Cet astéroïde est l'un des plus susceptibles de frapper la Terre

L'astéroïde, d'un rayon de 262,5 mètres, ne constitue pas une menace immédiate pour notre planète. Mais dans des centaines d'années, il y a une (petite) chance que Bénou s'écrase sur Terre.

De Michael Greshko
Publication 25 oct. 2021, 14:38 CEST
Bennu

Bien que le risque reste faible, les scientifiques de la NASA ont découvert que l'astéroïde Bénou, visible ici, a plus de chances que prévu de frapper la Terre au cours des 300 prochaines années.

Visualization By Kel Elkins, NASA Goddard Space Flight Center

Pendant des centaines de millions d'années, un agrégat de gravats cosmiques nommé Bénou a orbité autour du Soleil dans un isolement relatif. L'astéroïde, d'un rayon de 262,5 mètres, ne constitue pas une menace immédiate pour notre planète. Mais dans des centaines d'années, il y a une (petite) chance que Bénou s'écrase sur Terre.

Dans une nouvelle étude publiée dans la revue scientifique Icarus, les scientifiques ont utilisé les données collectées par le vaisseau spatial OSIRIS-REx de la NASA pour effectuer un calcul précis de l'orbite de Bénou et de ses futures trajectoires. Les chercheurs ont ensuite analysé le risque d'impact entre aujourd'hui et l'an 2300. L'étude révèle une probabilité de 1 sur 1 750 d'une future collision au cours des trois prochains siècles, une probabilité légèrement supérieure à celle estimée précédemment.

Presque toutes les rencontres les plus risquées avec Bénou se produiront à la fin des années 2100 et au début des années 2200, l'impact le plus probable ayant été calculé pour l'après-midi du 24 septembre 2182. Ce mardi là, Bénou aura environ 1 chance sur 2 700 de frapper la Terre. 

L'équipe, dirigée par Davide Farnocchia, ingénieur en navigation au Jet Propulsion Laboratory de la NASA, a fait cette estimation en calculant la distance séparant Bénou de la Terre à 210 mètres près, et ce à des dizaines de reprises entre 2019 et 2020. Ce niveau de précision revient à mesurer la distance entre l'Empire State Building et la Tour Eiffel à quelques millimètres près.

« Bénou est de loin l'astéroïde le mieux caractérisé du système solaire », souligne le planétologue de l'Université d'Arizona, Dante Lauretta, chercheur principal d'OSIRIS-REx et auteur principal de l'étude. « Nous savons où cela se passera à quelques mètres près. Aucun autre objet du système solaire n'a ce niveau de fidélité à son orbite, pas même la Terre ! »

La planétologue Amy Mainzer de l'Université de l'Arizona, experte des astéroïdes géocroiseurs qui n'a pas pris part à l'étude, a salué les calculs de l'équipe : « Si vous voulez pouvoir prédire où [un astéroïde] s'aventurera dans le futur, cette prédiction est entièrement déterminée par votre capacité à mesurer sa distance actuelle », relève-t-elle. « Cette équipe a réalisé une mesure extrêmement précise. »

Malgré les risques d'impact légèrement plus élevés, les risques liés à Bénou ne devraient empêcher personne de dormir la nuit. Il y a plus de 99,9 % de chances que Bénou n'atteigne pas la Terre au cours des trois prochains siècles, et un impact potentiel ne provoquerait pas une extinction massive comme l'impact de l'astéroïde qui participa à l'extinction des dinosaures non-aviaires il y a 66 millions d'années. Cet astéroïde faisait probablement 9,65 kilomètres de diamètre ; Bénou mesure moins de 500 mètres de diamètre en moyenne.

Ceci étant, une collision avec Bénou serait bien sûr dévastatrice à l'échelle régionale. Un impact de cet ampleur serait comparable à l'explosion de plus de 1,1 milliard de tonnes de TNT, environ deux millions de fois l'énergie de l'explosion dévastatrice du port de Beyrouth, au Liban, l'an dernier.

