Une personne sur huit dans le monde est obèse

Depuis les années 1990, l’obésité a doublé dans le monde et particulièrement chez les plus jeunes, pour dépasser la barre symbolique du milliard d'individus. Si cette maladie chronique est multifactorielle, il existe des éléments d'explication généraux.

De Morgane Joulin
Publication 16 avr. 2024, 18:41 CEST
Actuellement, 13 % de la population mondiale est obèse. Ce chiffre pourrait monter à 20 % ...

Actuellement, 13 % de la population mondiale est obèse. Ce chiffre pourrait monter à 20 % en 2025 si la progression actuelle se maintient. 

PHOTOGRAPHIE DE Kevin Wheal / Alamy Banque D'Images

Un milliard de personnes obèses. Cette barre symbolique a été dépassée dans le monde en 2022, d’après une étude de la revue médicale britannique The Lancet dévoilée en mars 2024, qui se base sur les données d’environ 222 millions de personnes dans plus de 190 pays. Cela représente une personne sur huit à l'échelle de la planète. Depuis 1990, l’obésité a plus que doublé dans le monde chez les adultes et quadruplé chez les adolescents, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). En France, 17 % de la population seraient concernés.

La majorité des adultes atteints d'obésité sont des femmes (504 millions, soit 57 %), mais c'est chez les hommes que la tendance a évolué le plus rapidement en trente ans. Pour eux, la prévalence a presque triplé, alors qu'elle a doublé chez les femmes. Chez les enfants, les garçons sont principalement touchés par l'obésité (94 millions, soit 59 %) et la prévalence augmente de manière similaire selon les sexes : un facteur 4 pour les filles et 4,4 pour les garçons.

Souvent complexe et multifactorielle, l’obésité est une maladie chronique. L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) la définit comme « un excès de masse grasse et une modification du tissu adipeux, entraînant des inconvénients pour la santé et pouvant réduire l’espérance de vie ». Le surpoids et l’obésité sont diagnostiqués à partir d’un calcul de l’Indice de masse corporelle (IMC), qui est un rapport du poids en kilogrammes divisé par la taille en mètres carrés. « On considère qu’un poids est normal entre 19 et 25 kg/m2. Entre 25 et 30 kg/m2, on est en surpoids, et au-dessus de 30 kg/m2, en situation d’obésité », énumère Annick Fontbonne, épidémiologiste à l’Inserm. 

Si l’obésité résulte d’un déséquilibre entre les apports et les dépenses énergétiques, il est important de noter qu’elle n’est pas toujours synonyme de mauvaise santé. Néanmoins, elle peut être la cause de plusieurs maladies chroniques telles que le diabète de type 2, l’hypertension artérielle, certains cancers ou maladies cardio-vasculaires, voire des maladies articulaires. Ce sont donc « essentiellement des effets à moyens ou long terme », selon la chercheuse. 

À cela, il faut ajouter les problématiques psychologiques liées au body shaming , qui peuvent être la source de dépressions et autres troubles mentaux. Juliette Katz, influenceuse française, aborde régulièrement le sujet sur sa chaîne YouTube. « C’est au-delà du poids, c’est l’estime, le regard qu’on se porte et le regard des autres […] Je souffre profondément de la non-estime que je me donne », explique-t-elle dans une vidéo intitulée « 35 ans que ça dure », dans laquelle elle évoque sa relation compliquée à la nourriture et les remarques violentes qu’elle a pu subir de la part de ses proches. 

Notons que parmi les éléments déclencheurs de l’obésité, l’alimentation n’est qu’un facteur parmi d’autres. La génétique est aussi très importante. « Les études sur les jumeaux montrent qu’il peut y avoir une concordance de 70 %, c’est une maladie qui a un fort composant génétique », révèle Annick Fontbonne.

