En 2024, la saison cyclonique s’annonce particulièrement active

Entre la chaleur record des océans et l'arrivée potentielle d'un phénomène La Niña, la saison 2024 réunirait les « conditions idéales » pour la formation d'ouragans majeurs.

De Kieran Mulvaney
Publication 15 mars 2024, 19:08 CET
En 2018, l'ouragan Florence a atteint la catégorie 4 après avoir survolé une zone d'eau chaude de ...

En 2018, l'ouragan Florence a atteint la catégorie 4 après avoir survolé une zone d'eau chaude de l'océan Atlantique. D'après les spécialistes, la saison 2024 devrait être particulièrement active, la faute aux températures océaniques exceptionnellement élevées et à la présence d'un phénomène climatique La Niña.

PHOTOGRAPHIE DE Alexander Gerst, NASA

Deux mois et demi avant l'entrée officielle dans la saison cyclonique 2024 et près de six mois avant son habituel apogée, les météorologistes prévoient déjà une saison particulièrement active.

Pour l'heure, aucun modèle ne peut encore émettre de prévision officielle, mais les experts contactés par National Geographic sont formels : les températures de surface élevées de l'océan Atlantique et le développement d'un phénomène La Niña dans le Pacifique pourraient bien créer le « mélange parfait » de conditions nécessaires aux ouragans majeurs. De son côté, la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) ne publiera aucune prévision officielle avant le 23 mai.

 

COMMENT SE FORME UN OURAGAN ?

La formation d'un cyclone tropical, également appelé ouragan ou typhon selon sa localisation, repose sur deux éléments : la présence d'eaux de surface chaudes et l'absence de cisaillement vertical.

Comme nous l'explique Alex DaSilva, prévisionniste des ouragans pour AccuWeather, le cisaillement vertical se produit lorsque le vent change de direction et de vitesse à différentes altitudes dans l'atmosphère. Ce phénomène affecte les cyclones tropicaux, poursuit-il, car ces tempêtes « ont besoin d'une structure nuageuse haute et droite dans l'atmosphère. Cependant, lorsque le cisaillement est important et que les vents varient fortement avec l'altitude, ils dispersent ces nuages et les empêchent de grandir à la verticale, faisant ainsi obstacle à l'intensification des systèmes tropicaux. »

Les ouragans ont également besoin d'une eau de surface à la température minimale de 26 °C. La chaleur de l'eau et de l'air sus-jacent alimente la tempête ; en remontant, l'air chaud crée un système de basse pression à la base de l'ouragan dans lequel s'engouffre encore plus d'air chaud, ce qui permet au système de poursuivre sa croissance.

Cela dit, l'intensité d'une tempête dépend davantage de la température des 100 premiers mètres de profondeur, indique Matt Rosencrans du Climate Prediction Center de la NOAA.

« Si la masse d'eau n'est pas très profonde, le phénomène risque d'entraîner une remontée d'eau froide. En revanche, si elle offre un vaste réservoir d'eau chaude, la tempête continuera de puiser cette eau », explique-t-il.

 

CHALEUR RECORD

Officiellement, la saison cyclonique débute le 1er juin et prend fin en novembre, avec un pic d'intensité d'août à octobre. Si les prévisionnistes anticipent déjà une saison particulièrement active, c'est parce que les températures de surface de l'Atlantique atteignent déjà des records de chaleur.

« Les températures de surface dans la zone dite de développement majeure de l'Atlantique, située entre l'Afrique et l'Amérique Centrale, sont actuellement 1,2 °C au-dessus des normales », indique Rosencrans. « C'est un chiffre record pour février. »

Ainsi, si ces eaux poursuivent leur réchauffement au rythme habituel à mesure que l'année s'écoule, les tempêtes auront à leur disposition une vaste source d'énergie. 

Pendant ce temps, un autre facteur majeur pouvant affecter la saison cyclonique commence à prendre forme à des milliers de kilomètres de là, dans l'océan Pacifique.

 

L'IMPACT DE LA NIÑA

Sur une période allant de trois à sept ans, les eaux de la partie est et centrale de l'océan Pacifique sud se réchauffent et se refroidissent en alternance sous l'effet d'un phénomène climatique récurrent appelé El Niño–Oscillation australe (ENSO). Pendant un phénomène El Niño, les températures de surface de l'est du Pacifique augmentent et cette augmentation affecte la trajectoire du courant-jet Pacifique, qui apporte alors un climat plus sec et plus chaud dans le nord des États-Unis et le Canada, mais des conditions plus humides sur la côte du Golfe et le sud-est des États-Unis.

El Niño réduit également le risque de formation d'ouragan au-dessus de l'Atlantique, car le phénomène génère davantage de cisaillement et supprime l'activité cyclonique.

La Niña entraîne l'effet opposé, réduisant le cisaillement et favorisant donc la formation des ouragans.

Durant la saison 2023, l'ENSO était en phase El Niño. L'évolution de la température océanique et d'autres indices suggèrent fortement que l'ENSO aura atteint une phase « neutre » au début de la saison cyclonique 2024, mais à l'arrivée du pic d'activité, le phénomène aura probablement basculé dans une phase La Niña.

« Le rythme auquel se produit cette transition peut également affecter l'ensemble », indique DaSilva. « Il y a un temps de latence, l'effet maximal met parfois deux ou trois mois à s'installer. De ce fait, si la transition est attendue pour le milieu de l'été, il faudra peut-être attendre la fin de l'été ou l'automne pour observer ses effets à travers le bassin Atlantique. » 

Par conséquent, ajoute-t-il, la saison cyclonique de cette année pourrait se montrer particulièrement active bien après début novembre.

Quant à savoir ce que les spécialistes entendent par saison active, même s'il est encore tôt pour formuler des prévisions, DaSilva indique qu'une saison classique comporte en moyenne 14 tempêtes tropicales dans l'Atlantique, dont 7 atteignent la catégorie d'ouragan ; l'année dernière, alors que les eaux de l'Atlantique étaient chaudes mais que le phénomène El Niño produisait des conditions défavorables de cisaillement, il y a eu 20 tempêtes et 7 ouragans.

Bien entendu, aucune prévision à long terme ne peut anticiper le moment où se formera une tempête ou la trajectoire qu'elle empruntera, mais DaSilva recommande aux populations vivant dans les zones exposées aux ouragans, notamment les Caraïbes et le golfe du Mexique, de se préparer.

« Si un système de tempête tropicale se présente dans cette région, il pourrait s'intensifier rapidement et potentiellement à proximité des terres », prévient-il. « C'est pourquoi il est préférable de rester en alerte et de préparer un plan en cas d'ouragan. Avec ce genre de conditions, n'importe quel système peut exploser très rapidement, c'est pourquoi nous sommes inquiets. »

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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