Piqûres et venin : les attaques les plus redoutables du règne animal

Les animaux piquent pour deux raisons assez simples : se défendre et neutraliser leurs proies. En revanche, la manière dont ils procèdent peut être particulièrement élaborée.

De Liz Langley
Publication 21 mars 2023, 14:40 CET
Une espèce non identifiée de scorpion du Viêt Nam qui brille sous la lampe frontale à ultraviolets ...

Une espèce non identifiée de scorpion du Viêt Nam qui brille sous la lampe frontale à ultraviolets d’un scientifique. De nombreux experts étudient le venin dans le but de trouver des moyens d’atténuer la douleur humaine.

PHOTOGRAPHIE DE David Guttenfelder, Nat Geo Image Collection

La plupart d’entre nous ont déjà été victimes d’une piqûre d’insecte. Si l’expérience est généralement désagréable, celle-ci est loin d'être un fait isolé.

Les animaux piquent pour deux raisons : se défendre et/ou attraper une proie. Ils peuvent procéder de manières diverses et variées, allant de la plus simple à la plus élaborée.

Prenons l’exemple des méduses dont les « dards font partie du matériel biologique le plus sophistiqué du règne animal », explique Juli Berwald, océanographe et auteure de Spineless: The Science of Jellyfish and the Art of Growing a Backbone. C’est probablement la raison pour laquelle elles n’ont pas évolué depuis des centaines de millions d’années.

« Lorsque vous êtes piqué, vous interagissez avec un demi-milliard d’années d’évolution », poursuit-elle par e-mail.

Les tentacules des méduses sont tapissés de milliers de cellules urticantes appelées cnidocytes. Celles-ci contiennent des capsules urticantes, ou nématocystes, dotées d’opercules à ressort.

Le zooplancton, une de ses proies favorites, émet des vibrations qui déclenchent l’ouverture des capsules, libérant ainsi des microtubules remplis de toxine. Ceux-ci sont dotés d’une pointe acérée qui empale et envenime les proies.

Le déploiement de cette capsule s’effectue à une vitesse de « cinq millions de g (9,81 mètres par seconde), soit le mouvement le plus rapide du règne animal », précise l’océanographe.

Les tentacules des méduses (sur la photo une méduse à crinière de lion, Cyanea capillata) portent des milliers de cellules urticantes appelées cnidocytes.

PHOTOGRAPHIE DE David Liittschwager, Nat Geo Image Collection

 

LES MAÎTRES DU CAMOUFLAGE

Le poisson-pierre (Synanceia verrucosa) est le poisson le plus venimeux au monde. Toutefois, si vous le regardez de plus près, vous n’y verrez peut-être pas un poisson.

Ces experts du camouflage se tapissent dans les eaux peu profondes de la zone Indo-Pacifique, des Caraïbes et de l’archipel des Keys au large de la Floride. Sur le fond de l’océan, ils ressemblent à des rochers bosselés et à des coraux déchiquetés.

Lorsqu’un poisson-pierre se sent menacé, des épines acérées apparaissent sur son dos, chacune dotée d’une poche à venin à sa base. Si une proie ou un prédateur entre en contact, le poisson pique l’intrus et lui envoie le venin à travers ces épines creuses, le principe étant identique à celui d’une aiguille hypodermique.

Il existe plusieurs espèces de poissons-pierres. Toutes utilisent leur nageoire dorsale pour s’enfouir dans le sable et devenir presque invisibles. Cette brillante stratégie pour tendre une embuscade à une proie est dangereuse pour l’Homme. Les piqûres de poissons-pierres peuvent causer une douleur intense, une respiration irrégulière, des lésions cardiovasculaires et des vertiges.

 

ATTAQUE DE ZOMBIE

Les dards des abeilles et des guêpes fonctionnent également comme des aiguilles hypodermiques mais sont en réalité des ovipositeurs modifiés, soit des tubes permettant de pondre des œufs. C’est pourquoi toutes les abeilles et guêpes qui piquent sont des femelles, elles se servent de ce même organe pour les deux actions.

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    Une guêpe émeraude sait exactement à quel endroit piquer le cerveau des blattes pour les immobiliser.

    PHOTOGRAPHIE DE VARMA, ANAND ALLURI, Nat Geo image collections

    Les guêpes carnivores utilisent leur dard pour paralyser ou tuer leurs proies, comme les chenilles et les mouches. Certaines guêpes fouisseuses empalent celles-ci sur leur dard, ce qui leur permet de transporter leur repas jusqu’à leur nid.

    Les guêpes parasitoïdes pondent leurs œufs à l’intérieur d’un insecte. Pour ce faire, elles doivent d’abord prendre le contrôle des faits et gestes de leur hôte en le piquant.

