Comment nager avec des requins en toute sécurité ?
Si les requins ne sont pas les mangeurs d’hommes sans cervelle que l'on représente souvent, ils restent des prédateurs qu'il faut approcher avec prudence et respect.

L'explorateur National Geographic Bertie Gregory filme un requin-taureau sous l’eau. Au plus près des requins avec Bertie Gregory sera diffusé sur la chaîne National Geographic le 6 juillet à 19h10.
AU PLUS PRÈS DES REQUINS AVEC BERTIE GREGORY sera diffusé dimanche 6 juillet à 19h10 sur la chaîne National Geographic.
Des dents acérées, des yeux sans vie et un goût pour la chair humaine : c'est ainsi que la plupart des films représentent les requins. Mais qu’en est-il vraiment ? Peut-on s'approcher de ces prédateurs qui règnent sur la chaîne alimentaire marine ?
Les requins existent sur Terre depuis plus longtemps que les arbres, et il en existe plus de 500 espèces, du célèbre grand requin blanc à l’iconique requin-marteau, en passant par le doux requin-baleine et le minuscule requin-lanterne nain.
Quelle que soit leur taille, les requins peuvent être imprévisibles, il est donc important que ceux qui partagent les eaux avec eux aient des connaissances, de l’expérience et du respect envers l’animal.
Alors, que faut-il pour nager avec des requins ? Au plus près des requins avec Bertie Gregory documentaire inédit, sera diffusé sur la chaîne National Geographic le 6 juillet, et sera disponible en streaming sur Disney+ le lendemain. En amont de cette diffusion attendue, nous avons interrogé des experts pour découvrir comment ils se préparaient à ces extraordinaires rencontres.
VOIR DES REQUINS DE PRÈS
Pendant le tournage du documentaire, l’explorateur National Geographic Bertie Gregory a vécu sa plus belle plongée « de tous les temps » avec des requins dans la grotte sous-marine Cathedral du récif Aliwal Shoal, en Afrique du Sud.
Jusqu’à quarante requins taureaux tachetés « tournaient simplement en rond dans cette grotte », se souvient-il. Atteignant environ trois mètres de long, ces créatures apparemment menaçantes ont « une bouche terrifiante avec des centaines de dents aussi fines que des aiguilles ».
Mais Bertie Gregory n’avait pas peur. « La peur vient d’un manque de compréhension », dit-il. Il sait que les dents en forme d’aiguilles sont conçues pour saisir, pas pour trancher, ce qui signifie que « la proie doit être d’une taille qu’ils peuvent avaler. Je suis trop gros pour passer dans leur gorge, donc ils ne peuvent pas me mâcher. »
Même les grands requins blancs - probablement les poissons les plus redoutés de la planète - ne sont pas des mangeurs d’hommes sans cervelle. « Nous ne sommes pas sur leur menu », assure Bertie Gregory. « Nous sommes pauvres en graisse et nous avons un goût étrange. » Les requins blancs adultes ont évolué pour manger des phoques et des otaries dont la graisse est riche en énergie, contrairement aux humains, plus fibreux.
Bien que les morsures de requins soient incroyablement rares (il y a eu quarante-sept morsures non provoquées en 2024, selon l’International Shark Attack File) la meilleure façon de prévenir un incident est de comprendre le comportement de ces merveilleux animaux.
COMMENT RESTER EN SÉCURITÉ ?
La scientifique Melissa Cristina Márquez, qui n’apparaît pas dans le documentaire mais plonge avec les requins depuis plus de dix ans, examine toujours soigneusement les facteurs environnementaux avant d’entrer dans l’eau avec n’importe quelle espèce de requin, en particulier les grands requins.
« Je n’entre jamais dans l’eau s’il y a une forte odeur d’appât ou de carcasses, sauf s’il s’agit d’un cadre de recherche contrôlé », dit-elle. Pour une professionnelle expérimentée comme Melissa Cristina Márquez, les protocoles de sécurité existent pour une bonne raison. Les suivre revient à travailler avec une équipe hautement qualifiée, suivre des procédures claires, et utiliser une perche de sécurité si nécessaire pour toujours avoir quelque chose entre vous et un requin trop curieux.
