Perdue en mer : le mystère du dernier vol d'Amelia Earhart

L'aviatrice a disparu à bord de son avion avec son navigateur quelque part au-dessus du Pacifique au mois de juillet 1937. Plus de 80 ans plus tard, les recherches visant à retrouver sa trace restent une obsession.

De Alec Forssmann
Amelia Earhart prend la pose devant son avion, le Lockheed Electra, à bord duquel elle a ...
Amelia Earhart prend la pose devant son avion, le Lockheed Electra, à bord duquel elle a disparu en juillet 1937.
PHOTOGRAPHIE DE SZ Photo, Bridgeman, ACI

Le 2 juillet 1937, Amelia Earhart vole en direction d'une île perdue au beau milieu du Pacifique, Howland, l'un des derniers arrêts de sa tentative de tour du monde. À l'approche de ce minuscule atoll, elle entre en contact radio avec l'Itasca, une vedette de la Garde côtière américaine qui a jeté l'ancre au large d'Howland, et demande à être radioguidée vers la terre ferme.

« KHAQQ [indicatif radio du Lockheed Electra 10E, ndlr] appelle Itasca : Nous devons être au-dessus mais je ne vous vois pas… niveau de carburant faible… impossible de vous contacter par radio… nous volons à une altitude de 1 000 pieds [300 m, ndlr]. »

Dans son dernier message authentifié, Earhart indique que sa trajectoire de vol suit une bissectrice à l'île du nord-ouest au sud-est sans préciser dans quelle direction elle avance. Après cette communication reçue à 8h43, le contact radio est perdu et à ce jour, personne ne connaît la suite de son parcours.

 

UN DERNIER VOL FATAL

Earhart avait déjà gagné le cœur des ménages du monde entier grâce à ses prouesses aériennes lorsqu'elle décida, en 1937, de devenir la première femme à faire le tour du monde en avion : un voyage éprouvant de 47 000 km le long de l'équateur. Après avoir réparé les dégâts infligés par un premier essai raté au mois de mars, elle décolla finalement le 21 mai d'Oakland, en Californie, avec son navigateur Fred Noonan.

Quarante jours, 35 000 km et plus de 20 escales plus tard, le binôme arrive à Lae, sur la côte est de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Le matin du 2 juillet, Earhart et Noonan embarquent pour la partie du voyage qu'ils redoutent le plus : le tronçon qui les mènera sur l'île d'Howland, un atoll du Pacifique central. Plus de 4 000 km d'océan les sépare de cette étendue de sable qui sera leur prochain point de ravitaillement en carburant.

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    En plus d'être la première femme à avoir établi des records en vol solitaire, Earhart est également la première femme à avoir reçu la Distinguished Flying Cross, une décoration militaire qui lui a été remise par le Congrès des États-Unis en 1932 pour « héroïsme ou actes extraordinaires accomplis en vol. »
    PHOTOGRAPHIE DE Dmtri Kessel/Life/Getty Images

     

    Au bout de quelques heures de vol, alors qu'ils sont en phase d'approche finale de l'île, Earhart contacte l'Itasca par radio. Le navire reçoit ses transmissions, le signal est si puissant qu'à un moment l'opérateur radio se précipite sur le pont pour chercher l'avion d'Earhart dans le ciel mais les transmissions renvoyées par le bateau n'atteignent pas l'aviatrice et son navigateur, qui volent à présent à l'aveugle au-dessus des nuages.

    L'Electra n'atteindra jamais l'île d'Howland et les opérations massives de recherches ne trouveront aucun signe de l'avion et de son équipage disparus. Deux semaines plus tard, les États-Unis déclarent Amelia Earhart et Fred Noonan perdus en mer. Selon la thèse officielle du gouvernement américain, l'Electra, incapable d'établir un contact radio avec l'Itasca, serait tombé à court de carburant et aurait fini sa course dans l'océan.