    La guêpe émeraude (Ampulex compressa) est un magnifique prédateur de la couleur du paon dont les intentions sont malveillantes. Elle pique une blatte à deux endroits précis du cerveau, enfonçant son dard jusqu'à trouver ces points sensibles.

    Le premier emplacement permet de paralyser temporairement les pattes avant de la blatte, et le second de réduire ses réflexes de fuite. La guêpe finit par pondre un œuf à l’intérieur d’une patte de la blatte, l’enfermant dans un trou duquel il ne pourra s’échapper. Les larves éclosent alors et dévorent la blatte encore vivante de l’intérieur.

    Les guêpes communes (Vespula vulgaris), comme cette femelle, se servent également de leur dard pour pondre leurs œufs.

    PHOTOGRAPHIE DE Alex Hyde, Nature Picture Library

     

    SACRIFICE POUR LE GROUPE

    Les abeilles piquent, bien sûr, mais seulement pour se défendre. Car, en réalité, lorsque les huit espèces d’abeilles mellifères piquent, il est question pour elles de véritables missions kamikazes.

    Il s’agit du seul type d’abeille à posséder un dard barbelé à double tige. Chacune est munie de crochets orientés vers l’arrière qui s’ancrent dans la peau de la victime. La première tige s’enfonce d’abord, puis la deuxième, « se déplaçant » ainsi dans la peau, indique Michael Burgett, professeur émérite de l’Oregon State University’s College of Agricultural Sciences. 

    Lorsque le dard se détache, la poche à venin également, ainsi que la musculature qui pompe ce dernier. Cela signifie que l’ensemble du corps désincarné continue son chemin en s’enfonçant dans la peau de la victime.

    Ce moyen de défense est efficace, mais toujours fatal pour la femelle qui perd ainsi une grande partie de son corps.

    Sa mort peut paraître cher payé, commente le professeur, mais le compromis est judicieux du point de vue de l'évolution.

    « Il s’agit d’une forme exceptionnelle d’altruisme », ajoute-t-il. Une colonie d’abeilles mellifères peut compter jusqu’à 40 000 membres. La perte de quelques uns pour repousser un prédateur potentiel, comme un ours, « ne représente donc rien comparé à la santé globale de la colonie ». 

    Sans oublier que les prédateurs (ou personnes) qui font l’expérience de cette défense barbelée sont davantage susceptibles de se tenir à l’écart des abeilles à l’avenir.

    À moins que vous ne soyez le regretté Justin Schmidt, un entomologiste de l’université de l’Arizona qui a étudié le sujet pour le moins désagréable des piqûres d’insectes. Dans son livre The Sting of the Wild, il a publié le Schmidt Pain Index dans lequel il évalue les piqûres qu’il a volontairement subies et les décrit avec une clarté, à la fois remarquable et effrayante.

    Des frelons asiatiques attaquent une ruche

    La guêpe Polistes aurifer, par exemple, inflige une douleur qu'il qualifie de « aiguë, intense et immédiate. Vous savez ce que ressent le bétail lorsqu'il est marqué au fer rouge », écrit-il.

     

    « NE LES CRAIGNEZ PAS »

    Les scorpions sont dotés d'un dard lisse appelé telson, composé de diverses parties, telles que des vésicules à venin et un aiguillon.

    Comme la plupart des animaux venimeux, les scorpions préfèrent se cacher des prédateurs ou broyer leur proie entre leurs pinces plutôt que de se servir de leur venin. Non seulement car cette substance leur est coûteuse du point de vue biologique puisque plusieurs semaines sont nécessaires pour la remplacer, mais également car son absence rend l'arachnide encore plus vulnérable aux attaques.

    C’est pourquoi les scorpions sont capables de piquer de manières différentes. Une piqûre sèche, sans venin, peut servir d’avertissement à un prédateur potentiel. Une autre qui délivre du prévenin, une substance plus douce que le venin proprement dit, peut paralyser les insectes et blesser de plus gros nuisibles.

    Lorsqu'il est confronté à des prédateurs ou à des proies plus tenaces et de plus grande envergure, le scorpion inocule un véritable venin, un mélange de nombreuses toxines puissantes et souvent létales.

    Bien entendu, il est important de savoir que sur les 1 750 espèces de scorpions présentes sur Terre, seules 25 sont mortelles pour l'Homme. Selon Michael Burgett, en règle générale, la plupart des insectes piqueurs veulent qu'on les laisse tranquilles.

    « Il ne faut pas les craindre, mais les respecter », assure-t-il.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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