Les impairs à ne pas commettre si vous allez au Japon

S’incliner poliment, faire preuve d’humilité et de respect, ôter ses chaussures… quels sont les codes à respecter pour ne pas commettre d’impairs auprès de vos hôtes ?

De Romy Roynard
Publication 16 mai 2023, 10:14 CEST
Eri Takeshi est hôtesse à Kochuan, un luxueux et traditionnel restaurant de Tokyo. La haute cuisine ...

Eri Takeshi est hôtesse à Kochuan, un luxueux et traditionnel restaurant de Tokyo. La haute cuisine japonaise, appelée « Kaiseki », rend hommage à la nature et aux saisons. Eri accueille les invités dans la plus pure tradition « omotenashi », l'art de recevoir japonais qui vise à anticiper les besoins d'un hôte avant même qu'il en soit conscient.

PHOTOGRAPHIE DE thomas nicolon, National Geographic

« L’accueil des touristes par les Japonais est exceptionnel » souligne Maud, qui a vécu un an au Japon et y a séjourné plusieurs fois depuis. « Vous serez toujours accueillis avec le sourire, le service sera toujours impeccable. Ils se plieront souvent en quatre pour vous aider. Une fois, en voyage, je cherchais mon hôtel et j’ai demandé de l'aide à une personne dans la rue. Au lieu de simplement me donner des indications, elle a marché 15 minutes avec moi pour me laisser devant l’accueil de mon hôtel ! »

Du chef de gare au concierge d’un grand hôtel, tous les Japonais partagent le même souci inné de la satisfaction de leur clientèle. Cette culture de devancer les souhaits des clients est relevée par tous les visiteurs. Et elle porte un nom : omotenashi (お持て成し). Cette notion, intraduisible en français, recouvre l’anticipation des besoins d’un hôte avant même que celui-ci n’en soit conscient, et ce dans tous les domaines de la vie quotidienne. Si vous vous préparez à vous rendre au Japon pour la première fois, vous aurez sans doute à cœur de répondre à ces multiples formes de respect sincère. Voici quelques règles de conduite à suivre pour être à la hauteur de l’excellence de l’hospitalité japonaise.

 

À VOTRE ARRIVÉE

La bienséance japonaise passe tout d’abord par le fait de saluer la personne qui vous accueille ou vous reçoit par une révérence, appelée ojigi (お辞儀). Les contacts physiques directs sont faits rares au Japon, et l'acte d'abaisser la tête ou la partie supérieure du torse est un signe de respect et d’humilité. En fonction du degré d’inclinaison, le salut porte différents noms : Eshaku (会釈) est une légère inclinaison d'environ 15° du haut du torse, c’est le salut usuel observé entre collègues de même statut, ou pour saluer rapidement et sans formalité quelqu'un que l’on croise dans la rue. Keirei (敬礼) est une inclinaison d'environ 30° du haut du corps ; c’est la variante d'ojigi la plus couramment utilisée dans les affaires japonaises ou pour saluer un client à son arrivée. Enfin Saikeirei (最敬礼), qui signifie littéralement « le geste le plus respectueux », est une inclinaison plus profonde variable de 45° à 70° du haut du corps, en fonction du statut de l’hôte ou interlocuteur, pour faire montre de son respect et de sa sincérité. Les hommes gardent les mains le long du corps, tandis que les femmes ramènent leurs mains l’une sur l’autre, devant elles.

Il convient ensuite de retirer ses chaussures avant de pénétrer dans une habitation, un lieu de travail, un restaurant ou encore un hôtel. Tout le monde est tenu d’enlever ses chaussures et d’enfiler des pantoufles ou des chaussures d’intérieur. La plupart des établissements ouverts au public disposent de casiers à chaussures à l’entrée. Sur les tatamis, pantoufles ou chaussons doivent être retirés au profit de chaussettes. Cela tient davantage à la fragilité du tatami, qui peut s’avérer difficile à nettoyer. L’Office national du tourisme japonais recommande à ses visiteurs de « ne pas mettre dans [leurs] bagages des chaussettes dépareillées ou abimées » : « vous risqueriez sur place d’être mal à l’aise. » Par ailleurs, par souci d’hygiène, d’autres pantoufles sont mises à disposition des clients et visiteurs dans les toilettes. N’oubliez pas de les retirer en sortant.

Des pantoufles bleues et marron sont soigneusement rangées dans un getabako (meuble à chaussures) dans une école à Matsumoto, Japon.

