Quelles étaient les règles de la séduction à l’époque des Bridgerton ?

Au début du 19e siècle, période où prennent place les romans de Jane Austen mais également la série Netflix Les Chroniques de Bridgerton, les rencontres amoureuses étaient autant affaire de romantisme que de pragmatisme.

De Parissa DJangi
Publication 13 mai 2024, 11:33 CEST
Les entreprises de séduction suivaient un code précis lors de la London Season, période à laquelle ...

Les entreprises de séduction suivaient un code précis lors de la London Season, période à laquelle les célibataires les plus en vue de la haute société britannique se rendaient à Londres dans l’espoir d’y trouver une partenaire. Les couples de la Régence jaugeaient notamment leur compatibilité en s’envoyant des lettres.

PHOTOGRAPHIE DE Ashmolean Museum, Bridgeman Images

Faire la cour : voilà le sujet des romans de Jane Austen, d’amourettes historiques et de séries populaires comme Les Chroniques des Bridgerton sur Netflix.

Des premiers frémissements aux vœux définitifs devant l’autel, l’art de faire la cour durant la Régence anglaise, période qui dura de 1811 à 1820, était pour les hommes qui se mettaient en quête d’une femme à épouser autant affaire d’amour que de bons comptes.

Qu’impliquait exactement l’art de faire la cour ? Voici les étapes que les hommes et les femmes de la Régence devaient suivre pour se séduire dans les règles de l’art.

 

ÉTAPE 1 : ENTREZ SUR LE MARCHÉ DU MARIAGE

Durant la Régence, période de l’époque georgienne, le mariage n’était pas qu’une étape de l’âge adulte ; « c’était le fondement de la société ». « C’était le lieu d’où […] les positions de statut étaient reproduites et pérennisées », explique Sally Holloway, enseignante-chercheuse à l’Université Brookes d’Oxford et autrice de The Game of Love in Georgian England : Courtship, Emotions, and Material Culture.

Pour les familles de l’élite, la London Season était l’occasion idéale de trouver de potentiels partenaires, car alors tout le monde était en ville. La Saison durait de l’hiver au printemps quand le Parlement siégeait à Londres. La haute société profitait de son séjour dans la capitale pour voir et se faire voir à l’occasion d’un tourbillon sans fin de bals, d’assemblées, de dîners et de divertissements.

De la sorte, la Saison faisait office de « marché du mariage » pour l’élite.

 

ÉTAPE 2 : FRÉQUENTEZ LES BONNES PERSONNES

Selon Sally Holloway, lors du long 18e siècle, l’âge moyen auquel on se mariait était de 24 ans pour les femmes et de 26 ans pour les hommes.

Lorsque l’on était prêt à se mettre en quête d’un époux ou d’une épouse, les bals et les assemblées de la London Season créaient d’excellentes occasions de rencontrer d’autres personnes. La meilleure scène sur le marché du mariage était sans doute l’Almack’s Assembly Rooms, où certains des célibataires les plus convoités de la société venaient danser et socialiser. Le capitaine Rees Howell Gronow, chroniqueur de la Régence, qualifia même l’Almack’s de « septième ciel du monde chic ».

Pour qui souhaitait faire la cour à Londres à l’époque de la Régence, l’Almack’s Assembly Rooms était le centre du monde. Ce club exclusif permettait à ceux jouissant de la richesse, des contacts et du rang nécessaires de participer à ses bals.

PHOTOGRAPHIE DE Look and Learn, Peter Jackson Collection, Bridgeman Images

Un cénacle de dames de la haute société faisait office de marraines de l’Almack’s et choisissaient qui entrait dans le club et qui n’y entrait pas. Ces dernières étaient notoirement pointilleuses. Bougon, Rees Howell Gronow souligne que « les sourires et les froncements de sourcils des patronnesses condamnaient hommes et femmes au bonheur ou au désespoir ».

En acceptant uniquement des candidats triés sur le volet jouissant d’une certaine fortune, d’un certain réseau et d’un certain rang, les marraines créaient un espace exclusif où les familles en vue pouvaient faire en sorte que leurs fils et leurs filles rencontrent des partenaires potentiels de bonne extraction.

 

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    ÉTAPE 3 : FAITES LA PAIRE

    Les familles en vue souhaitaient que leurs fils et leurs filles épousent une personne à la fortune et au rang égaux, mais ce n’étaient pas les seules considérations.

    « Durant ces décennies, on célébrait grandement l’amour romantique. On cherchait à se marier pour l’argent, mais aussi, dans l’idéal, pour l’amour, avec quelqu’un qui nous offrirait une relation durable, heureuse et aimante », explique Sally Holloway.

    La compatibilité était cruciale dans un monde où le divorce était rare. « Pour divorcer, il fallait l’aval du Parlement. Une fois que vous vous étiez marié, c’était fini. Il était donc particulièrement important de faire le bon choix, car votre bonheur en dépendait », ajoute-t-elle.

