3I/ATLAS : la mystérieuse comète de passage dans notre système solaire
C’est le troisième objet interstellaire détecté dans notre système solaire, et ce n’est pas un vaisseau extraterrestre.

La comète interstellaire, originellement nommée A11pl3Z et à présent appelée 3I/ATLAS, a été observée pour la première fois par le télescope ATLAS (Asteroid Terrestrial impact Last Alert System, système d'alerte ultime d'impact d'astéroïdes) de l’observatoire El Sauce de Río Hurtado, au Chili.
Le 1er juillet, les scientifiques qui dirigent une unité de défense planétaire ont aperçu un objet scintillant dans l’ombre de Jupiter, à près de 675 millions de kilomètres de la Terre. Il ne s’agissait de toute évidence ni d’un astéroïde qui menaçait la Terre, ni d’une comète banale. En quelques heures, il est apparu clairement que ce voyageur ne provenait même pas de notre système solaire. Son orbite était trop abrupte et sa vitesse trop élevée. Les astronomes en ont vite conclu qu’il s’agissait d’un objet interstellaire, un explorateur d’une autre étoile.
Ces entités sont, pour le moment, d’une rareté singulière. Cet objet interstellaire n’est que le troisième confirmé. Il a été repéré totalement par hasard, alors qu’il pénétrait dans notre système. Les scientifiques auront donc tout le loisir de l’étudier pendant les quelques mois que durera sa visite, et d’en découvrir les nombreux secrets.
« Les astronomes du monde entier tourneront leur télescopes, grands ou petits, vers cet objet […] et nous fourniront des informations sur son système planétaire d’origine », explique Sarah Greenstreet, astronome de l’université de Washington.


Cette image montre l’observation de la comète 3I/ATLAS au moment de sa découverte, le 1er juillet 2025. ATLAS, le télescope de recherche financé par la NASA, au Chili, a été le premier à annoncer que la comète provenait de l’espace interstellaire.
Cette animation montre l’observation de la comète 3I/ATLAS au moment de sa découverte, le 1er juillet 2025. ATLAS, le télescope de recherche financé par la NASA, au Chili, a été le premier à annoncer que la comète provenait de l’espace interstellaire.
JAMAIS DEUX SANS TROIS
Tout comme les astéroïdes et les comètes, on pense que les objets interstellaires seraient les restes d’un temps où les planètes commençaient à se former, ou bien les ruines de mondes et de lunes anéantis. Mais au lieu de provenir des alentours de notre Soleil, ils sont originaires d’un autre système planétaire. Ainsi, les découvrir est d’une importance suprême aux yeux des astronomes.
« Plus nous pourrons en apprendre sur les autres systèmes planétaires à partir de ces visiteurs interstellaires, mieux nous comprendrons les similitudes ou les différences que l’immense nombre de systèmes planétaires à travers la Voie Lactée entretient avec le nôtre », déclare Sarah Greenstreet.
Seuls deux autres objets interstellaires ont été découverts jusqu’à présent. Le premier, ‘Oumuamua a été repéré en 2017 et était particulièrement étrange. Un objet long, en forme de cigare, qui se comportait comme une comète mais qui ne montrait aucun signe d’activité cométaire. Les astronomes n’ont pas eu beaucoup de temps pour l’étudier, sa détection ayant eu lieu au moment où il quittait notre système solaire. Les théories à propos de ses origines fusent de toute part, allant de plausibles (morceau d’une planète désintégrée, comète extrêmement étrange) à beaucoup moins plausibles (un vaisseau spatial extraterrestre).
Puis, en 2019, les astronomes ont repéré un deuxième objet, 2I/Borisov, qui ressemblait et se comportait comme une comète. Les astronomes sont parvenus à le repérer alors qu’il pénétrait dans notre système solaire et ont pu l’examiner de plus près.
Il est difficile de se faire une idée de ce à quoi ressemblent les objets interstellaires de manière générale en ne se basant que sur deux observations. Les astronomes espèrent que ce chiffre augmentera grâce à l’exploration exhaustive du ciel que mènera l’observatoire Vera C. Rubin pendant dix ans qui débutera plus tard dans l’année. Un troisième objet interstellaire reste tout de même une bonne surprise pour le moment.
Ce nouveau visiteur a été détecté par l’unité ATLAS (Asteroid Terrestrial impact Last Alert System, système d'alerte ultime d'impact d'astéroïdes), un réseau de quatre télescopes autonomes financés par la NASA et conçu pour repérer les menaces potentiellement dangereuses pour la Terre que font peser les astéroïdes. La station ATLAS, au Chili, a repéré cet intrus au cours d’un examen de routine.