PHOTOGRAPHIE DE Japan Stock Photography / Alamy Banque D'Images

Dans le cas particulier ou vous seriez reçu au domicile de votre hôte, retirez vos chaussures à l’entrée ou genkan (玄関), l’interface entre l'intérieur de la maison et le monde extérieur. Dans le cas ou votre hôte ne vous proposerait pas de pantoufles, vous pouvez entrer en chaussettes à l’intérieur. Dans le cas où il vous en proposerait, la politesse requiert de les retirer dans une pièce au sol tatami.

Il est de coutume d’échanger de petits présents avec son hôte lors de votre arrivée. Prévoyez des souvenirs simples de votre pays d’origine, tout ce qui ne se trouve pas au Japon sera très apprécié. Il est d’usage de ne pas ouvrir ses présents devant celui ou celle qui vous les a offerts, mais d’attendre plutôt d’être seul pour les découvrir.

Dans le cadre d'un voyage d'affaires, vous aurez à présenter votre carte de visite et à recevoir celles de vos interlocuteurs. L'échange des cartes de visites est appelé meishi koukan (名刺交換). C'est un moment symbolique : tout le monde se tient debout et chaque personne tient à la main sa carte de visite et parfois un porte-cartes. Après un poli hajimemashite (初めまして), soit « enchanté.e de faire votre connaissance », vous pouvez vous présenter en donnant votre titre, le nom de votre entreprise et enfin votre nom. Votre interlocuteur fait de même. L'échange des cartes doit ensuite être quasi simultané et accompagné de la formule choudai itashimasu (頂戴致します), soit « j’accepte votre carte ».

 

À TABLE

Des baguettes soigneusement alignées vous attendront sur les tables des restaurants dont vous passerez les portes. Si vous n’êtes pas à l’aise avec leur maniement, vous pouvez demander d’autres ustensiles. Il se peut cependant qu’il n’y ait pas d’alternative, notamment dans les restaurants traditionnels. 

Entre deux bouchées, posez vos baguettes sur la table mais ne plantez pas celles-ci à la verticale dans votre plat : c’est ainsi que les offrandes sont présentées aux morts. Si vous partagez des plats, utilisez le bout de vos baguettes que vous ne mettez pas dans la bouche pour vous servir.

Au Japon il est mal vu de laisser ses baguettes « plantées » dans son bol de riz - c'est ainsi que sont positionnées les baguettes en période de deuil. Les baguettes doivent être posées en équilibre sur le bol ou sur un reposoir à côté de celui-ci.

PHOTOGRAPHIE DE thomas nicolon, National Geographic

La culture locale impose d’aspirer les nouilles qui composent de nombreux plats japonais. N’ayez pas peur de faire du bruit en dégustant vos ramens et ne soyez pas surpris du bruit venant de la table d’à côté : aspirer ses pâtes souvent servies très chaudes est une façon de les refroidir et le faire bruyamment montre que vous appréciez votre repas.

Si votre préférence va aux sushis, sachez que vous pouvez les manger avec les doigts après les avoir plongés dans un bol de sauce soja. 

Les pourboires ne sont pas d’usage au Japon et peuvent même être refusés. Si vous laissez un pourboire sur votre table et que vous sortez du restaurant, votre serveur sortira probablement en courant pour vous rendre votre argent. L'excellence du service fait partie de la mission intrinsèque de chaque établissement. Remercier poliment en fin de repas par une formule telle que Gochisôsama deshita (ご馳走様でした) littéralement « Merci pour ce festin », sera le meilleur gage de votre gratitude.

 

DANS LES TRANSPORTS

Que vous attendiez le prochain train, une place dans un restaurant ou de monter dans un manège à Disneyland, il y a toujours une zone clairement marquée au sol pour faire la queue. Il convient d’attendre en ligne, dans le calme, pour entrer ou embarquer de manière organisée. Au Japon comme ailleurs, il est poli de laisser les gens sortir avant d’entrer soi-même.

« Alors que je patientais sur le quai pour monter dans le Shinkansen, à l’intérieur des wagons vides des employés nettoyaient la rame avec une précision et une dextérité inouïes », se souvient Gabriel Joseph-Dezaize, ancien rédacteur en chef de l’édition française du magazine National Geographic, qui s'est rendu au Japon en 2019. « Leur tâche achevée en une poignée de minutes, ils sont descendus sur le quai, se sont alignés, puis se sont inclinés devant les passagers, les invitant à monter à bord. “Si votre train a ne serait-ce qu’une minute de retard, vous recevrez mille excuses”, m’avait alors dit Yumiko Nishitani, la guide qui m’accompagnait. La régularité du Shinkansen résume pour moi l’obsession des Japonais dévolue au respect du temps d’autrui qu'ils considèrent comme une ressource précieuse entre toutes. »

Honshu, Tokyo - Des usagers attendent de monter dans le train Shinkansen à la station Tokyo.

