Interdit aux femmes : ces cinq destinations sont réservées aux hommes

Que cela soit dû à d’antiques croyances religieuses ou à des restrictions morales datant de l’époque nazie, voici cinq endroits que les femmes n’ont pas le droit de visiter.

De Erin Blakemore
Publication 6 juin 2024, 17:07 CEST
Le père Chrysostome, prêtre orthodoxe, dans la cellule de saint Nicolas le Pêcheur sur le mont ...

Le père Chrysostome, prêtre orthodoxe, dans la cellule de saint Nicolas le Pêcheur sur le mont Athos, en Grèce. Depuis plus de 1 000 ans, le mont Athos, ses églises et ses monastères sont interdits aux femmes et aux femelles des animaux (excepté en ce qui concerne les chats).

PHOTOGRAPHIE DE Travis Dove, National Geographic Image Collection

Vous êtes une femme et vous rêvez d’ajouter un nouveau visa dans votre passeport ? Alors vous allez probablement devoir tirer un trait sur ces destinations, toutes célèbres non seulement pour leurs paysages spectaculaires ou pour leur apport historique, mais aussi parce qu’elles sont interdites d’accès aux femmes. 

 

MONT ATHOS, GRÈCE

Depuis plus de 1 000 ans, des pèlerins et des moines chrétiens orthodoxes affluent par dizaines vers les non moins nombreuses dizaines de monastères d’obédience orthodoxe situés sur le mont Athos et dans ses environs, sur une pittoresque péninsule du nord de la Grèce connue pour ses panoramas spectaculaires et ses caches d’œuvres d’art uniques. La « Sainte Montagne » et les 150 km² qui l’environnent sont inscrits au Patrimoine mondial de l’UNESCO et sont ainsi protégés pour leur « valeur universelle exceptionnelle » depuis les années 1990.

Le mont Athos a beau avoir une « valeur universelle », il n’est pas pour autant universellement accessible. Depuis 1046, les femmes, mais aussi les animaux femelles (à l’exception des chats), sont bannies de la péninsule d’Athos.

Les monastères du mont interdisent d’une part l’accès aux femmes pour la raison que leur présence compliquerait la tâche aux moines, qui ont fait vœu de célibat, et d’autre part, la tradition orthodoxe veut que le mont Athos appartienne à la Vierge Marie et qu’aucune autre femme ne puisse visiter ce site sacré.

Cela n’a pas empêché des femmes d’essayer : certaines ont tenté de se faufiler dans la péninsule en revêtant des habits d’homme. En 2019, des ossements féminins ont même été mis au jour sous une chapelle byzantine. Mais le mont Athos demeure réservé aux hommes et est protégé par un statut légal spécial en Grèce, où il a le statut de région autonome, ainsi que par une provision spéciale dans la loi européenne qui confère à la montagne un statut particulier « justifié exclusivement par des raisons de nature religieuse et spirituelle ».

 

MONT ŌMINE, JAPON

Vous cherchez l’égalité des sexes au sommet des montagnes ? Eh bien, passez votre chemin si vous comptiez vous rendre sur le mont Ōmine, au Japon, sommet situé sur l’île d’Honshu et connu pour sa valeur sacrée et pour son patrimoine culturel.

Lui aussi inscrit au Patrimoine mondial de l’UNESCO, ce mont est important pour son rôle spirituel. Les temples et sanctuaires shintoïstes et bouddhistes de la zone attirent depuis longtemps les ascétiques, les voyageurs et même les membres de la famille impériale. Ceux qui ont parcouru ses sentiers escarpés et verdoyants se voient récompensés par un paisible paysage de montagne.

Mais l’accès au sommet d’Ōmine est interdit aux femmes depuis plus de 1 000 ans à cause de la « distraction » qu’elles représenteraient censément pour les pèlerins masculins, en effet les femmes réglées sont personæ non gratæ lors des rituels. L’interdiction a beau être ancienne, elle n’en est pas moins contestée : en 2004, lorsque le mont a été inscrit au Patrimoine mondial de l’UNESCO, plus de 10 000 femmes japonaises ont signé une pétition pour que l’interdiction soit levée.

 

OKINOSHIMA, JAPON

Au Japon encore, un autre site sacré inscrit au Patrimoine mondial de l’UNESCO n’admet pas les femmes : Okinoshima, minuscule île située au large de Fukuoka. L’île, gardée à tour de rôle par de solitaires prêtres shintoïstes, est considérée comme une déité. L’UNESCO la qualifie même d’« exemple exceptionnel de la tradition de culte rendu à une île sacrée ». Ses racines traditionnelles se rapportent à trois déesses de la mer auxquelles sont dédiés trois sanctuaires d’Okinoshima. Pendant plus de mille ans, des pèlerins ont apporté des offrandes sur l’île, notamment des miroirs, des pièces et des anneaux en or de la péninsule coréenne, souvenirs d’échanges passés entre le Japon et la Corée.

Que l’on soit homme ou femme, l’île est de toute façon largement interdite d’accès. Mais chaque année, des centaines d’hommes s’y rendent à l’occasion d’un festival. Et là encore, ils n’ont le droit que de poser le pied sur ses rives après s’être baignés dans la mer. Pourquoi les femmes ne peuvent-elles pas se joindre à eux ? En 2017, un porte-parole a expliqué que le bref trajet jusqu’à l’île est considéré trop dangereux pour les femmes et que l’accès leur est interdit pour leur propre sécurité.

