Vaccin contre le zona : une protection bien plus large qu’on ne l’imaginait
De nouvelles recherches indiquent que le vaccin contre le zona réduirait le risque d’AVC et d’infarctus, en plus d’éviter la douleur des plaques cutanées propres à la maladie.

De nouvelles preuves suggèrent que les adultes de plus de cinquante ans vaccinés contre le zona, et surtout ceux bénéficiant des derniers vaccins, ont bien moins de risques de souffrir d’AVC ou d’infarctus que les personnes qui ne sont pas vaccinées.
Le zona est une infection dont personne ne veut souffrir. Ceux qui ont enduré ces éruptions cutanées parlent d’une douleur violente, brûlante et pénétrante qui dure parfois des mois sans discontinuer. Dans des cas sévères, cette maladie virale peut même être fatale.
À présent, des preuves inédites suggèrent que le vaccin contre le zona pourrait faire plus que prévenir cette maladie. Des données réunies provenant de dix-neuf études et présentées à Madrid lors de la plus grande conférence de cardiologie du monde ont révélé que le vaccin réduirait le risque d’AVC de 16 % et d’infarctus de 18 %.
Charles Williams, auteur principal de l’étude et directeur médical associé international de l’entreprise pharmaceutique GSK, décrit les découvertes comme étant « encourageantes », tout en déclarant que « plus de recherches sont nécessaires », afin de distinguer causalité et corrélation. Mais les conséquences potentielles sont saisissantes. En France, 120 000 personnes sont victimes d’une crise cardiaque chaque année et les AVC sont la troisième cause de décès du pays.
Les autres scientifiques considèrent cette découverte comme une raison supplémentaire de sensibiliser et de démocratiser ce vaccin que moins d’un adulte sur cinq reçoit quand il est recommandé. En France, la vaccination est recommandée pour les personnes âgées de plus de soixante-cinq ans et les personnes immunodéprimées de plus de dix-huit ans.
Le seul vaccin commercialisé en France est le Shingrix, qui s’est montré efficace dans plus de 90 % des cas. Et cette nouvelle recherche vient en augmenter les mérites, déclare William Schaffner, spécialiste en maladies infectieuses de la faculté de médecine de l’université Vanderbilt de Nashville, qui n’a pas pris part à la présente étude. Il ajoute que les récentes découvertes pourraient « avec un peu de chance, persuader plus de patients à se faire vacciner ».
COMMENT LE VACCIN CONTRE LE ZONA PROTÈGE VOTRE CŒUR
Les scientifiques tentent encore de comprendre comment ce vaccin pourrait participer à prévenir certaines maladies cardiovasculaires. Pour le moment, le lien semble être dans la diminution du mal causé par le virus varicelle-zona (VZV).
« Après guérison de la varicelle, le VZV contenu dans les plaques cutanées n’est pas éliminé par le système immunitaire ; il reste dormant dans les cellules nerveuses », explique Albert Shaw, professeur de maladies infectieuses au sein de la faculté de médecine de l’université de Yale. Alors que l’immunité diminue avec l’âge ou la maladie, le virus peut refaire son apparition sous la forme d’un zona, une éruption cutanée particulièrement douloureuse localisée la plupart du temps sur une zone nerveuse du côté du corps.
Mais le zona ne cause pas uniquement une éruption cutanée et un inconfort, ajoute Albert Shaw. Il peut également affecter le foie et les poumons, provoquer fièvre, frissons, maux de tête et fatigue. Dans 10 à 15 % des cas, les douleurs nerveuses de la maladie durent durant des mois. Le zona peut également toucher les yeux et l’oreille interne, et entraîner « une perte permanente de la vision ou de l’audition », remarque Jeffrey Cohen, dermatologue de l’université de Yale.
Au-delà de ces dommages directs, le virus est, de surcroît, lié à de plus hauts risques d’infarctus du myocarde et d’AVC, comme l'explique Emily Rayens, épidémiologiste au sein de Kaiser Permanente, qui a récemment publié une recherche démonstrative sur le sujet.
Deux mécanismes clés aident à expliquer cette connexion. L’un implique l’inflammation systémique qui survient lorsqu’une infection aussi importante que le VZV endommage les nerfs et affaiblit le système circulatoire, explique Fawziah Lalji, chercheuse en maladies infectieuses au sein de l’université de Colombie-Britannique. Cette inflammation peut également endommager les cellules endothéliales fragiles qui tapissent la paroi interne des vaisseaux sanguins. On parle alors de lésions de l’endothélium. Les vaisseaux endommagés sont plus susceptibles de former des caillots et de bloquer la circulation, explique William Schaffner, ce qui est parfois à l’origine des infarctus et des AVC.
