Ce qu'il faut savoir avant de visiter les sanctuaires et temples japonais

Voici quelques éléments d’histoire et d'étiquette à garder à l'esprit pour une visite respectueuse de ces lieux sacrés.

De Selena Takigawa Hoy
Publication 27 déc. 2023, 19:23 CET
En observant les temples et les sanctuaires japonais, vous trouverez des similitudes, comme ces gardiens Niō, ...

En observant les temples et les sanctuaires japonais, vous trouverez des similitudes, comme ces gardiens Niō, ici à l’entrée du Senso-ji, à Tokyo.

PHOTOGRAPHIE DE Zhang Xiaoyu Xinhua, eyevine, Redux

Au cours des siècles, le shinto, religion née au Japon, et le bouddhisme, importé de l’Inde par le biais de la Chine, ont, à des périodes différentes, pris de l’ampleur au Japon. Ces croyances se sont tout de suite entremêlées et ont donné naissance à ce qu’on appelle aujourd’hui shinbustu shugo. Dès la fin du 19e jusqu’au milieu du 20e siècle, des politiques gouvernementales ont été mises en place dans l’objectif de séparer ces religions et d’élever le shinto à un rang supérieur. 

À l'instar des statues de Bouddha cachées dans les sanctuaires shinto en réponse aux mesures de l’ère Meiji, les marques de cette histoire sont encore visibles partout au Japon. Ces religions et les structures qui leur sont associées, partagent les mêmes lieux sacrés à de nombreux endroits. Aujourd’hui, le pays compte environ 80 000 sanctuaires et 77 000 temples. 

Alors que le nombre de voyages vers le Japon dépassent les niveaux prépandémiques, les visiteurs s’étant un peu cultivé sur le sujet peuvent pleinement apprécier ces sites sacrés. 

À Akashi, le sanctuaire Kakinomoto est dédié à la divinité Kakinomoto no Hitomaro, poète divinisé, vénéré comme le dieu de l'apprentissage et de la littérature.

PHOTOGRAPHIE DE Horst Friedrichs, Anzenberger, Redux

 

DES CARACTÉRISTIQUES À REPÉRER 

Comment savoir si vous vous trouvez dans un temple ou dans un sanctuaire ? Le nom du site vous le dira : les suffixes « 寺 » (-ji ou -tera) et « 院 » (-in) indiquent qu’il s’agit d’un temple, tandis que les noms des sanctuaires contiennent généralement les caractères « 神社 » (-jinja) ou « 宮 » (-miya ou -gu). 

Les entrées Torii, Sanmon et Romon : les sanctuaires et les temples sont protégés par des portails. À l'entrée des sanctuaires se trouve le torii, qui est ouvert et se compose de deux poteaux et d'un ou deux linteaux supérieurs. Dans les temples, le portail est appelé sanmon ou romon, et est souvent plus fonctionnel car il peut être fermé. « Le torii et le sanmon servent tous deux de frontières symboliques entre le monde profane et le royaume sacré », explique Toyohiko Ikeda, grand prêtre du sanctuaire de Sugawara à Machida, Tokyo.

Le shimenawa : vous verrez peut-être ces cordes faites de chanvre ou de paille de riz décorées de papiers en forme de zigzag dans des temples. « Leur présence indique que l’espace clos où elles se trouvent est sacré et pur », explique Takeyoshi Nagai, grand prêtre du sanctuaire Hibita à Isehara, Kanagawa. Le shimenawa n’est pas spécifique aux sanctuaires, on en trouve également dans la forêt ou autour de la taille de lutteurs sumo, en particulier des yokozuna, rang le plus élevé que peuvent atteindre ces lutteurs, et des autres joueurs les mieux classés. « Selon cette tradition, le yokozuna porte un shimenawa pour chasser les esprits lorsqu’il tape le sol de ses pieds avant d’entrer dans l’arène. »

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    Les deux étages supérieurs du pavillon du Kinkaku-ji à Kyoto sont recouverts de feuilles d'or pur. Cette structure, appelée shariden, abrite les reliques de Bouddha.