     

    À LA RECHERCHE D'AMELIA

    Certains pensent que cette photographie prise sur l'atoll de Jaluit, au sud des îles Marshall, serait celle d'Earhart et Noonan en 1937. L'image a depuis été datée à 1935.
    PHOTOGRAPHIE DE U.S. National Archives

    Au cours des 15 dernières années, plusieurs expéditions ont été lancées pour tenter de localiser l'épave de l'avion. Avec l'étude des dernières transmissions de l'équipage et les calculs effectués d'après les données connues sur les réserves de carburant de l'Electra, les chercheurs ont réussi à restreindre la zone de recherche à une superficie de 1 600 km². Certains pensent qu'Earhart et Noonan sont allés vers le nord et les îles Marshall où ils se seraient écrasés et auraient été capturés par les Japonais qui contrôlaient la zone à l'époque. Des témoins oculaires affirment qu'ils les ont aperçus dans un camp de prisonniers à Saipan, les preuves physiques soutenant ces témoignages restent cependant insuffisantes.

    D'autres, comme les membres de l'association TIGHAR (The International Group for Historic Aircraft Recovery) pensent que l'avion s'est dirigé vers le sud et les îles Phoenix où il aurait pu atterrir sur le récif de l'île de Nikumaroro (à l'époque l'île Gardner). Les deux aviateurs y auraient ensuite passé plusieurs jours voire même plusieurs semaines comme naufragés.

    Les membres de TIGHAR ont monté plusieurs expéditions sur l'île où ils ont découvert les restes d'un campement et divers objets. Baptisé « Seven Site », il correspond à la description de l'endroit où ont été découverts 13 os humains en 1940, alors que Nikumaroro était sous contrôle britannique. Les os avaient alors été envoyés à Fiji où deux docteurs les avaient examinés et avaient conclu qu'ils appartenaient à un homme. Par la suite, ces os ont été perdus mais le rapport a survécu.

     

    ÉTUDES RÉCENTES

    L'étude la plus récente date de juillet 2017 lorsque l'association TIGHAR et la National Geographic Society se sont associées pour envoyer sur l'île de Nikumaroro quatre chiens de détection accompagnés d'une équipe d'archéologues pour voir s'il restait des ossements non découverts. Ces chiens spécialement entraînés sont capables de signaler la présence de restes humains ou de traces d'une décomposition humaine. Dès leur arrivée à Seven Site, les chiens dont le taux de réussite est supérieur à celui des radars ont donné l'alerte mais l'équipe n'a déterré aucun ossement. Ils ont prélevé des échantillons de sol sur la zone afin de les analyser plus tard dans l'espoir d'y déceler des traces d'ADN humain.

    De nouvelles analyses menées sur les treize os découverts en 1940 pourraient par ailleurs venir étayer la théorie des naufragés. En 2018, une analyse médico-légale contredisait la conclusion de l'équipe médicale de Fiji : les os seraient ceux d'une femme dont la taille et la morphologie se rapprochent de celles d'Earhart. L'anthropologue légiste Richard Jantz a utilisé des photographies et des vêtements d'Earhart pour analyser les mesures des os. Les preuves qu'il a récoltées, affirme-t-il, « soutiennent fermement la conclusion que les os de l'île de Nikumaroro sont ceux d'Amelia Earhart » ou alors qu'ils « appartiennent à quelqu'un qui lui ressemblait beaucoup. »

    Toujours en 2018, l'association TIGHAR publiait un article dans lequel elle analysait les transmissions radios de la nuit où l'Electra avait disparu. En juillet 1939, plusieurs auditeurs radios dans des lieux aussi éloignés que Saint-Pétersbourg en Floride ou Toronto au Canada déclaraient avoir entendu les appels de détresse d'une femme. TIGHAR pense que cette voix était celle d'Amelia Earhart et leur article explique comment ces transmissions auraient pu parcourir d'aussi grandes distances.

    Amelia Earhart dans le cockpit de son avion, le Lockheed Electra, avant qu'il ne disparaisse en 1937.
    PHOTOGRAPHIE DE Getty Images

    Earhart plaisantait souvent sur son voyage autour du monde en disant qu'elle l'entreprenait « juste pour s'amuser », mais les recherches pour comprendre son destin tragique sont aujourd'hui très sérieuses, et ce, depuis plus de 80 ans. Le jour où Earhart s'envola pour la première fois en compagnie du pilote de la Première Guerre mondiale Frank Hawks, elle prit une décision qui allait changer sa vie. « Après avoir grimpé à deux ou trois cent pieds d'altitude, je savais que je devais voler, » se remémorait-elle plus tard. Aujourd'hui, les personnes qui cherchent à résoudre le mystère de sa disparition sont aussi déterminées qu'Amelia l'était à voler.

     

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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