Krampus, le "diable de Noël" qui a conquis les États-Unis

Cette créature mi-chèvre mi-démon issue du folklore autrichien a ces dernières années conquis les Américains.

De Becky Little
Publication 21 déc. 2023, 10:39 CET
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Un homme déguisé en Krampus participe à une parade à Kaplice, en République tchèque, en 2014. Ce personnage, qui existe depuis des siècles, est récemment devenu populaire aux États-Unis.

PHOTOGRAPHIE DE David W. Cerny, Reuters

Krampus, pendant effrayant de Saint-Nicolas, punit les enfants qui n’ont pas été sages en les frappant ou en les emmenant dans son antre ou pire, en Enfer. Ce monstre a déjà été la vedette d’une bande dessinée, le personnage central de plusieurs films et de nombreuses fêtes et parades aux quatre coins des États-Unis. 

Pourquoi Krampus est-il soudainement devenu si populaire dans un pays où il n’a jamais vraiment existé ? Monte Beauchamp, directeur artistique, graphiste et spécialiste du Krampus, pense que le mérite lui revient. Après avoir découvert Krampus sur des cartes postales datant des 19e et 20e siècles qu’un collectionneur lui avait montrées, Monte en a publié certaines dans deux numéros de son magazine Blab!, avant de sortir deux livres de cartes de Krampus, en 2004 et 2010.

Peu de temps après la sortie de son premier livre, Monte Beauchamp a reçu un appel du directeur d’une galerie de Santa Monica, en Californie, qui souhaitait monter une exposition d’interprétations artistiques de cartes de Krampus.

« Ce fut une telle réussite qu’il m’a proposé d’être conservateur pour les expositions sur Krampus », raconte-t-il.

Au même moment, un ami de Monte Beauchamp mettait sur pied un club de théâtre dédié à Krampus à Los Angeles. Et « ça a commencé à faire boule de neige », se souvient-il. Depuis, le graphiste a été contacté par la série Supernatural, l’équipe derrière la vidéo A Krampus Carol réalisée par Anthony Bourdain et d’autres personnes souhaitant obtenir l’autorisation d’utiliser les images de Krampus figurant dans ses livres.

Krampus existe donc... mais d’où vient-il ?

 

GRUSS VOM KRAMPUS

Krampus n’est pas le seul pendant maléfique de Saint-Nicolas. En Allemagne, le monstre, pourtant célébré dans certaines régions du pays, connaît aussi la concurrence de Belsnickle et Knecht Ruprecht. La France compte Hans Trapp et le Père Fouettard, tandis que les Pays-Bas ont le controversé Zwarte Piet, ou « Pierre le Noir » en français (un blackface, c’est-à-dire une personne blanche qui se maquille la peau pour caricaturer une personne noire).

Ces personnages sont apparus lors de célébrations païennes du 22 décembre, la nuit la plus longue de l’année, avant d’être repris pour Noël. Ensemble, Krampus (ainsi que ses différents pendants) et l’évêque Saint-Nicolas (une version plus austère du Père Noël américain) organisaient une sorte de journée du jugement pour les enfants, lesquels pouvaient recevoir diverses punitions (et se voir donner un morceau de charbon n’était pas la pire).

Sur cette carte viennoise datée d’environ 1911, Krampus prend au piège un enfant avec sa célèbre longue langue. Traditionnellement, il tenait dans l’une de ses mains un fagot de branches de bouleau, qu’il utilisait pour fouetter les enfants qui n’avaient pas été sages.

PHOTOGRAPHIE DE Imagno, Getty

C’est après 1899, lorsque le gouvernement autrichien a cédé le contrôle de la production de cartes postales de la nation, entraînant ainsi le développement de l’industrie, que l’image de Krampus a commencé à être utilisée par les manufacturiers. Entre cette date et la Première Guerre mondiale, des entreprises allemandes vendaient des cartes de Noël à l’effigie de Krampus en Allemagne, en Autriche et dans d’autres pays sur lesquelles figuraient les phrases suivantes : « Gruss vom Krampus » (Meilleurs vœux de la part de Krampus) ou « Brav Sein » (Sois sage).

Les cartes pour enfants consistaient en des dessins d’un Krampus terrifiant qui effrayait les enfants, les frappait ou les enlevait en les plaçant dans un sac qu’il portait dans le dos. Ces enfants étaient souvent représentés en train de crier ou de pleurer. Des cartes pour adultes ont également commencé à faire leur apparition vers 1903 ou 1904, précise Monte Beauchamp. Si le monstre punissait des adultes sur certaines, il était aussi dépeint comme un idiot kidnappant des femmes ou un prétendant.

Ces cartes pour adultes ont donc représenté Krampus de manière kitch ou ironique bien avant que les Américains organisent leur premier barathon Krampus. Selon Monte Beauchamp, fabriquer des cartes à l’effigie de Krampus pour les enfants et les adultes était sans doute un moyen pour les entreprises de vendre plus.

« En Allemagne, le marché des cartes postales était très important, raconte-t-il. Je pense que c’est pour cette raison qu’ils ont commencé à en faire avec des femmes ».

 

L’ÉVOLUTION DE NOËL

En Autriche et dans certaines régions d’Allemagne, des hommes se déguisent encore en Krampus pour effrayer les enfants lors de la Krampusnacht (la nuit de Krampus, en français), qui a lieu le 5 décembre. En revanche, pas d’enfants lors de la Krampuslauf (course de Krampus), au cours de laquelle les hommes s’enivrent avant de courir dans les rues vêtus de leurs terrifiants costumes. Aux États-Unis, la plupart des célébrations en l’honneur de Krampus consistent également à se déguiser et à boire. Des festivités qui ressemblent beaucoup à la manière dont les Américains fêtaient Noël avant que cette célébration ne devienne la fête des enfants, placée sous le signe de l’échange de cadeaux.

« Avant le 19e siècle, Noël n’était pas une fête tranquille que l’on célébrait à la maison », explique Stephen Nissenbaum, auteur du livre nommé au Prix Pulitzer et intitulé The Battle for Christmas (La bataille pour Noël). C’était plutôt des festivités endiablées. Une sorte de croisement entre Halloween, le Nouvel An et Mardi gras ».

Lors de ces premières festivités, des mummers déguisés faisaient du porte-à-porte pour demander de l’alcool et menaçaient de causer des ennuis s’ils n’obtenaient pas ce qu’ils voulaient. Les enfants participent aujourd’hui à une version édulcorée de ce défilé lorsqu’ils vont de maison en maison à la recherche de friandises à Halloween.

« C’est très intéressant de voir comment différentes fêtes peuvent se mélanger », remarque Matthews Souzis. « J’ai toujours vendu Krampusnacht comme la rencontre d’Halloween avec Noël ».

Avec l’évolution des fêtes de Noël, il n’est pas difficile d’imaginer qu’un jour, Krampus sera devenu trop tendance et trop connu pour intéresser les personnes « cool ». S’il a déjà eu droit à un film sur lui, peut-être a-t-il déjà atteint son apogée…

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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