Des hommes se purifient avec de l’eau de mer avant de poser le pied à Okinoshima en 2016. Le bref trajet pour se rendre sur l’île serait prétendument « trop dangereux » pour les femmes, qui en ont été bannies pour leur propre sécurité.

PHOTOGRAPHIE DE STR, AFP via Getty Images

 

HERBERTSTRASSE, HAMBOURG, ALLEMAGNE

L’Europe libérale abrite elle aussi une enclave interdite aux touristes féminines : Herbertstrasse, à Hambourg, rue à laquelle aucune femme ne peut accéder à moins d’être travailleuse du sexe. Cette rue se situe non loin de Reeperbahn, partie de la ville que d’aucuns considèrent comme l’un des quartiers rouges les plus célèbres au monde. Techniquement, Herbertstrasse est une petite rue renommée pour ses néons et ses vitrines exhibant des centaines de femmes peu vêtues mais travaillant en toute légalité. Bien qu’il s’agisse d’une rue publique et qu’elle soit ainsi soumise aux lois strictes de l’Allemagne en matière d’égalité des sexes, les visiteurs d’Herbertstrasse doivent d’abord franchir de grandes barrières de métal surmontées de panneaux interdisant explicitement à toutes les touristes et à tous les garçons de moins de 18 ans d’entrer.

Ces barrières ont une histoire sinistre : bien que la prostitution féminine soit pratiquée depuis longtemps à Hambourg et à Herbertstrasse, cette voie notoire fut un jour ouverte à tout un chacun. Cela changea en 1933 quand les nazis, qui venaient tout juste d’arriver au pouvoir, fermèrent la rue avec des barrières avec pour intention de contrôler le travail du sexe et le vice.

Si l’on cloîtra ainsi les travailleuses du sexe de Hambourg, ce fut, dit-on, pour les empêcher d’« infecter » la morale des Allemands moyens, mais cela servit aussi à les isoler de la communauté ; leur profession se pratiquait à l’abri des regards, et, de fait, leur persécution aussi. À partir de 1933, les nazis arrêtèrent plus de 3 000 femmes à Hambourg au prétexte qu’elles étaient « asociales » pour les punir de pratiquer ce métier. Nombreuses sont celles qui trouvèrent la mort aux côtés de travailleuses du sexe d’autres villes allemandes dans des camps de concentration comme ceux de Ravensbrück et de Neuengamme et dont on ne connaîtra jamais l’histoire. Mais les barrières, et la prohibition visant les visiteuses, ne disparurent pas avec les nazis ; dans les années 1970, la ville de Hambourg fit fortifier les entrées et ériger des portails en métal encore plus hauts pour bloquer la vue. De nos jours, on trouve autre chose dans les rues alentour : des Stolpersteine, des pavés ou des plaques mémoriels portant les noms de quelques-unes des travailleuses du sexe persécutées pour commémorer leur mort dans les camps nazis.

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    PARC NATIONAL DE BAND-E-AMIR, AFGHANISTAN

    Connu comme la version afghane du Grand Canyon, le Band-e-Amir, dans la province de Bamiyan, est le premier parc en son genre en Afghanistan et est réputé pour ses près de 600 km² de lacs spectaculaires, de falaises qui tutoient le ciel et de barrages naturels. Créé en 2009 et nommé en vue d’une potentielle reconnaissance par l’UNESCO, le site a pu être salué comme un symbole du progrès afghan après la guerre et a même employé les premières gardes forestières du pays. Cependant, en 2023, les talibans ont annoncé que l’accès au parc national était interdit aux visiteuses en raison de prétendues atteintes à la « pudeur ». Des combattants talibans ont également été stationnés aux entrées du parc pour les empêcher d’y entrer.

    Voilà une des nombreuses mesures visant à éloigner les femmes de la vie publique en Afghanistan. Depuis que les talibans ont repris le contrôle du pays en 2021, le ministère du Vice et de la Vertu a exclu les femmes de la plupart des aspects de la vie publique en restreignant notamment leur façon de s’habiller et de se déplacer : elles n’ont par exemple pas le droit de voyager sur de longues distances en empruntant les transports en commun.

    Selon des habitants de Band-e-Amir, le tourisme a diminué depuis que l’interdiction a pris effet ; interdiction qui empêche les visiteuses d’admirer des paysages qui comptent parmi les plus époustouflants du pays. Pour le moment, les seules femmes qui peuvent en profiter sont celles qui habitent déjà cette pittoresque région.

    Un homme sur son âne passe devant un lac d’un bleu à couper le souffle dans le parc national de Band-e-Amir, en Afghanistan. Bien que le parc ait un jour accueilli les premières gardes forestières du pays, les visiteuses ont l’interdiction de s’y rendre depuis 2023, date à laquelle les talibans ont publié un édit interdisant aux visiteuses de s’y rendre pour qu’elles n’enfreignent pas les lois relatives à la « pudeur ».

    PHOTOGRAPHIE DE Alex Treadway, National Geographic Image Collection

    Cet article initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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