 

LOCALISER UN ASTÉROÏDE

Depuis la découverte de Bénou en septembre 1999, les astronomes ont soigneusement suivi l'orbite de l'astéroïde avec des télescopes au sol, y compris l'emblématique radiotélescope d'Arecibo, aujourd'hui démantelé. Ces données ont permis aux astronomes de prédire avec une certaine précision la position future de Bénou au cours du prochain siècle.

Bénou est classé comme un « astéroïde potentiellement dangereux », ce qui signifie que cet objet cosmique mesure plus de 140 mètres de large et se trouve à une distance minimale de 7 480 000 kilomètres de l'orbite terrestre. Une étude de 2014 a révélé que l'astéroïde avait environ 0,037 % de chances d'entrer en collision avec la Terre entre 2175 et 2199.

Mais jusqu'à présent, les simulations avaient posé problème au-delà de septembre 2135. Les prédictions précédentes avaient révélé que Bénou passerait à une distance comprise entre 120 000 à 530 000 kilomètres de la Terre en 2135, amenant peut-être l'astéroïde plus près de la Terre que la Lune. Bénou n'aurait alors pratiquement aucune chance de toucher la Terre, mais selon le moment et l'endroit précis où Bénou se rapprochera, la gravité de notre planète pourrait modifier suffisamment l'orbite de l'astéroïde pour le placer sur une trajectoire de collision.

Des simulations informatiques ont identifié les régions spatiales que Bénou devra traverser pour entrer en contact avec notre planète. La question clé est de savoir si la trajectoire réelle de Bénou en 2135 passera par l'un de ces « trous de serrure », qui vont de plusieurs centaines de mètres à quelques kilomètres de large. Pour répondre à cette question, les scientifiques doivent tracer la trajectoire actuelle de Bénou - et tout ce qui pourrait affecter sa trajectoire future - avec une précision sans précédent.

OSIRIS-REx s'est placé en orbite de Bénou fin 2018 ; c'était la première tentative de la NASA - et troisième de l'humanité - d'échantillonner la surface d'un astéroïde. Le vaisseau spatial, qui est parvenu à prélever des échantillons de la surface de Bénou en octobre 2020, est actuellement sur le chemin du retour sur Terre pour nous permettre d'étudier ces précieux matériaux. 

Parce que le vaisseau spatial a passé deux longues années à suivre l'astéroïde, Farnocchia et ses collègues ont pu utiliser les données d'OSIRIS-REx pour cartographier avec précision l'emplacement de l'astéroïde. Leur approche ressemblait à un problème de trigonométrie : si vous connaissez la distance séparant OSIRIS-REx de Bénou, et la distance séparant OSIRIS-REx de la Terre, alors vous pouvez déterminer la distance entre la Terre et Bénou.

L'équipe s'est concentrée sur les périodes où les chercheurs connaissaient la position d'OSIRIS-REx par rapport à Bénou à un mètre près, sur la base des images que le vaisseau spatial prenait de la surface de l'astéroïde. Ils ont ensuite mesuré la synchronisation des signaux radio échangés entre OSIRIS-REx et la Terre à 15 milliardièmes de seconde près.

Comprendre : le système solaire

En combinant ces données, l'équipe de Farnocchia a pu calculer la distance entre la Terre et Bénou à quelques mètres près, à des distances allant de 86 millions de kilomètres à plus de 323 millions de kilomètres.

L'équipe a également utilisé les données OSIRIS-REx pour estimer une force non gravitationnelle clé agissant sur Bénou, connue sous le nom d'effet Yarkovsky. Alors que la lumière du Soleil réchauffe la surface de Bénou, la surface de l'astéroïde réémet de l'énergie en se refroidissant. Parce que Bénou tourne, le résultat net est une poussée subtile agissant sur l'astéroïde.

L'équipe de Farnocchia est désormais en mesure de fournir une estimation précise de la façon dont l'effet Yarkovsky modifie l'orbite de Bénou au fil du temps. Lors d'un point de presse de la NASA le 11 août dernier, Farnocchia a noté que cette force était équivalente au poids de trois raisins sur Terre, ce qui est suffisant pour faire dériver Bénou d'environ 285 mètres par an.

