Les chasseurs se voient en protecteurs de la nature

L’idée est difficile à imaginer dans un contexte de déclin massif de la faune. Pourtant, c’est en tant que défenseurs de la cause animale que les chasseurs justifient leur pratique.

De Julie Lacaze
PHOTOGRAPHIE DE CC0 Pixabay

Les chasseurs se voient de plus en plus en protecteurs de la nature, voire en garants de la biodiversité. En Afrique, certains tuent des espèces protégées, moyennant d’importantes sommes d’argent (Lire ici un extrait de notre dossier sur le sujet). Leur axe de défense : les fonds reviennent aux habitants et aux plans de gestion des réserves. En France aussi, les chasseurs ont recours aux mêmes arguments pour justifier leur pratique. Selon eux, ils participent à la régulation du nombre d’animaux. Un raisonnement difficile à entendre dans un contexte global d’extinction massive : une centaine d’espèces animales disparaissent chaque jour. D'après l'Union internationale pour la conservation de la nature, 41 % d'amphibiens, 26 % de mammifères et 13 % d’oiseaux sont menacés d'extinction.

David Pierrard est directeur de l’école de chasse du Domaine de Belval, dans les Ardennes. Une propriété de la fondation Sommer, qui gère aussi le musée de la chasse et de la nature, à Paris. Pour lui, le rôle du chasseur est primordial dans la gestion des espèces. En particulier, dans le cas du grand gibier, comme les chamois, les cerfs, les chevreuils ou les sangliers. « On a refusé, par principe, de tuer les bouquetins, regrette-t-il. Résultat ? Il y a deux ans, des chasseurs ont dû intervenir, en Haute-Savoie, car leur prolifération avait entraîné l’apparition de la brucellose, une infection bactérienne qui peut contaminer aussi les bovins. »

En Suisse, le canton de Genève a interdit la chasse depuis 1974. Une initiative qui porte aujourd’hui ses fruits : le nombre d’oiseaux a augmenté, les cerfs ont recolonisé les bois, le petit gibier, comme le lapin, abonde. « Mais, en l’absence de chasseur, précise David Pierrard, le canton doit payer des fonctionnaires pour enrayer la prolifération des sangliers, des lièvres et des cerfs, qui endommagent les cultures. »

Les chasseurs participent également, selon lui, à une meilleure gestion des milieux naturels, notamment l’habitat des canards et des gibiers de plaine : « Qui a intérêt, sinon les chasseurs, à entretenir les mares et les étangs, où vivent les canards ? Et, concernant le gibier de plaine, le faisan ou la perdrix, les fédérations de chasse dialoguent avec les agriculteurs pour que les populations se relèvent. » Des années d’agriculture intensive et d’utilisation de produits phytosanitaires ont endommagé leur milieu de vie, en particulier les haies, et détruit leur nourriture, essentiellement constituée d’insectes.

La fondation François Sommer vient d’ailleurs de lancer son premier appel à projet en faveur de la biodiversité, dont l’objectif est « de promouvoir la gestion durable de la nature, en particulier de la faune sauvage ».

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    PHOTOGRAPHIE DE Aaron Huey

    Les chasseurs peuvent-ils réellement être les garants de la biodiversité ? Ce raisonnement peine à convaincre la société, globalement hostile aux chasseurs. Selon un sondage Ifop de 2016, 8 Français sur 10 souhaiteraient que le dimanche soit un jour non chassé. Sur son site Internet, l’association Rassemblement pour une France sans chasse explique pourquoi elle veut abolir la pratique. D’abord, parce que la chasse n’est pas éthique, la mort d’un animal ne pouvant faire l’objet d’un amusement ; ensuite, qu’elle est une source de gène et d’insécurité pour les promeneurs ; enfin, qu’elle est préjudiciable à la faune sauvage : la pratique a notamment des répercussions sur la distribution géographique des espèces et engendre des modifications de comportement chez les animaux. Pis encore, selon l’association, le plomb des cartouches s’accumule dans l’organisme des canards, provoquant des cas de saturnisme.

    Pour défendre les chasseurs, David Pierrard affirme que « les gens ne savent plus ce qu’est la nature. Quand on montre à la télévision, un renard endormi contre une poule, on devrait ajouter la mention : ceci est une fiction. En réalité, la mort est partout dans la nature : le renard tue le campanile, l’aigrette mange le poisson. Tout ceci est nécessaire au bon fonctionnement des choses. »

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