L’heure de la journée est également importante. Les requins prédateurs ont tendance à chasser à l’aube et au crépuscule, donc les professionnels expérimentés évitent généralement ces plages horaires, surtout quand l’eau est trouble. « S’ils chassent dans une eau à faible visibilité, ils pourraient confondre un humain avec un phoque », relève Bertie Gregory.
Quand un requin prédateur de grande taille a mordu pour tester et réalise que l’humain n’est pas une proie, la victime a probablement déjà subi des blessures catastrophiques, poursuit-il. « Il ne faut donc pas leur donner l’occasion de faire une erreur. »
Certains facteurs, cependant, sont impossibles à connaître à l’avance pour les chercheurs, notamment l’état d'esprit de l’animal. « Est-ce qu’il a faim ? Est-ce qu’il est rassasié ? Est-ce qu’il chasse ? Est-ce qu’il est heureux ? Est-ce qu’il est en bonne santé ? » énumère Lacey Williams, écologiste comportementale des requins, interrogée dans le documentaire. « Malheureusement, on ne peut pas leur poser la question. »
COMPRENDRE LE COMPORTEMENT DES REQUINS
Les requins émettent des signaux si vous savez lire leur langage corporel. Les signes indiquant qu’un requin se sent mal à l’aise ou agité comprennent des mouvements brusques, le relèvement de la tête, l’abaissement de ses nageoires pectorales vers le bas, et le dos voûté.
Si Melissa Cristina Márquez note également une queue qui bat exagérément, quand l’animal fait des cercles plus serrés, heurte des objets autour de lui, ou fait plusieurs passages rapprochés, « c’est un signal qu’il est temps de quitter l’eau calmement et rapidement », dit-elle.
Quand vous êtes dans l’eau avec des requins, il est important de rester calme, de bouger lentement, d’éviter les mouvements brusques, et « d’avoir un respect sain pour ce dont l’animal est capable », souligne Lacey Williams. Et de toujours « rester en alerte ». Ne tournez jamais le dos au requin et gardez toujours un contact visuel. En tant que prédateurs embusqués, les requins sont moins susceptibles de vous voir comme une proie potentielle si vous les regardez constamment.
UNE RENCONTRE, PAS UN DÉFI
Bien qu’il soit raisonnable d’être prudent, un requin ne va pas essayer de croquer tous les humains qu’il voit. De nombreuses espèces, y compris les requins-marteaux et les requins-renards, ont tendance à être timides et à éviter les plongeurs.
Pour les espèces prédatrices comme les requins-tigres, les requins-bouledogues et grands requins blancs, chasser une proie demande une énergie précieuse, donc ils doivent être sûrs que l’effort en vaudra la peine... et qu’ils ne se blesseront pas ce faisant.
Melissa Cristina Márquez explique qu’elle reste verticale dans l’eau pour paraître aussi grande et intimidante que possible, plaisantant qu’elle n’est pas certaine que « cela joue vraiment en ma faveur avec mon 1,55 mètre ».
Les experts essayent aussi d'éviter de stresser les requins. « Ce sont des animaux sauvages, et chaque rencontre doit se faire à leurs conditions », souligne Márquez. Cela signifie leur laisser beaucoup d’espace et ne jamais les poursuivre ou les coincer. « Nager avec des requins est un privilège, pas un défi à sensations fortes », ajoute-t-elle.
Le plus important : ne jamais, jamais essayer de toucher un requin. « Aucun d’entre nous n’aime vraiment être touché sans notre consentement », ajoute Williams, et il en va de même pour les requins et les autres animaux.
Certains experts s’inquiètent de la montée en flèche des vidéos sur les réseaux sociaux montrant des professionnels interagir avec des requins, car elles encouragent les gens à prendre des risques inutiles, et parfois à se blesser. Les gens « pensent qu’ils peuvent simplement s’approcher et les toucher ou les chevaucher, et ce n’est vraiment pas le cas », insiste Williams, même pour les espèces dociles.
En ce qui concerne les requins, les gens s’inquiètent généralement pour les mauvaises raison, relève Bertie Gregory. Pour ces majestueux animaux menacés par les activités humaine (la surpêche, la perte d’habitat et la pollution) il estime que « nous avons passé beaucoup trop de temps à avoir peur des requins, alors que nous devrions avoir peur pour eux. »

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.
