Profitez-en tant que vous le pouvez : les hivers enneigés se font de plus en plus rares

Incendies potentiellement plus nombreux ou encore augmentation de l’insécurité liée à l’eau : la diminution des chutes de neige ne sera pas sans conséquence.

De Melissa Hobson
Publication 22 janv. 2024, 12:22 CET
Une femme se promène dans Manhattan, abritée sous son parapluie. Avec le réchauffement climatique, les précipitations ...

Une femme se promène dans Manhattan, abritée sous son parapluie. Avec le réchauffement climatique, les précipitations liquides seront plus fréquentes, mais les tempêtes de neige seront plus violentes.

PHOTOGRAPHIE DE Charly Triballeau, AFP, Getty Images

À l’évocation du mot « hiver », vous pensez sans doute batailles de boules de neige et luge. Et pourtant, il pourrait bientôt être impossible de pratiquer ces activités lors de la saison froide. Alors qu’une partie du globe est actuellement touchée par un épisode neigeux important, il neige de moins en moins sur Terre. Une tendance qui est là pour durer.

Pourquoi ? Parce que notre planète se réchauffe (une situation amplifiée cette année par El Niño). De toutes les saisons, l’hiver est celle qui connaît la hausse la plus rapide de ses températures. Les chutes de neige se font plus rares, au profit des pluies.

Cela n’est pas sans incidence, notamment sur les ressources en eau douce disponibles au printemps et en été, le risque d’incendie et la survie de plusieurs espèces. Sans action majeure pour limiter le changement climatique, le coût de l’adaptation sera colossal.

DES HIVERS ENNEIGÉS PLUS RARES

Avec la hausse des températures (2023 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée), les hivers deviennent plus doux.

Une nouvelle étude parue dans la revue Nature confirme que, depuis les années 1980, le changement climatique a entraîné la réduction de l’accumulation de neige dans l’hémisphère nord. En Californie, par exemple, il n’est tombé que 18 cm de poudreuse lors de la première neige de la saison, soit 25 % de moins que la moyenne historique.

« Les épisodes neigeux sont moins nombreux dans le monde en raison de la hausse des températures », explique Liz Bentley, directrice générale de la Royal Meteorological Society.

Avec le réchauffement climatique, la probabilité qu’il neige diminue et « il faut monter plus haut en montagne pour en trouver ».

Si nous ne limitons pas nos émissions de gaz à effet de serre, « une grande partie de la planète connaîtra des hivers sans neige d’ici 2100 », prévient Andrew Schwartz, scientifique en chef du Central Sierra Snow Laboratory à l’université de Californie de Berkeley.

Cette diminution des chutes de neige pourrait devenir une cause, et non pas simplement une conséquence, du changement climatique. En l’absence de neige, les paysages plus sombres absorbent davantage la lumière du soleil, ce qui accroît le réchauffement climatique.

DES CONDITIONS PLUS EXTRÊMES 

Pour qu’il neige, l’air doit être humide et froid, explique Andrew Schwartz. Deux conditions sur lesquelles influe le changement climatique : plus la planète se réchauffe, plus l’atmosphère est humide.

« À chaque fois que la température de l’atmosphère augmente d’un degré Celsius, cette dernière retient 7 % de vapeur d’eau en plus », poursuit le scientifique.

« Quand elle est humide, elle l'est plus qu'avant ; quand elle est sèche, elle l'est davantage également », ce qui crée de fortes variations entre les extrêmes, observe James Screen, climatologue à l’université d’Exeter.

Les tempêtes de neige seront aussi moins fréquentes, mais « plus importantes, car l’air sera plus humide », ajoute Andrew Schwartz.

Certaines personnes pourraient être tentées de démontrer, par ces phénomènes neigeux extrêmes, que le changement climatique n’existe pas, avertit-il avant de préciser qu’il s’agit en réalité « d’une conséquence de celui-ci ».