Au début, « nous n’avons rien suspecté d’étrange sur son orbite », commente Larry Denneau, l’un des principaux investigateurs d’ATLAS, rattaché à l’université d’Hawaï. Mais tout a rapidement changé lorsque les astronomes d’autres télescopes ont repéré l’objet, et que les scientifiques ont pu déterminer sa trajectoire avec plus de précision.
Les astéroïdes et les comètes peuvent avoir toutes sortes d’orbites, mais tous tournent autour du Soleil. Cet objet se déplaçait cependant trop rapidement et d’une manière trop allongée, ce qui indiquait qu’il « n’était pas tributaire de la gravité du Soleil et qu’il ne passerait jamais plus par notre système », explique Sarah Greenstreet.
Tous les scientifiques étant d’accord, la présence de l’objet a été confirmée et un nom lui a été officiellement attribué : 3I/ATLAS.
CE QUE L’ON SAIT ET IGNORE DE 3I/ATLAS
Une nouvelle étude téléchargée sur le serveur pré-imprimerie arXiv résume ce que les scientifiques ont découvert sur cet objet interstellaire jusque-là. Il présente clairement une chevelure, une bulle de gaz nébuleuse créée lorsque la glace s’évapore sous la chaleur du soleil. « Par rapport aux deux premiers objets que nous avons découverts, 3I/ATLAS est cométaire, comme 2I/Borisov », déclare Sarah Greenstreet. Ce qui veut dire que ‘Oumuamua reste, pour l’instant, le vilain petit canard du groupe.
Les comètes ont tendance à être vieilles, mais les premières données indiquent que 3I/ATLAS pourrait avoir 3 milliards d’années de plus que notre système solaire. Selon sa trajectoire d’arrivée, les astronomes suspectent que l’objet provient d’un amas d’étoiles extrêmement anciennes, dont l’émergence remonte à 7 ou 8 milliards d’années. Si tel était le cas, cela ferait de 3I/ATLAS la plus vieille comète jamais découverte, bien que les âges des deux précédents objets interstellaires soient très mal compris.
Selon certaines indications, l’objet serait également rougeâtre, un signe évocateur de la présence de matière primitive qui se serait agglomérée durant les balbutiements de son système planétaire. Il s’agirait probablement d’une très vieille capsule temporelle géologique.
« Pour le moment, il est difficile d’estimer sa taille », confie Sarah Greenstreet. En se basant sur la lumière du Soleil qu’il renvoie, l’objet pourrait mesurer entre 10 et 25 kilomètres de long. C’est une taille beaucoup plus importante que celle de ‘Oumuamua, qui mesurait environ 400 mètres de long, ou que 2I/Borisov, long de 1 kilomètre. Mais la coma de la comète et la distance actuelle à laquelle elle se trouve rendent incertaines les estimations de la taille de son noyau solide.
On ne sait pas grand chose de plus sur 3I/ATLAS pour le moment, mais sa trajectoire à travers le système solaire joue en la faveur des astronomes. « Elle continuera son chemin plus avant pendant quelques mois de plus avant de commencer à se diriger vers la périphérie de notre système solaire », explique Aster Taylor, qui poursuit un doctorat en astrophysique au sein de l’université du Michigan. « Il se déplace rapidement [mais] nous aurons le temps de l’observer. » Les observatoires du monde entier, et ceux se trouvant dans l’espace, tourneront leurs regards vers lui.
En continuant son chemin vers le Soleil, 3I/ATLAS passera à environ 28 millions de kilomètres de Mars au début du mois d’octobre. Plusieurs vaisseaux spatiaux sont en ce moment en orbite autour de la planète rouge, et ils pourraient être en mesure d’utiliser leurs appareils pour étudier la composition chimique de 3I/ATLAS ainsi que ses autres caractéristiques quand elle passera à toute allure à proximité.
Les astronomes s’attendent à observer une forte activité cométaire. Les comètes sont souvent composées de plusieurs sortes de glaces, dont du monoxyde de carbone gelé, du dioxyde de carbone et de l’eau. Au cours des prochaines semaines, 3I/ATLAS sera suffisamment proche du Soleil pour que son eau commence à se vaporiser, causant l’expansion de sa coma et de sa traînée luminescente.
« Attendez-vous à voir des images au cours des prochains mois, qui exposeront ses magnifiques caractéristiques de comète au cours de son passage relativement court dans notre coin de la galaxie », prévient Sarah Greenstreet.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.
