Ces quatre espèces de thons ne sont plus en danger d'extinction

L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a revu sa liste rouge, et à la surprise des scientifiques, deux espèces de thon rouge, une espèce de thon jaune et une espèce de thon blanc ne sont plus « en danger critique » d'extinction.

De Jason Bittel
Publication 6 sept. 2021, 16:24 CEST
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Un banc de thon rouges au large de la Sardaigne. La population s’est largement rétablie grâce à la fin de la surpêche.

PHOTOGRAPHIE DE NORBERT WU/ MINDEN PICTURES, Nat Geo Image Collection

Dans ce monde que le dérèglement climatique incendie et inonde, des chercheurs ont une bonne nouvelle à annoncer : plusieurs espèces de thon ne sont plus au bord de l’extinction.

Deux espèces de thon rouge, une espèce de thon jaune et une espèce de thon blanc ne sont plus « en danger critique », selon la terminologie de l’UICN. Et certaines ont même complètement disparu de la liste rouge établie par l’organisation.

Cette réhabilitation rapide est due aux efforts faits ces dix dernières années pour mettre fin à la surpêche. Mais les thons ne sont pas les seuls animaux que la communauté scientifique étudie au Congrès mondial de la nature de l’UICN qui se tient en ce moment à Marseille. Les chercheurs restent toutefois prudents, car il y a encore de nombreuses espèces en péril. Par exemple, plus d’un tiers des requins du monde sont toujours menacés d’extinction à cause de la surpêche, de la destruction des habitats, et du dérèglement climatique.

« Je pense que la bonne nouvelle est que la pêche durable est faisable », se réjouit Beth Polidoro, océanologue à l’Université d’État de l’Arizona. « On peut manger du poisson de manière durable sans en épuiser les populations jusqu’à l’effondrement où à l’extinction. »

Dans le même temps, elle prend soin d’avertir que cette rétrogradation favorable sur la liste rouge ne doit pas être une incitation à lever les quotas et à pêcher du poisson n’importe comment.

« Il faut que nous continuions à faire ce qui fonctionne », déclare-t-elle.

L’UICN, qui classe les espèces les plus menacées sur sa célèbre liste rouge et compte parmi ses rangs plus de 16 000 experts du monde entier, a annoncé lors du congrès que certains animaux faisaient leur entrée dans le classement. Le varan de Komodo en est un exemple remarquable.

Beth Polidoro fait partie depuis près de vingt ans d’un groupe de spécialistes mandatés par l’UICN pour établir un diagnostic concernant le statut de plus de soixante espèces de de thon et de marlins. En 2011, son équipe avait annoncé ses premières découvertes concluantes et révélé que de nombreuses espèces de thon commercialisées étaient sur le point de disparaître.

Dix ans plus tard, elle se dit surprise de voir que tant de progrès ont été faits.

Selon les dernières données, la situation du thon rouge de l’Atlantique (Thunnus thynnus), autrefois « en danger », est désormais moins inquiétante. C’est aussi le cas pour le thon jaune (Thunnus albacares) et pour le thon blanc (Thunna alalunga), espèces « quasi menacées » la dernière fois qu’on les avait diagnostiquées. 

Le statut du thon rouge du Sud (Thunnus maccoyii) a lui aussi connu une amélioration : d’espèce « en danger critique » il a été rétrogradé à espèce « en danger ». Le thon obèse (Thunnus obesus) reste quant à lui « vulnérable », et la bonite à ventre rayé (Katsuwonus pelamis) conserve son grade de « préoccupation mineure ».

 

LA SCIENCE AU SECOURS DE LA MER

La plupart des gens n’envisagent le thon que comme un plat. Ces poissons sont pourtant des créatures à part entière, titanesques et merveilleuses.

La vie d’un thon rouge de l’Atlantique commence dans un œuf pas plus épais qu’une carte de crédit. Mais en l’espace de dix ans, il peut atteindre une taille de 1,80 mètre et un poids de plus de 250 kilogrammes. Le thon est un prédateur redoutable qui file dans l’océan à la vitesse de 65 kilomètres par heure environ et avale ses proies d’une seule bouchée (quelles qu’elles soient, pourvu qu’elles rentrent dans son gosier).

Malgré sa puissance, cette espèce de thon qui ferait passer un joueur de football américain pour un nain ne fait pas le poids face aux techniques de pêche moderne. Instaurée dans les années 1970, la pêche à la palangre, qui consiste à traîner des hameçons à l’arrière d’un bateau, a décimé les thons rouges de l’Atlantique qui se retrouvaient dans le golfe du Mexique chaque année pour se reproduire. Au même moment, la pêche à la senne ramassait à grands coups de filet les spécimens plus jeunes qui se nourrissaient la côte est des États-Unis.

Cependant, d’après Beth Polidoro, la réduction des quotas de pêche et leur application effective a permis à l’espèce de revenir. Les données de meilleure qualité qui ont été récoltées ont également permis d’établir des diagnostics plus précis et de prendre des décisions plus appropriées.

Quelques exceptions subsistent toutefois. Après tout, les thons peuplent de vastes étendues dans les océans du globe et se rendent dans des régions différentes suivant la période de leur vie dans laquelle ils se trouvent. Cela complique d’autant plus la gestion de leurs populations. 

« Le thon jaune de l’océan Indien représente un grand trou noir en quelque sorte, » concède Beth Polidoro. « Nous ne sommes pas vraiment certains du statut de l’espèce dans cette région, mais elle semble victime de surpêche. »

Toujours selon elle, les populations de thon rouge dans l’ouest de l’Atlantique ont subi un déclin similaire à partir des années 1970 et ne s’en sont toujours pas remises.

Thons rouges dans une senne au sud de Malte, photographiés avec un drone sous-marin (2019).

PHOTOGRAPHIE DE Ifremer

UNE LUEUR D'ESPOIR POUR LES VARANS DE KOMODO

Un des autres événements de ce Congrès mondial de la nature, c’est le changement de statut du varan de Komodo (Varannus komodoensis). Un changement pour le pire, contrairement au thon.

À l’instar des Indonésiens des îles de la Sonde, les plus gros lézards du monde pourraient voir 30 % de leur habitat frappé par la montée des eaux au cours des quarante-cinq prochaines années. Cela a poussé les chercheurs à faire passer le statut des varans d’espèce « vulnérable » à espèce « en danger ». 

« Quand nous parlons du changement climatique et de la montée du niveaux des eaux, je pense que cela concerne aussi la plupart des espèces qui vivent sur des petites îles », analyse dans un e-mail Achmad Ariefiandy, écologue pour une association appelée Komodo Survival Program. Il n’a pas pris part à la décision de changer l’espèce de catégorie.

Malgré la menace existentielle qui pèse sur eux, les varans de Komodo se portent peut-être mieux que d’autres espèces dans leur catégorie. Achmad Ariefiandy rappelle que le gouvernement indonésien s’est engagé pour la conservation des varans et a lancé un programme en ce sens en 2013. Ce programme fait collaborer gouvernement régionaux et locaux, mais aussi des communautés locales, des universitaires et des ONG.

« Donc la réalité du terrain tout de suite [c’est] qu’ils vont plutôt bien », affirme-t-il.

Le travail de préservation n’est bien entendu jamais terminé, et il faudra être vigilant pour éviter que les thons et les varans de Komodo ne fassent un pas de plus vers le gouffre de l’extinction. Pour le moment en tous cas, les défenseurs de la faune peuvent se réjouir de leurs petites victoires.

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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