Que se passe-t-il dans votre cerveau lorsque vous voyez un oiseau ?

Une nouvelle étude apporte des précisions surprenantes sur le lien positif entre le temps que l'on passe en extérieur et notre bien-être, et détermine quels éléments de la nature peuvent être les plus bénéfiques pour notre santé mentale.

De Sarah Gibbens
Publication 2 déc. 2022, 12:36 CET
Une visiteuse nourrit des pigeons au temple de Swayambhunath, au Népal. Ces oiseaux sont omniprésents en ...

Une visiteuse nourrit des pigeons au temple de Swayambhunath, au Népal. Ces oiseaux sont omniprésents en ville et dans les banlieues rurales, et une nouvelle étude suggère qu’ils pourraient être bénéfiques pour notre santé mentale.

PHOTOGRAPHIE DE Jay Dickman, Nat Geo Image Collection

Voyez-vous un oiseau actuellement ? En entendez-vous un chanter ? Si c’est le cas, cela pourrait bien avoir des effets positifs sur votre santé mentale.

Une étude publiée récemment dans la revue Nature démontre que le fait d’être en présence d’oiseaux nous rendrait plus positifs.

Depuis une application installée sur leur téléphone, les participants de cette étude ont dû compléter un questionnaire trois par jour pendant deux semaines. Les questions posées concernaient leur environnement proche ainsi que leur état d’esprit. L’analyse des données a mis en évidence une tendance générale : les participants qui voyaient des oiseaux étaient plus susceptibles d’affirmer être de bonne humeur.

La science démontre de plus de plus que sortir est bon pour le cerveau, ce qui explique pourquoi les scientifiques souhaitent approfondir le sujet et déterminer quels éléments de la nature peuvent être les plus thérapeutiques.

« Ce type d’étude nous aide à comprendre en quoi interagir régulièrement avec certains éléments de la nature, comme les oiseaux, peut être bénéfique », explique Lisa Nisbet, psychologue à l’Université de Trent au Canada, qui n’a pas participé à l’étude.

 

POURQUOI ÉTUDIER LES OISEAUX ?

Andrea Mechelli, psychologue au King’s College de Londres et coauteur de l’étude, ne prévoyait pas d’étudier le monde naturel.

« Je ne m’intéresse pas particulièrement à la nature. Je ne m’imaginais pas démontrer un jour qu’elle avait un impact majeur sur nous », reconnaît-il.

Il étudiait à l’inverse pourquoi les individus qui vivent en ville semblent davantage sujets aux maladies mentales, et notamment aux psychoses.

Il a créé en 2015 l’application Urban Mind pour identifier des points communs dans les environnements des utilisateurs. Leur ville était-elle densément peuplée ? Se sentaient-ils en sécurité dans leur quartier ? Avaient-ils accès à des arbres ?

« La première chose que nous avons constatée est que la nature a une très forte influence », explique Mechelli. Avec ses collègues, il s’est demandé si certains aspects de la nature pouvaient être plus bénéfiques que d’autres.

Dans leur étude publiée en août, ils affirment que le fait de se promener le long de canaux ou de rivières a des effets positifs sur la santé mentale. Pour étudier l’influence de la vie sauvage, ils se sont tournés vers les oiseaux, omniprésents dans les environnements ruraux et urbains.

 

EN QUOI LES OISEAUX AIDENT-ILS À SE SENTIR MIEUX ?

Leur dernière étude comprenait 1 292 participants vivant principalement au Royaume-Uni et en Europe. Certains d’entre eux souffraient de troubles mentaux tels que la dépression.

Trois fois par jour, l’application envoyait une notification aux utilisateurs pour leur demander s’ils voyaient ou entendaient des oiseaux, s’ils étaient d’humeur joyeuse ou triste, etc.

Mechelli a effectué une analyse statistique à partir des données collectées. Résultat : le bien-être des participants augmentait lorsqu’ils étaient entourés d’oiseaux, et ce même en l’absence d’autres facteurs comme les arbres ou les cours d’eau. La santé mentale connaissait une amélioration aussi bien chez les personnes dépressives que chez les personnes qui n’avaient reçu aucun diagnostic de trouble mental.

