Migraines au réveil : ce qui les déclenche et comment les prévenir

Selon une nouvelle étude, notre humeur, notre niveau de stress, notre forme et notre sommeil pourraient constituer des facteurs de déclenchement de migraines. Grâce à cette découverte, certaines personnes qui en souffrent pourraient les prévoir.

De Sanjay Mishra
Publication 22 févr. 2024, 18:02 CET

Des recherches récentes ont montré une corrélation entre le manque de sommeil et les migraines matinales.

PHOTOGRAPHIE DE KATE JACOBS, SCIENCE PHOTO LIBRARY

Lors de nombreux événements importants de sa vie, de festivals et de cérémonies, y compris son propre mariage, Katyayani Vajpayi, ingénieure logiciel, a souffert de migraines lancinantes. Celles-ci se manifestaient principalement du côté gauche de sa tête, lui donnant des nausées et perturbant sa vision. La douleur est parfois si paralysante qu’elle a envie de rester seule chez elle, recroquevillée dans son lit et plongée dans le noir.

Katyayani Vajpayi n’est pas la seule dans ce cas. Au moins une personne sur dix dans le monde est sujette à des migraines à un moment ou à un autre de sa vie. Ce chiffre est probablement sous-estimé car trois fois plus de femmes que d’hommes et davantage de personnes aux revenus modestes que de personnes aisées en souffrent. Même lorsqu’elles sont prises en charge, les traitements ne sont pas très efficaces, surtout lorsque la migraine a déjà commencé.

« Les maux de tête attaquaient sans crier gare ; j’aurais aimé pouvoir les voir venir », explique Katyayani Vajpayi. « J’aurais pu, au moins, être mieux préparée. »

Aujourd’hui, une nouvelle étude publiée dans la revue Neurology montre que les applications pour smartphone ou les journaux qui permettent de suivre le sommeil, le comportement et les états émotionnels peuvent permettre de prédire les maux de tête chez certains patients. L’étude a révélé que les personnes souffrant d’une migraine au réveil ont fait état d’une baisse d’énergie la veille et d’un sommeil de moins bonne qualité durant cette nuit-là.

« Si les personnes suivent leur niveau d’énergie, leur activité physique et leur sommeil au fil du temps, elles peuvent être en mesure d’identifier le lien éventuel entre certains de ces éléments et les maux de tête », explique Kathleen Merikangas, psychiatre et épidémiologiste à l’Institut national de santé mentale de Bethesda, dans le Maryland, qui a dirigé l’étude.

Cette dernière montre que le suivi du sommeil et d’autres facteurs déclencheurs peut non seulement permettre de prédire les maux de tête chez certaines personnes, mais aussi de mettre au point des outils pour les prévenir.

« Les résultats suggèrent que des changements dans le corps et le cerveau ont déjà lieu avant qu’une personne ne ressente un mal de tête », a écrit dans un billet de blog Monica Bertagnolli, directrice des National Institutes of Health, institutions gouvernementales américaines en charge de la recherche médicale.

 

LA MIGRAINE, UNE MALADIE COMPLEXE

Une migraine est bien pire qu’un mauvais mal de tête. La plupart des personnes touchées ressentent une douleur lancinante fréquente et intense au niveau d’un des deux côtés de la tête. Bien que les migraines puissent survenir à tout moment de la journée, elles se manifestent généralement le matin au réveil. Certaines personnes en souffrent à des moments prévisibles, comme avant les menstruations, après une semaine de travail stressante ou le week-end lorsque les habitudes de sommeil sont perturbées ; d’autres sont frappées par la douleur de manière inopinée.

La première phase de la migraine, appelée prodrome, peut commencer jusqu’à vingt-quatre heures avant le mal de tête à proprement parler. Cette phase prodromique peut être ponctuée de fringales, de changements d’humeur inexpliqués, avec de la dépression ou de l’euphorie, d’un manque de sommeil, de bâillements incontrôlables ou d’une augmentation de la miction.

Chez certaines personnes affectées, des troubles neurologiques appelés « aura migraineuse » peuvent survenir avant ou pendant les migraines. L’aura peut se traduire par des vertiges, des bourdonnements d’oreille, des lignes en zigzag perturbant la vision, des nausées, des vomissements ou une sensibilité à la lumière et au son. Si ce trouble peut être un signe avant-coureur d’une crise de migraine imminente, il peut aussi survenir en même temps que le mal de tête lancinant. Toutefois, les personnes souffrant de migraines ne présentent pas toutes d’aura.

Une fois que la migraine s’est calmée, vient la phase du postdrome, dont l’analogie est faite avec la « gueule de bois ». Cette phase postdromique, qui peut durer de quelques heures à quarante-huit heures, se caractérise par de la fatigue, des difficultés de concentration, des vertiges, de la faiblesse et un manque d’énergie. Pour certaines personnes, le postdrome ressemble à la « gueule de bois » ressentie après avoir bu de l’alcool. Le cycle entier peut se répéter immédiatement après celui-ci. Il arrive aussi qu’une personne ne présente aucun symptôme entre deux crises.

