Sierra Leone : responsables locales, elles sauvent leur ville de l'urgence climatique
La maire de la ville de Freetown, Yvonne Aki-Sawyerr, et Eugenia Kargbo ont fait équipe pour protéger les citoyens des chaleurs extrêmes.

Yvonne Aki-Sawyerr et Eugenia Kargbo photographiées par Kristin-Lee Moolman à Freetown, en Sierra Leone.
Cet article fait partie de la série de portraits National Geographic 33.
Il y a dix ans, alors que l’épidémie d’Ebola s’achevait en Sierra Leone, Yvonne Aki-Sawyerr a pris conscience d’une autre catastrophe : la disparition de la forêt tropicale humide autour de la capitale, Freetown, coupée pour fournir énergie et matériaux de construction. « Je me suis soudain rendu compte du niveau de déforestation, se rappellet- elle. J’étais en voiture, je me suis arrêtée et me suis mise à pleurer. »
De nos jours, les températures en Sierra Leone dépassent souvent 38 °C et s’accompagnent, pendant la saison des pluies, d’inondations et de glissements de terrain meurtriers. Or le pays, l’un des plus vulnérables à la crise climatique, est aussi l’un des plus pauvres, ce qui limite sa capacité à s’adapter. Yvonne Aki-Sawyerr a cherché un moyen d’agir.
Née à Freetown, elle a fait carrière dans la finance et l’immobilier à Londres, avant de revenir en Sierra Leone pour diriger la réponse nationale à l’épidémie d’Ebola. Elle a aussi mené campagne contre le commerce des « diamants du sang » [ndlr : extraits en zone de guerre] et cofondé une association caritative pour aider les femmes et les enfants déplacés par la guerre civile dans son pays.
Élue maire de Freetown en 2018, elle a nommé Eugenia Kargbo responsable de la lutte contre la chaleur – une première en Afrique – pour aider les habitants de la capitale à s’adapter aux températures de plus en plus extrêmes.
Celle-ci fera installer des auvents pour protéger les vendeuses des marchés de la ville ; elle a aussi testé des matériaux résistants à la chaleur pour protéger ceux qui vivent dans des abris en tôle ondulée. « Il y a encore beaucoup à faire, souligne la jeune femme, mais l’un des principaux problèmes reste le financement. »
Malgré les difficultés, la municipalité a fait des progrès pour redonner vie aux forêts. En cinq ans, grâce au programme Freetown the Tree Town (la « ville des arbres »), plus de 1,2 million d’arbres ont été plantés. Leur feuillage offre de l’ombre aux habitants et leurs racines protègent les quartiers des coulées de boue.
Yvonne Aki- Sawyerr se souvient que, autrefois, on enterrait le cordon ombilical des nouveau-nés avec un arbre nouvellement planté, créant un lien symbolique entre les individus et la terre. Elle croit au pouvoir de ces anciennes coutumes qui nous connectent au monde. Et espère que les générations futures pourront les redécouvrir.
Cet article a initialement paru dans le magazine National Geographic d'avril 2025. S'abonner au magazine.
