournant très rapidement sur elles-mêmes.

    Cette découverte vaut, en partie, le Prix Nobel de physique à Antony Hewish et Martin Ryle en 1974, qui n'incluent pas Jocelyn Bell. L'astrophysicienne mène encore de grands travaux qui lui valent de nombreuses récompenses, comme le statut de commandeur de l'Ordre de l'Empire Britannique.

    Elle est aujourd'hui professeure à Oxford et dirige un groupe de travail à la Royal Society d'Édimbourg qui vise à favoriser et encourager l'engagement des femmes dans les domaines scientifiques, d'ingénierie et de mathématiques.

     

    FRANÇOISE BARRÉ-SINOUSSI

    Françoise Barré-Sinoussi est une chercheuse française engagée dans la rétrovirologie depuis le début des années 1970. Après avoir suivi des études de biologie et de biochimie à la faculté des sciences de l'université de Paris, elle intègre l'Institut Pasteur puis l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, dont elle devient la directrice de recherche.

    En 1983, l'équipe du professeur Luc Montagnier, qui dirigeait le service d'oncologie virale de l'Institut Pasteur, reçoit une biopsie ganglionnaire fournie par des confrères de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

    Cet échantillon fera l'objet d'environ un mois de culture et d'observation par Françoise Barré-Sinoussi et ses collaborateurs. Suite à cette étude, la chercheuse co-publiera un article dans la revue Science exposant la découverte d'un nouveau rétrovirus, ultérieurement appelé VIH-1.

    Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier sont distingués par le Prix Nobel de médecine en 2008 pour cette découverte. La virologue française consacre son entière carrière à la recherche d'un vaccin contre le Virus de l'Immunodéficience Humaine (VIH).

    Elle est également fortement engagée dans la prévention et les actions de santé publique concernant le SIDA et les hépatites virales en Afrique et en Asie. Co-auteure de plus de 270 publications, Françoise Barré-Sinoussi a été à la tête de l'International AIDS Society, et est à ce jour membre de l'Académie des sciences, présidente du Sidaction et a reçu la Grand-Croix de la Légion d'honneur.

     

    TEMPLE GRANDIN

    Née en 1947 à Boston, Mary Temple Grandin présente ce que les médecins identifient comme des lésions cérébrales alors qu'elle n'avait que trois ans. En réalité, Mary est atteinte d'autisme, maladie méconnue à l'époque.

    Malgré ses difficultés d'adaptation sociale, elle fait de longues études et obtient une maîtrise à l'université d'état d'Arizona en 1975 qu'elle consacre à l'étude du comportement des bovins en élevage, sujet pionnier puisqu'il n'existait alors pas de formation en zootechnie.

    En 1989, après la démocratisation de cette discipline, elle obtient son doctorat et devient une professeure renommée.

    Parallèlement, elle crée sa société de conseil et d'ingénierie dans l'équipement d'élevage de bétail. L'étude de leur mode de réflexion par image lui permet d’œuvrer pour le bien-être animal, favorisant la compréhension et la gestion de leur nervosité. Alors qu'en 1980, il n'existait aucune étude ou dispositif consacré au bien-être animal, au moins la moitié des abattoirs nord-américains étaient équipés des inventions de Temple Grandin en 2012.

    Elle a par ailleurs inventé la machine à câlin, un appareil destiné à calmer les personnes hypersensibles. Temple Grandin milite quotidiennement pour une meilleure intégration des personnes autistes et souhaite la reconnaissance de l'autisme comme handicap plutôt que maladie mentale. Temple Grandin travaille également à l'ouverture des filières scientifiques aux personnes autistes.

     

    Illustratrice parisienne, Marie Crayon s'intéresse à la déconstruction des normes et injonctions que la société impose aux femmes. Elle tend à représenter la diversité des corps, et mettre en lumière les femmes et leurs combats quotidiens à travers un univers haut en couleurs.

    Retrouvez Marie Crayon sur son site et sur Instagram.

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