    PHOTOGRAPHIE DE Jason Edwards

    Les gardiens Komainu et Niō : que représentent les gardiens à l’air féroce qui se trouvent devant les sanctuaires et les temples ? Dans les sanctuaires, on trouve le plus souvent des komainu, ou chiens-lions, tandis qu’on voit plutôt des statues de Niō, des guerriers craintifs, à l’entrée des temples. « Les komainu et les statues de Niō ont pour rôle d'éloigner les forces malveillantes qui essaieraient de pénétrer dans le temple », explique Ikeda. Ces deux types de gardiens sont généralement représentés l'un des deux la bouche ouverte et l'autre, fermée, pour symboliser la vocalisation de « aum », qu’on entend dans des chants monastiques ou lors de la lecture de sutra. 

    Les cloches : un clocher contenant une grosse cloche en bronze se trouve parfois dans l’enceinte des temples. « Autrefois, chaque foyer ne possédait pas d’horloges, alors les cloches indiquaient l'heure aux habitants », raconte Kohei Uchida, grand moine du Shingyo-ji à Matsue, dans la province de Shimane. Les cloches servent également à appeler les moines à la prière. Si vous visitez un temple à minuit le soir du Nouvel An, vous entendrez peut-être le « Joya no kane », qui consiste à faire sonner la cloche 108 fois pour symboliser le fait de se détacher des 108 désirs terrestres et d'aborder la nouvelle année avec un cœur pur. 

    À l'exception des shimenawa et des torii, la signification donnée à ces éléments a été importée de l'étranger, même si, bien entendu, chaque culture a ses propres spécificités. 

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      Gauche: Supérieur:

      Les visiteurs du sanctuaire d'Omiwa remplacent un shimenawa de 400 kilos pour préparer la nouvelle année. 

      PHOTOGRAPHIE DE Kyodo via AP Images
      Droite: Fond:

      Les moines de Chion-in à Kyoto s'entraînent avant la cérémonie du Nouvel An, pendant laquelle la cloche de 70 tonnes sonnera 108 fois jusqu'à minuit.

      PHOTOGRAPHIE DE The Yomiuri Shimbun via AP Images

       

      SE RENDRE DANS DES SITES SACRÉS EN TANT QUE VOYAGEUR

      Selon Uchida, tout voyageur, indépendamment de sa religion, peut visiter les temples et les sanctuaires. Toutefois, certains endroits au sein de ces lieux sont interdits d'accès. Ces endroits abritent souvent des images ou des objets sacrés dont seul le personnel peut s’approcher. La photographie est mal vue dans certains temples et sanctuaires, et autorisée dans d'autres. En cas de doute, il est préférable de se renseigner auprès du personnel. Dans les sanctuaires, il convient de parler le moins possible, précise Ikeda, mais les enfants jusqu'à l'âge de sept ans sont considérés comme des êtres divins et il est généralement acceptable qu'ils fassent du bruit. 

      Le centre des allées menant aux temples et aux sanctuaires est réservé aux dieux, et les mortels doivent donc marcher sur le bord. À l'entrée, il est d'usage de saluer les dieux en s'inclinant légèrement. Avant d'entrer dans l'enceinte intérieure, les sanctuaires et certains temples disposent d'un temizuya, un petit pavillon contenant de l'eau sacrée pour se nettoyer rituellement les mains et la bouche. Les visiteurs doivent veiller à ce que l'eau qu'ils ont touchée ne retombe pas dans la vasque, mais qu'elle s'écoule sur le sol. « Cet acte a pour but de purifier l'esprit et le corps, car on pense que sans purification, les dieux risquent de ne pas nous prêter attention », explique Ikeda.