     

    ÉTAPE 4 : DONNEZ AUX SENTIMENTS LE TEMPS DE SE DÉVELOPPER

    Une fois son dévolu jeté, la cour pouvait commencer. Un homme demandait la permission de commencer à courtiser, et la femme avait le droit d’accepter ou de refuser.

    Selon Sally Holloway, en général, on se faisait la cour pendant un à deux ans. Durant cette période, un couple apprenait à se connaître par le biais d’un éventail d’activités. Un homme pouvait souper en compagnie de celle sur qui il avait jeté son dévolu et de sa famille, ou bien le couple pouvait aller marcher en compagnie d’un chaperon dont la présence préservait la vertu de la jeune femme.

    En effet, les règles régissant la façon dont un couple pouvait interagir au début d’une relation protégeaient les femmes d’une familiarité ou d’une promiscuité prématurée. Les couples ne s’appelaient pas immédiatement par leur prénom, par exemple, et une femme ne pouvait poursuivre un homme de ses assiduités ; c’était à l’homme de faire le premier pas, mais les amis et proches d’une femme pouvaient tout à fait l’y encourager.

     

    ÉTAPE 5 : SOYEZ UN BON CORRESPONDANT

    Lorsque les choses devenaient plus sérieuses mais que l’on cherchait encore à évaluer sa compatibilité, on s’écrivait des lettres. C’était particulièrement vrai en ce qui concerne les personnes qui vivaient loin l’une de l’autre. « Il s’agissait principalement de construire un lien », indique Sally Holloway.

    L’envoi et la réception de lettres servait également de test d’intention. « Il était important d’être un correspondant fiable, car cela montrait que vous étiez un partenaire fiable dans la vie. »

     

    ÉTAPE 6 : OFFREZ DES PRÉSENTS APPROPRIÉS

    Les cadeaux constituaient une part cruciale de l’art de faire la cour : on s’offrait aussi bien des livres et des parfums que des présents hautement symboliques tels que des bagues.

    Offririez-vous à votre cher et tendre un portrait encadré de votre œil ? À la fin du 18e siècle, il n’était pas rare que les couples britanniques s’échangent de tels présents. Mais le plus grand cadeau qu’on ait pu alors s’offrir était une mèche de cheveux, un symbole d’amour éternel.

    PHOTOGRAPHIE DE Christie's Images, Bridgeman Images

    Parmi les plus précieux de ces cadeaux : les cheveux. « Une mèche de cheveux était un présent physique extraordinairement intime, car vous donniez littéralement une partie de votre corps à une autre personne. Les cheveux ne se décomposent jamais, c’est donc un symbole d’amour éternel », explique Sally Holloway.

    « Dans les lettres, on se racontait qu’on prenait des mèches de cheveux avec soi au lit, qu’on les embrassait, qu’on leur parlait comme s’il s’agissait de l’être aimé absent. »

    Il était important que les cadeaux soient offerts au bon moment. « On ne commence pas à se faire la cour en offrant directement une mèche de cheveux à quelqu’un », observe Sally Holloway.

    De plus, ces présents devaient être en bon état. On n’imagine pas un homme offrir des fleurs en train de faner à une femme ou bien des aliments gâtés, car cela aurait pu indiquer de la négligence.

     

    ÉTAPE 7 : NÉGOCIEZ LES TERMES DU MARIAGE

    La dernière étape de ce processus était les fiançailles, moment où l’on s’attelait à la négociation d’un contrat de mariage. Un contrat de mariage prévoyait les termes légaux du mariage : héritage, allocation versée à l’épouse et provisions en cas de veuvage.

    Les fiançailles apportaient davantage de sécurité, et permettaient potentiellement davantage de promiscuité. « Dès que des fiançailles étaient considérées comme assurées, il pouvait y avoir une période où l’on s’accordait une plus grande liberté sexuelle », explique Sally Holloway. Selon elle, une mariée sur trois a pu se trouver enceinte au moment de son mariage.

     

    DURANT TOUTE LA PÉRIODE NUPTIALE : ÉVITEZ LE SCANDALE

    L’une des principales menaces pour toute entreprise de séduction était le scandale.

    Le scandale se présentait sous différentes formes : un homme qui abandonnait une femme devant l’autel ; une femme qui s’enfuyait avec un amant ; un couple non fiancé surpris dans une étreinte intime. Mais l’issue était la même : un commérage qui nuisait au nom d’une famille ou au rang d’une personne dans la société.

    Les fugues amoureuses donnaient lieu à d’importants ragots. Gretna Green, village situé juste après la frontière écossaise et qui n’était pas soumis aux lois anglaises sur le mariage, était une destination populaire pour ces fugues. Gretna Green était le Las Vegas de son époque, une destination à la mode pour les mariages rapides et clandestins.

    Le scandale pouvait avoir des répercussions financières. « Si un homme quittait une femme après avoir promis de l’épouser, elle pouvait le poursuivre en justice et réclamer une compensation financière pour avoir négligé ses sentiments », explique Sally Holloway.

    Heureusement, la majorité des relations n’aboutissaient pas au scandale. La cour menait à l’autel, où les jeunes mariés entamaient un nouveau chapitre de leur vie en tant qu’époux.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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