De l'antigel dans la crème glacée ? Ces ingrédients étonnants sont utilisés dans nos produits du quotidien

De la lessive à la crème glacée, de nombreux objets et produits de notre quotidien sont fabriqués à partir d'ingrédients insolites qui ont été utilisés à de tout autres fins au cours de l'Histoire.

De Rédaction National Geographic
Publication 19 août 2023, 18:06 CEST
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Si vous achetez des glaces du commerce, il est probable que ces dernières contiennent un antigel non toxique, le propylène glycol, qui aide à conserver les aliments.

PHOTOGRAPHIE DE Krista Rossow, Nat Geo Image Collection

Un liquide de refroidissement utilisé dans les moteurs des voitures est également un ingrédient des recettes de nombreuses crèmes glacées du commerce ; un minéral souvent présent dans nos lessives nécessitait autrefois des groupes de vingt mules pour être transporté à travers l’une des régions les plus chaudes de notre planète ; un produit présent dans toutes les cuisines permettait jadis de créer des outils et des armes complexes et solides, mais aussi des œuvres d’art intemporelles mises au jour par l’archéologie.

Des ingrédients à l’histoire insolite sont parfois utilisés pour fabriquer les produits et objets qui font notre quotidien. En voici cinq :

 

1. L’ANTIGEL : DE LA DYNAMITE À LA CRÈME GLACÉE

L’éthylène glycol, mieux connu sous le nom d’antigel, était à l’origine utilisé pour assurer la fabrication de la dynamite dans un environnement sûr et frais.

Les premiers moteurs de voiture utilisaient de l’eau pure comme liquide de refroidissement. Cette solution était très efficace, mais uniquement en été. En effet, face aux basses températures hivernales, l’eau ne se contente pas de geler : elle commence également à se dilater, ce qui, dans un moteur fermé, peut causer des dégâts importants au véhicule.

Les constructeurs automobiles ont alors commencé à ajouter du méthanol à l’eau, cet alcool simple permettant d’abaisser le point de congélation du liquide de refroidissement. Cependant, la tendance de ce dernier à s’évaporer et à corroder le moteur n’en faisait pas une solution idéale. Les constructeurs se sont donc tournés vers l’éthylène glycol, un composé chimique synthétisé pour la première fois en 1856 par le chimiste français Charles-Adolph Wurtz. Ajouté à l’eau, celui-ci abaisse non seulement le point de congélation, mais élève également le point d’ébullition ; il a donc été adopté dans le secteur automobile en 1926 et continue d’être utilisé de nos jours.

L’éthylène étant une hormone végétale, l’éthylène glycol a un goût sucré et fruité qui peut attirer les animaux domestiques et les jeunes enfants. Ce composé étant aussi toxique qu'il est utile, certains fabricants contournent le problème en ajoutant un goût amer au liquide. D’autres, en revanche, choisissent d’utiliser un autre produit chimique : le propylène glycol.

Cette forme d’antigel est si inoffensive qu’elle est utilisée dans la fabrication de dentifrices et de crèmes glacées du commerce.

 

2. LE BORAX : DE LA LESSIVE À LA GRANDE MURAILLE DE CHINE

Le borax, un minéral doux et incolore utilisé et commercialisé depuis des siècles, a d’abord été extrait de lacs salés de régions telles que le Tibet et le Cachemire, puis vendu le long de la Route de la soie à partir du 9e siècle.

Les orfèvres arabes utilisaient le borax pour séparer et purifier les métaux, tandis que les potiers chinois du 10e siècle s'en servaient pour augmenter la brillance et la durabilité de leurs œuvres, une méthode encore utilisée de nos jours.

Lorsque le borax est arrivé en Europe au Moyen Âge, il a commencé à être utilisé dans le processus de soudure afin de nettoyer les pièces de métal destinées à être fondues et assemblées. Le minéral venant de loin, son prix était cependant assez élevé.

Bien que des gisements aient été découverts en Italie en 1776, l’Amérique a dû attendre un siècle supplémentaire avant d’avoir enfin accès à ses propres réserves, découvertes par F. M. Smith, surnommé « le roi du borax », dans les salines de la vallée de la Mort, en Californie. Smith a alors créé les Harmony Borax Works, pour lesquels il recourait à un groupe de vingt mules, connues sous le nom de Twenty-mules team, pour transporter le minéral de Furnace Creek jusqu’à la voie ferrée près de Mojave : un périple épuisant de 265 kilomètres à travers l’une des régions les plus chaudes du monde. Les mules ont effectué ces trajets pendant environ six ans avant d’être enfin remplacées par les chemins de fer.

Environ 50 % de l’approvisionnement mondial de borax provient désormais du sud de la Californie. Bien qu’il ait autrefois été utilisé dans le processus de fabrication de métaux, aujourd’hui, ce minerai est très présent dans les lessives en raison de ses qualités naturelles d’adoucissement de l’eau.

Et ce n’est pas tout. Du borax a également été identifié sur des pots d’argile découverts sur un site datant du 11e siècle, tout près de la Grande Muraille de Chine.

 

3. L’HUILE DE CÈDRE : POUR REPOUSSER ET GUÉRIR

Si vous avez déjà mis votre nez dans un coffre en bois de cèdre, vous n’avez sans doute pas oublié l’odeur chaude, boisée et réconfortante qui s’en dégageait. Avec ses nombreuses vertus, l’huile du cèdre ne se contente toutefois pas de sentir bon : elle désinfecte, conserve, apaise et fait fuir les insectes.