PHOTOGRAPHIE DE Prisma by Dukas Presseagentur GmbH / Alamy Banque D'Images

S’il est tentant, devant une file d’attente qui s’allonge, d’envoyer un ami pour qu’il vous garde une place, c’est un comportement proscrit au Japon où il est très mal vu de couper la file pour rejoindre une connaissance. 

Dans la queue comme dans les transports, la discrétion est de mise. Évitez de parler fort au téléphone ou avec les personnes qui vous accompagnent. Au Japon, en particulier dans les grandes métropoles, de nombreuses personnes parcourent de longues distances pour se rendre sur leur lieu de travail. Les trajets sont des temps de calme, de repos, de lecture ou de jeu sur smartphones. Une quiétude qu’il est malvenu de troubler. D’une manière générale, les Japonais ne parlent pas très fort en public ou dans les transports. Les lieux publics très fréquentés sont comparativement plus calmes au Japon que dans d'autres pays.

« Si j'avais un conseil à donner à des touristes se rendant au Japon, ce serait d'être courtois, car les gens le sont tous » explique Thomas Nicolon, photographe National Geographic qui a récemment réalisé un reportage au Japon. « Ne parlez pas trop fort et observez les gens avant d’agir, pour ne pas les brusquer. »

 

EN PUBLIC

Une fois descendu du train qui vous menait à votre destination, vous pourriez avoir envie de manger rapidement sur le chemin. Sachez qu’il est inconvenant au Japon de manger en marchant. Outre le risque de faire tomber par terre des morceaux de votre repas, votre pas ralenti risque d’agacer les nombreuses personnes pressées de se rendre au travail ou de rentrer chez elles en fin de journée. « Au Japon, il est très mal vu de ne pas se poser pour manger », abonde Maud. « Et encore plus mal vu de manger dans des lieux communs fermés comme le métro, où nous pourrions salir avec nos miettes et déranger les autres usagers en faisant du bruit. »

Toutefois, lors de festivals dans lesquels se trouvent des stands de nourriture, les gens achètent et consomment les produits vendus tout en se promenant. Au Japon, la floraison des cerisiers, de fin mars à début avril, est un événement national. Les gens affluent dans les parcs pour pique-niquer afin d’admirer et photographier les cerisiers en fleurs. Cette coutume traditionnelle japonaise d'apprécier la beauté des fleurs de cerisiers porte un nom : hanami (花見) ou o-hanami avec préfixe honorifique.

Des milliers d’arbres en fleur colorent les rues avec de somptueuses nuances de rose. Au Japon, la floraison des cerisiers est un événement national et les gens affluent dans les parcs pour faire des hanami et des pique-niques afin d’admirer et photographier les fleurs de cerisiers. 

PHOTOGRAPHIE DE thomas nicolon, National Geographic

Le temps de votre promenade, il y a une chose que vous ne verrez jamais : personne ne se mouche en public au Japon. D’une part parce que le fait de se moucher est relativement bruyant, et d’autre part parce qu'il n'y a pas de poubelles dans les endroits publics. C’est pourquoi il est recommandé de renifler jusqu’au moment où l’on se retrouve seul – aux toilettes par exemple – pour se moucher. Si vous avez le nez qui coule, n’ayez crainte : il est tout à fait acceptable de se tamponner le nez avec un mouchoir en papier.

Enfin, comme dans de nombreux autres pays, les démonstrations d’affection en public sont peu communes, même si se tenir la main est une pratique courante. Sur ce point également, la discrétion est de mise.

Ces convenances peuvent paraître intimidantes mais n’ayez pas d’appréhension, si vous doutez de la bonne marche à suivre, il vous suffit de poser la question. Vos hôtes seront ravis de vous aider à mieux comprendre leur culture. 

Au delà de ces us et coutumes, l'expérience du voyage demeure. « Le Japon est un pays qui se vit » sourit Maud. « N'essayez pas de faire 1000 choses en très peu de temps. Il vaut mieux en faire moins, mais prendre le temps de se perdre dans les rues, de vivre l’expérience “à la japonaise“, de sortir des sentiers battus, d’admirer, ou de faire un karaoké. »

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