En outre, le zona fait entrer le système immunitaire dans un état de surtravail, ce qui épuise les processus régulateurs normaux du corps. Fawziah Lalji explique que cela peut perturber la capacité du corps à gérer efficacement les caillots, la guérison et l’intégrité des vaisseaux sanguins. En conséquence, les risques de thromboses (formation de caillots) sont plus importants, comme le sont les nécroses (mort des tissus à cause d’une circulation sanguine trop faible) et les anévrismes (explosion des parois des vaisseaux sanguins).
Le vaccin contre le zona pourrait atténuer tous ces risques « en interrompant la chaîne d’événements inflammatoires et vasculaires, diminuant ainsi les risques cardiovasculaires », déclare Dong Keon Yon, spécialiste en maladies infectieuses de la faculté de médecine de l’université Kyung Hee de Séoul. Le scientifique a, lui aussi, étudié les bienfaits cardiovasculaires du vaccin. Cela signifie que le vaccin offre les deux bienfaits primaires de la vaccination : empêcher le zona de se déclarer et en réduire la sévérité s’il survient. En d’autres termes, le vaccin est en mesure de stopper la progression du virus et d’en éteindre les feux s’ils se déclarent.
Malgré tous ces potentiels bienfaits, Charles Williams met en garde : la plupart des preuves récoltées jusqu’à présent proviennent d’études d’observation, qui n’attestent pas de la causalité. Les personnes en bonne santé pourraient tout simplement être les plus susceptibles de se faire vacciner.
Et parce que la plupart des études ont été conçues spécifiquement pour évaluer la prévention contre le zona plutôt que d’en vérifier les retombées cardiovasculaires. Ces découvertes risquent de ne pas prendre complètement en compte les effets chez les personnes présentant un haut risque de développer des troubles cardiovasculaires. Un point d’importance pris en compte dans d’autres recherches.
PLUS DE BIENFAITS INATTENDUS
D'autres recherches réalisées à l'échelle mondiale confirment les nouvelles découvertes et soulignent les bénéfices additionnels liés à la prévention du zona.
En 2024, une étude canadienne dirigée par Fawziah Lalji a montré à quel point le zona pouvait représenter un danger pour le cœur et le cerveau. Le risque d’AVC est presque multiplié par deux au cours du mois qui suit l’infection et reste élevé de façon significative jusqu’à un an après la maladie.
Ensuite, en août 2025, une étude de cohorte américaine, co-écrite par Emily Rayens, a révélé que le vaccin contre le zona ne faisait pas que diminuer les risques d’infarctus, mais réduisait de surcroît la possibilité de développer un zona ophtalmique, une complication qui menace la vision, et une inflammation de la rétine.
Et l’étude qui est peut-être la plus convaincante, menée à Séoul par Dong Keon Yoo et ses collègues, a suivi des participants pendant plus de douze ans. Dans les résultats publiés, il ressort que ceux qui avaient été vaccinés contre le zona voyaient le risque de souffrir d’événements cardiovasculaires majeurs, comme un infarctus, un AVC ou un arrêt cardiaque, diminuer de 26 %.
De multiples études suggèrent à présent que la vaccination contre le zona pourrait également réduire les risques de développer une forme de démence. William Schaffner explique que ce bienfait serait dû à la capacité qu’ont les virus du zona et ses cousins d’infecter les cellules nerveuses et les vaisseaux sanguins du cerveau. La vaccination serait donc en mesure de prévenir à la fois cette infection et d’en atténuer les dommages si elle survient.
Dong Keon Yoo considère ces découvertes comme importantes parce qu’« une simple inflammation et une lésion vasculaire peuvent compromettre la santé cardiaque. Elles peuvent également affecter l’afflux sanguin au sein du cerveau ou contribuer à une neuroinflammation ; et tout ceci est lié au déclin cognitif. »
« Ensemble, déclare William Schaffner, ces études nous racontent une histoire cohérente. »
C’est une histoire marquée par la connaissance que l’on a déjà des dangers que représente un zona non-traité. « Le zona est une maladie qui ne fait pas que causer une éruption cutanée douloureuse. Elle peut endommager les poumons, le foie et le cerveau, et peut même engager le pronostic vital, en particulier chez les personnes immunodéprimées », avertit Albert Shaw. « Éviter de tels risques constitue une justification valable pour se faire vacciner, et les avantages potentiels qui en découlent soutiennent encore davantage cette démarche. »
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.