Les civilisations anciennes connaissaient le pouvoir nettoyant et curatif de l’huile de cèdre. Pour les Sumériens, le cèdre était « l’arbre de vie », et son huile était utilisée à des fins médicinales, broyée avec des additifs tels que le cobalt et le cuivre pour fabriquer des peintures vives. Les Égyptiens utilisaient parfois l’huile de cèdre dans leur processus d’embaumement, et les Grecs de l’Antiquité la trouvaient efficace pour prévenir les infections. Au Moyen Âge, certains pensaient pouvoir débarrasser une maison de la peste en brûlant du cèdre et en appliquant son huile. Nicholas Culpeper, herboriste anglais du 17e siècle, estimait que le bois et l’huile de cèdre pouvaient soulager tous les maux, des problèmes cardiaques aux douleurs de l’accouchement en passant par l’essoufflement. Aujourd’hui, l’huile de cèdre vendue dans le commerce provient souvent de la distillation du bois, des feuilles et d’autres parties d'arbres comme le genévrier et le cyprès, qui appartiennent à une variété de conifères différente de celle du cèdre. Le résultat reste cependant similaire. Cette huile est encore connue pour son action répulsive efficace contre les insectes ainsi que comme parfum particulièrement apprécié en aromathérapie.

Les Amérindiens utilisaient l’huile de cèdre pour guérir les blessures, soulager les muscles endoloris, soigner les maux de tête et la constipation, et même pour éliminer les verrues.

 

4. LE SCANDIUM : SUR LA LUNE… ET DANS LES STADES

Le scandium est un métal argenté presque aussi léger que l’aluminium, mais avec un point de fusion plus élevé. Cet élément a été découvert par le chimiste suédois Lars F. Nilson en 1879, dix ans après que Dmitri Mendeleïev, le Russe à l’origine du tableau périodique, a prédit l’existence d’un élément entre le calcium et le titane, qu’il avait baptisé ekabore. Nilson a ainsi prouvé que Mendeleïev avait raison, mais a choisi de lui donner un autre nom : le scandium, en référence à la région dans laquelle il l’avait découvert.

C’est par hasard, alors qu’il étudiait les « terres rares », que Nilson a identifié cet élément. Contrairement à ce que leur nom semble indiquer, la plupart de ces métaux ne sont pas rares ; le scandium, qui est plus abondant sur la Lune que sur Terre, fait toutefois figure d’exception. Sa forme la plus pure est créée dans des supernovas, mais sur notre planète, ce métal n’existe qu’en petites quantités et est systématiquement lié à d’autres éléments. Ce n’est qu’en 1960, des décennies après sa découverte, que la première livre de scandium pur a été produite. Aujourd’hui, l’une des rares mines de scandium de notre planète se trouve en Russie, où ce métal de faible densité a été combiné à l’aluminium afin de créer un alliage plus résistant, notamment utilisé dans la construction des avions militaires.

La production de scandium étant beaucoup plus chère que celle de l’aluminium, son utilisation n’est pas très répandue. Malgré tout, il peut parfois être intégré dans des cadres de vélo légers ainsi que dans certains équipements utilisés pour le lacrosse. De même, les battes de baseball créées à partir d’un alliage de scandium ont la particularité de présenter un « effet trampoline » élastique grâce auquel elles peuvent propulser les balles plus efficacement. Le métal est également utilisé dans certains composants des produits aérospatiaux.

Les lampes à vapeur de mercure contiennent quant à elles de l’iodure de scandium dans le but de créer des éclairages lumineux pour certains stades et plateaux de tournage de films.

 

5. LE PAPIER D’ÉTAIN : DE LA CUISINE À L’ART ANCIEN

Bien qu’il ne semble pas avoir assez marqué les esprits pour donner son nom à une ère de l’Histoire, l’étain a grandement contribué à l’avènement de l’âge du Bronze : l’époque, vers 3000 avant notre ère, à laquelle les archives historiques commencent à montrer la présence d’outils en bronze, alliage dont l’étain est l’un des principaux composants. Il y a maintenant plusieurs milliers d’années, les outilleurs ont en effet découvert, peut-être accidentellement, que compléter le cuivre avec de l’étain permettait d’abaisser son point de fusion et de créer une matière plus solide, désormais connue sous le nom de « bronze ». De l’Égypte au Machu Picchu, c’est l’étain qui a permis aux peuples anciens de couler des formes dans des moules fermés, et ainsi de produire non seulement des outils et des armes complexes, mais aussi des œuvres d’art intemporelles qui ont depuis été découvertes par les archéologues. Les Grecs de l’Antiquité voyageaient par mer pour s’approvisionner en étain, le collectaient dans les mines d’Espagne et des îles britanniques, puis le commercialisaient à travers le monde antique.

Depuis sa découverte, l’étain a été allié à de nombreux autres métaux, dont l’acier, l’antimoine et l’argent, et ce pour diverses utilisations. Il a même prêté son nom à certains objets qu’il a contribué à créer, notamment dans les pays anglophones, où il est connu sous le nom de tin. D'ailleurs, les boîtes de conserve en acier recouvertes d’étain, créées en 1810 en Angleterre, sont couramment appelées tins ; en Australie, les canettes de bière sont encore appelées tinnies ; le tin whistle, un instrument à vent, est ainsi appelé parce qu’il était à l’origine produit avec de l’acier recouvert d’étain.

En plus d’être fonctionnel, ce métal peut également être utilisé à des fins plus artistiques : par exemple, l’étain perforé était autrefois très apprécié pour permettre une bonne aération dans les garde-mangers, et est encore utilisé pour ajouter une touche de décoration aux tables de nombreux foyers.

Ce document est extrait et adapté du volume 2 de An Uncommon History of Common Things, un ouvrage édité par National Geographic qui explore les origines de centaines d’objets du quotidien, ainsi que les raisons pour lesquelles ces derniers ont pris une telle importance dans notre vie.

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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