 

UN SYSTÈME SOLAIRE TOURBILLONNANT

La nouvelle étude révèle qu'en 2135, Bénou se trouvera à environ 198 000 kilomètres de la surface de la Terre, à plus ou moins 9 650 kilomètres, des chiffres beaucoup plus précis que les estimations précédentes. Même si cette découverte exclut de nombreux trous de serrure spatiaux précédemment identifiés, d'autres - et des futures trajectoires de collision - relèvent toujours de la marge d'erreur. À partir de là, l'équipe a pu réviser ses estimations du risque de collision.

L'incertitude persistante sur la future trajectoire de la roche spatiale n'est pas liée à l'astéroïde lui-même, ni même aux données d'OSIRIS-REx. Elle est liée au reste du système solaire.

Lorsque Farnocchia et ses collègues ont effectué leurs simulations, ils ont dû tenir compte de nombreux facteurs, notamment la façon dont la lumière du Soleil chauffe Bénou et la façon dont des centaines d'autres objets du système solaire, même très éloignés comme Pluton, exercent leur gravité sur l'astéroïde. Le problème, c'est que les chercheurs ont dû estimer les masses de la plupart des objets d'un groupe clé, les 343 plus gros corps de la ceinture d'astéroïdes.

« C'est incroyable pour moi que d'autres astéroïdes puissent avoir une quelconque influence », déclare Lauretta. Une fois que les autres sources d'erreur sont suffisamment réduites, « ces effets apparaissent et vous êtes juste impressionné ».

Les missions futures devraient aider à affiner ces estimations. La prochaine mission Near-Earth Object (NEO) Surveyor de la NASA, un télescope spatial infrarouge conçu pour rechercher les signatures thermiques des astéroïdes, dont le lancement est prévu en 2026, pourra être utilisé pour estimer leur taille. Le télescope devrait découvrir des centaines de milliers d'autres astéroïdes et fournir de meilleures données sur les astéroïdes déjà observés.

« Vous voulez en savoir autant que possible sur autant d'objets que possible, afin d'avoir une idée raisonnable de ce qui est susceptible de se produire », explique Mainzer, l'enquêteur principal du NEO Surveyor.

Mainzer et Lauretta ajoutent que l'envoi de plus de vaisseaux spatiaux vers plus d'astéroïdes sera indispensable. En septembre 2023, le vaisseau spatial OSIRIS-REx survolera la Terre, déposera une capsule remplie d'échantillons de Bénou dans le désert de l'Utah et poursuivra son voyage à travers le système solaire. Jusqu'à présent, l'équipe de Lauretta n'a trouvé qu'une seule cible viable pour OSIRIS-REx : l'astéroïde géocroiseur Apophis, qui s'approchera de la Terre en avril 2029.

La Terre est à l'abri d'Apophis au moins jusqu'à la fin du siècle prochain. En mettant de côté les risques qu'ils peuvent représenter pour notre planète, des mondes comme Apophis offriront aux scientifiques de nouvelles perspectives et de nouveaux terrains d'exploration, ainsi qu'un sens plus large de l'histoire du système solaire.

L'humanité a également plus d'un siècle pour continuer à surveiller Bénou, ré-estimer les risques que l'astéroïde représente pour la Terre et contrôler ces risques, si nécessaire. Les agences spatiales testent déjà des procédures et des technologies de neutralisation d'astéroïdes dangereux pour notre planète. En 2022, le vaisseau spatial DART de la NASA percutera un satellite mineur d'environ 170 mètres de large en orbite autour d'un astéroïde proche de la Terre, dans le but de modifier son orbite.

Si l'humanité est menacée par un impact d'astéroïde à l'avenir, des versions plus importantes de ces dispositifs pourraient être utilisées pour placer l'astéroïde sur une orbite sûre, à condition que nous ayons un préavis d'au moins plusieurs années avant une éventuelle collision. Pour des objets comme Bénou, qui a été découvert près de 200 ans avant tout impact potentiel, Mainzer affirme que l'humanité a « beaucoup, beaucoup, beaucoup d'options ».

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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