      Dans les deux cas, Uchida et Ikeda affirment que les non-adeptes sont invités à la prière, bien que la façon de prier diffère entre les temples et les sanctuaires. « Commencez par vous rendre dans le bâtiment principal du temple, où se trouve l’objet de vénération principal », explique Uchida. Si de l'encens est mis à votre disposition, vous pouvez en brûler, puis joindre les mains en prière silencieuse. Dans les sanctuaires, le rituel de la prière consiste à s'incliner deux fois, à applaudir deux fois, à prier, puis à s'incliner à nouveau.

      Il n’est cependant pas nécessaire de choisir entre la visite d’un sanctuaire ou d’un temple. Les mélanges font partie intégrante de la culture. 

      « Les Japonais chérissent à la fois le shintoïsme et le bouddhisme », explique Nagai. « Le lien inné avec le monde naturel dans le shinto et les pratiques structurées du bouddhisme ont trouvé un terrain d'entente, ce qui a favorisé la coexistence des deux systèmes de croyance. »

      Le sanctuaire d'Asakusa se trouve juste à côté du temple le plus célèbre de Tokyo, le Senso-ji (ici en photo).

      PHOTOGRAPHIE DE Dagmar Schwelle, Laif, Redux

       

      ENTRE LE SHINTO ET LE BOUDHISME, IL N’Y A QU’UN PAS

      Lorsque le bouddhisme a été importé au Japon au 6e siècle, les croyances et les rituels connus aujourd'hui sous le nom de shinto étaient déjà présents. Les dieux du shinto, appelés kami, comprennent les dieux créateurs mythologiques, divinités qui contrôlent des événements comme la pluie et les récoltes de riz, et des esprits qui habitent des objets et des animaux. Les origines de ces pratiques, bien que diffuses, remontent à environ 300 ans avant notre ère.

      La doctrine plus organisée du bouddhisme a entraîné la construction de temples, à la suite de quoi des sanctuaires shintoïstes ont rapidement été construits.

      Il est important de noter que ni le bouddhisme ni le shinto n'exigent en soi que leurs adeptes adhèrent à une seule foi. « Le shinto est une foi dont les pratiques s’inscrivent au quotidien », explique Ikeda, et « on trouve dans les enseignements bouddhistes le concept de salut, qui n’existe pas dans le shintoïsme. » 

      Ce mélange a trouvé des adeptes et à mesure que le bouddhisme s'est répandu, le shinbutsu shugo, ou la fusion du shinto et du bouddhisme, a également pris de l’ampleur. 

      Dans certains cas, les kami étaient présentés comme des bouddhas « déguisés », explique Erik Schicketanz, professeur d'études religieuses spécialisé dans le bouddhisme à l'université Kokugakuin, tandis que dans d'autres, ils faisaient office de protecteurs des temples et des monastères, ce qui explique que l'on voit souvent des sanctuaires et des temples côte à côte, voire dans la même enceinte. Le temple le plus célèbre de Tokyo, Senso-ji, en est un exemple, dit-il. « Juste à côté du Senso-ji se trouve l'Asakusa Jinja. Ce n'est pas une coïncidence, puisqu’il s’agissait, jusqu'en 1868, de la même chose ».

      L'année 1868 marque l'avènement de la restauration Meiji, une période qui correspond à la recherche d'une identité nationale pure. Le nouveau gouvernement mit en place une politique de shinbutsu bunri, ou séparation du shinto du bouddhisme, et tenta d'élever le shinto au rang de religion d'État.

      La séparation juridique s'est poursuivie jusqu'en 1945, moment où le shintoïsme a pris la forme d’un cadre général, explique Schicketanz. Pendant la période de séparation, certains temples et images bouddhistes ont été détruits et les moines ont été contraints d'abandonner leurs fonctions ou de devenir prêtres shintoïstes. En raison de la politique de suprématie du shintoïsme, il est plus rare de trouver des éléments bouddhistes dans les sanctuaires que l'inverse. 

      De nos jours, un nombre important de personnes ne revendiquent aucune appartenance religieuse spécifique, explique Nagai. « Toutefois, chez ceux qui expriment une croyance, bouddhisme et shintoïsme sont souvent considérés de manière presque égale. »

      Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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