DES EFFETS SUR LA FAUNE

Si nous avons de la pluie à la place de la neige et qu’il gèle ensuite, des animaux comme les rennes et les caribous risquent de ne pas pouvoir accéder à la végétation dont ils se nourrissent.

Les espèces qui revêtent un pelage blanc pour se fondre dans les paysages enneigés l’hiver, à l’instar du lièvre d’Amérique et des harfangs des neiges, seraient plus vulnérables face aux prédateurs. Quant aux ours blancs et aux chauves-souris à nez tubulaire, ils seraient confrontés à une crise du logis, ne pouvant plus construire leur tanière dans la neige.

Toutes les espèces ne seront pas capables de s’adapter ou de se déplacer vers des climats plus enneigés, ce qui veut dire que « certaines d’entre elles disparaîtront », constate Liz Bentley.

DES INCENDIES PLUS IMPORTANTS

Lorsque la température de l’air augmente, les arbres libèrent de l’eau dans l’atmosphère par un processus appelé « évapotranspiration ». S’il a peu neigé pendant l’hiver, le sol ne peut remplacer l’humidité perdue. Les forêts sont alors plus vulnérables au stress thermique et la probabilité que de violents incendies se produisent augmente.

« Si un incendie se déclenche, il va très vite se propager et tout brûler sur son passage », explique Andrew Schwartz.

Un sol recouvert de neige jusqu’au début de l’été permet d’éviter cela. L’hiver 2022-2023, le plus froid enregistré par le Central Sierra Snow Lab, a été suivi par une saison des incendies très courte.

DES RESSOURCES EN EAU MOINDRES 

La baisse des chutes de neige est « problématique » pour les humains, « car nos réserves d’eau proviennent en grande partie [de la neige] », analyse Andrew Schwartz. Environ 1,9 million d’individus dépendent de l’accumulation de neige et des glaciers pour leur approvisionnement en eau potable.

La neige tombée en montagne constitue un réservoir naturel. Comme elle fond lentement en formant des ruisseaux, cela fournit de l’eau au printemps et en été. À l’inverse, l’eau de pluie s’écoule immédiatement en aval et peut être perdue.

Alors que nos infrastructures ont tendance à être conçues autour de l’eau stockée sous la forme de neige chaque hiver, « il devient de plus en plus difficile de gérer cette ressource lorsque la quantité de neige varie fortement d’une année sur l’autre », souligne Andrew Schwartz.

À QUOI RESSEMBLERONT NOS HIVERS ?

« Nous n’avons pas encore la réponse à cette question », reconnaît Liz Bentley. Si les chercheurs peuvent faire des prévisions, il existe cependant de nombreuses incertitudes, notamment en ce qui concerne les points de basculement irréversibles liés au changement climatique, et il n’est pas possible de toutes les anticiper.

La réduction des ressources en eau aura une incidence sur les agriculteurs, ce qui créera des tensions entre ceux qui dépendent de l’agriculture comme moyen de subsistance et les communautés qui ont besoin de cette eau pour vivre. Elle pourrait aussi provoquer des déplacements massifs de populations. « S’il n’y a plus d’eau, les gens iront là où ils en trouveront », indique Andrew Schwartz.

Mesurer et comprendre les effets d’une accumulation de neige réduite est essentiel pour « s’assurer que nous gérons chaque goutte d’eau aussi judicieusement que possible », ajoute-t-il.

« Nous ne pouvons pas créer de la neige par magie » à grande échelle », déclare James Screen. S’adapter à cette nouvelle réalité, par exemple en construisant des usines de désalinisation, en préparant les systèmes de distribution de l’eau à recevoir davantage d’eau de pluie et en fabriquant de la neige artificielle pour les stations de ski, sera coûteux.

À terme, « il faudra cesser de brûler des énergies fossiles, à savoir le pétrole, le gaz et le charbon, dépendre davantage des énergies renouvelables et adopter des moyens de transport, une alimentation et un mode de vie plus durables », détaille Liz Bentley.

« C’est une évidence, mais c’est loin d’être facile », note James Screen.

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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