La sédentarité serait aussi un facteur de risque, notamment à travers l’augmentation significative du temps passé devant les écrans depuis l’épidémie de Covid-19. C’est ce que révèle un rapport de l’Observatoire National de l’Activité Physique et de la Sédentarité (Onaps), sur l’évolution des comportements des Français pendant le confinement. Ainsi, chez les enfants et les adolescents qui passaient moins de six heures par jour assis avant le confinement, 72 % ont augmenté leur temps total passé assis, contre 25 % des adultes.

La stigmatisation sur le poids est souvent plus forte à l’encontre des femmes. Ainsi, d’après une étude de Puhl, Andreyeva et Brownell parue en 2008 dans The National Library of Medecine, les femmes sont en moyenne discriminées à partir d’un IMC supérieur à 27 kg/m2, et les hommes à partir d’un IMC supérieur à 35 kg/m2.

PHOTOGRAPHIE DE Panther Media GmbH / Alamy Banque d’images vectorielles

 

UNE « AMBIANCE OBÉSOGÈNE »

En 2022, 390 millions d'adultes de dix-huit ans et plus à travers le monde étaient atteints d'insuffisance pondérale, tandis que 2,5 milliards étaient en surpoids, dont 890 millions de personnes obèses, selon l’OMS. Le problème de mal nutrition est donc double, surtout dans les pays à faibles et moyens revenus où une partie de la population n’a pas accès à un apport calorique suffisant, quand l’autre délaisse les produits frais pour la nourriture transformée de mauvaise qualité. Cela peut provoquer un passage très rapide de l’insuffisance pondérale à l’obésité. Selon l’étude parue dans The Lancet, les taux d'obésité dans ces pays sont maintenant supérieurs à ceux de nombreux pays industrialisés, en particulier en Europe. Et certaines îles d’Océanie atteignent des chiffres alarmants, comme le petit État insulaire de Nauru, où le pourcentage d’obèses était de 45,6 % selon les statistiques de l’OMS de 2014. 

Quant au reste du monde, « les États-Unis sont champions », avec plus de 40 % d’obèses. En Europe, « on est autours de 20 à 25 %, mais plutôt en voie de stabilisation », indique Annick Fontbonne. Selon l’experte, « le fait qu’il y ait de plus en plus d’obésité dans toutes les parties du monde est lié à cette globalisation de l’alimentation industrielle. On a une alimentation riche en gras et pauvre en nutriments. Ça joue énormément, car c’est quelque chose qui s’est beaucoup répandu dans le monde entier. »

Pour elle, les solutions relèvent plus de la volonté politique que des comportements individuels. « Agir sur le comportement alimentaire, c'est très difficile, surtout dans une ambiance obésogène. Il est difficile de dire aux gens "mangez moins et bougez plus". » Elle recommande de mettre en place des politiques et mesures collectives fermes, qui s'opposent aux lobbies de l'agro-alimentaire, à l’image de la taxe des sodas au Mexique ou même au nutri-score en France. D'après elle, cette mesure a fait que « les industriels qui l’apposent sur leurs produits ont changé les compositions de leurs aliments préparés. Les compositions sont donc meilleures et sans que les gens ne fassent rien. »

Enfin, l’organisation du temps de travail joue aussi un grand rôle dans l’alimentation. Pour Annick Fontbonne, il est essentiel de pouvoir prendre le temps de cuisiner, et donc avoir des horaires qui « permettent de faire les courses tranquillement et de préparer un repas ». Selon elle, les populations qui cuisinent le moins sont souvent les populations les plus défavorisées, et « plus un pays devient riche, plus l’obésité se développe dans les classes les plus défavorisées ». Or, elle estime que la « transmission » par la cuisine est essentielle à une bonne alimentation. 

Se tourner vers une alimentation moins transformée pourrait donc aider à prévenir de l’obésité. Pour autant, Annick Fontbonne rappelle que la maladie est « multifactorielle », et que la prise en charge est « à adapter à chaque personne. »

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