Selon le professeur, la nature n’est cependant pas le remède à tous les maux. Même entourés d’arbres ou d’oiseaux, les participants ne se sentaient pas mieux s’ils rapportaient avoir l’impression de ne pas être en sécurité dans leur quartier.

 

QUE SAVONS-NOUS RÉELLEMENT ?

Avant d’extrapoler les principales conclusions de l’article, Peter James, chercheur en santé environnementale à Harvard non impliqué dans l’étude, aimerait étudier davantage de données.

Il souligne pour commencer que l’étude était sur la base du volontariat, et que la majeure partie des participants était en fait des participantes, blanches et titulaires d’un diplôme d’études supérieures. Une étude publiée en mai a mis en évidence le manque de diversité dans les enquêtes sur la santé environnementale comme celle-ci.

Par ailleurs, en analysant les données, les chercheurs ont regroupé toutes les options proposées par l’application concernant les différentes émotions positives et négatives en deux grandes catégories, ce qui n’offre qu’un aperçu sommaire du réel état de bien-être d’un individu.

James et d’autres scientifiques reconnaissent néanmoins que l’étude constitue une introduction intéressante sur la manière dont certains aspects de la nature influencent notre bien-être.

« Identifier et reconnaître l’intérêt des oiseaux et d’autres éléments de la nature semble être une piste prometteuse pour élaborer des traitements par la nature », explique Nisbet.

Des canards nagent au milieu des lotus dans une mare au Vietnam. S’exposer tous les jours à la nature, par exemple en étant au contact des oiseaux, aurait une influence positive sur la santé.

PHOTOGRAPHIE DE Karen Kamasuki, Nat Geo Image Collection

 

FAIRE DE LA NATURE UNE PARTIE INTÉGRANTE DES TRAITEMENTS

Les scientifiques ont élaboré deux grandes théories pour expliquer en quoi la nature peut apaiser les esprits surmenés. La première part du principe que puisque l’Homo sapiens a évolué dans la nature ; en comparaison, les environnements urbains constituent des sources de stress permanentes.

« On peut dissiper les effets du stress en allant dans la nature, car l’évolution nous a construits pour nous y rendre », explique James. « En tant qu’êtres humains, nous aimons la nature parce que c’est là que nous devrions être. »

La deuxième théorie est appelée « théorie de la restauration de l’attention ». Comparable à la première, elle avance que les épreuves de la vie quotidienne, telles que le stress lié aux transports et l’enchaînement des visioconférences, nous demandent d’incroyables efforts de concentration. La nature nous permet de relâcher cette concentration, et de nous lancer dans une sorte de méditation à yeux ouverts, en observant les oiseaux voleter de branche en branche.

Quelle qu’en soit la raison, le fait de déterminer l’influence qu’ont les arbres, les cours d’eau ou les oiseaux sur notre humeur aide les prestataires de soin de santé à faire de la nature une partie intégrante des traitements qu’ils proposent.

Une étude publiée pour la première fois en 1984 a révélé que les patients qui se remettaient d’une chirurgie et disposaient d’une chambre d’hôpital avec vue sur l’extérieur prenaient moins d’antidouleurs et se remettaient plus vite sur pieds. Une autre étude portant sur les habitudes de vie lors des confinements liés au COVID-19 a révélé que les personnes qui passaient du temps dans la nature étaient moins nombreuses à souffrir de dépression, d’anxiété et de stress.

Dans sa clinique située à Londres, Mechelli se concentre sur les interventions thérapeutiques précoces et travaille fréquemment avec les jeunes. L’une de ses solutions est de proposer aux patients d’aller se promener et de prêter attention aux arbres et aux plantes qui poussent dans la ville, ainsi qu’à toutes les autres formes de vie sauvage qui peuvent s’y trouver.

« Ça n’a pas d’effets secondaires », dit-il. « Et ils n’ont rien à perdre à essayer. »

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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