La migraine surviendrait après l’activation anormale d’un nerf spécifique et des vaisseaux sanguins associés à la surface du cerveau mais la cause exacte n’est pas encore connue. Il existe en réalité de nombreux autres facteurs pouvant déclencher la migraine et très peu de traitements sont basés sur un mécanisme spécifique quelconque.

« Si vous identifiez les facteurs de risque qui vous sont propres et que vous adaptez votre mode de vie en conséquence, vous pouvez réduire l’incidence des maux de tête », affirme Donald Penzien, spécialiste des maux de tête et de la douleur à l’école de médecine de l’université Wake Forest de Winston-Salem, en Caroline du Nord.

 

PRÉVENIR LES MAUX DE TÊTE AVEC LE SUIVI DU SOMMEIL

Pour déterminer dans quelle mesure le risque de développer des maux de tête est lié à l’humeur, au sommeil, à la forme ou au niveau de stress d’un individu, les scientifiques ont recruté 477 volontaires à Washington, D.C., et dans les régions avoisinantes. Le groupe de volontaires, âgés de sept à quatre-vingt-quatre ans, comprenait 186 hommes et 291 femmes avec ou sans antécédents de migraine.

À l’aide d’une application pour smartphone, ils ont été invités à suivre leurs maux de tête, leur humeur et leurs niveaux d’anxiété, d’énergie et de stress, quatre fois par jour pendant deux semaines. Chaque matin, les volontaires ont également fait état de la qualité de leur sommeil qui était aussi mesurée à l’aide d’un dispositif portable.

Les scientifiques ont ensuite comparé la première incidence des maux de tête chez les personnes ayant des antécédents de migraines avec celles qui n’en présentaient pas.

L’étude a révélé qu’une personne avait plus de chances de développer un mal de tête au réveil si elle n’avait pas bien dormi ou si elle avait fait état d’une baisse d’énergie la veille.

Cette étude est impressionnante, non seulement par le grand nombre de personnes étudiées à des âges très divers, mais aussi par le pourcentage très élevé d’hommes ayant participé, ce qui est inhabituel par rapport aux nombreuses autres études sur la migraine, déclare Jelena Pavlovic, spécialiste de la migraine au Montefiore Medical Center dans le Bronx, à New York.

À la surprise des auteurs de l’étude, les maux de tête survenant l’après-midi ou le soir n’étaient pas dus à une mauvaise qualité de sommeil ou à une baisse d’énergie la veille. Ils étaient au contraire plutôt liés à des niveaux de stress plus élevés ou à un sursaut d’énergie inhabituel le jour précédent.

« Un sommeil perturbé favorise les crises matinales survenant le lendemain, tandis que des niveaux de stress et d’énergie plus élevés sont susceptibles de provoquer les crises de l’après-midi », explique la spécialiste.

L’étude n’a pas établi de lien entre le sentiment d’anxiété ou de dépression et les maux de tête survenant le lendemain, à condition que le sommeil ou les niveaux d’énergie n’aient pas été perturbés.

L’étude montre que les symptômes de la migraine, en particulier les nausées et les vomissements, peuvent altérer le sommeil. Elle n’a toutefois pas pris en compte certains des facteurs alimentaires et hormonaux qui peuvent déclencher des crises de migraine. Le fait que celles-ci soient également associées à une baisse d’énergie la veille suggère que certains changements physiologiques peuvent se produire avant l’endormissement et induire un sommeil de mauvaise qualité. Cependant, on ignore encore si la perturbation du sommeil est un déclencheur ou un symptôme de la migraine. « Nous procédons actuellement à une surveillance du sommeil par électroencéphalographie, pendant la nuit, pour tenter de répondre à cette question », indique la professeure Merikangas.

L’étude confirme toutefois ce que de nombreuses personnes souffrant de migraines ont appris par expérience : une bonne alimentation, ainsi qu’une hydratation, une activité physique et des horaires de sommeil réguliers peuvent réduire le risque de maux de tête.

« Cette étude réaffirme que l’un des traitements les plus efficaces contre la migraine consiste à effectuer de bonnes nuits de sommeil à horaires réguliers », déclare Jelena Pavlovic. En règle générale, bien que certaines crises de migraine soient inévitables, plus tôt une personne peut traiter ses maux de tête, plus la durée des symptômes sera courte et moins ils seront pénibles, poursuit-elle.

« Si les avantages du suivi et de la prévision des crises de migraine peuvent sembler modestes, ils sont franchement comparables à beaucoup d’autres traitements en termes de prévention ou de réduction de l’apparition des maux de tête », déclare Donald Penzien.

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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