Elizabeth II : une reine à l’avant-garde des progrès technologiques

Qu’il s’agisse de la télévision, de l’exploration spatiale et même de Zoom, la monarque britannique a ardemment défendu le progrès technologique tout au long de son règne de soixante-dix ans.

De Erin Blakemore
Publication 13 sept. 2022, 17:34 CEST
La reine Elizabeth II à la télévision alors qu’elle conclut sa traditionnelle allocution de Noël le ...

La reine Elizabeth II à la télévision alors qu’elle conclut sa traditionnelle allocution de Noël le 25 décembre 1957. C’était la première fois qu’on la retransmettait à la télévision. Vingt-cinq ans plus tôt, son grand-père, le roi Georges V, avait initié la tradition de l’allocution radiophonique.

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À la fin des années 1990, le monde entier tombe amoureux de l’e-mail. Mais le monde a un peu de retard sur la reine Elizabeth II. En effet, elle en envoie déjà depuis des décennies. En 1976, quelques années seulement après l’invention de l’e-mail, qui sert de moyen de communication entre chercheurs et entre universités, la reine envoie son premier e-mail lors d’un événement célébrant l’arrivée de l’une des toutes premières infrastructures Internet d’Angleterre ; le pays a alors vingt ans d’avance sur le reste du monde.

Pour elle, rien de plus naturel : au cours des neuf décennies de sa vie, dont sept sur le trône, la reine est le témoin de vastes bouleversements technologiques, sociaux et scientifiques. Monarque britannique ayant régné le plus longtemps, elle deviendra la cheffe d’État bien-aimée d’un empire évoluant constamment. Durant sa longue vie, elle aura été une fervente défenseure des sciences et des technologies.

 

L’INTÉRÊT DE LA JEUNE ELIZABETH POUR LA TECHNOLOGIE

À sa naissance, en 1926, rien ne destine la princesse Elizabeth Alexandra Mary à accéder au trône. Mais cela change en 1936 lorsque son oncle paternel Édouard VII abdique et que son père Georges VI devient roi à sa place. Soudain, la jeune princesse de dix ans devient héritière du trône britannique. (Elizabeth II : l’extraordinaire destin de celle que rien ne destinait à devenir reine.)

Lors de la Seconde Guerre mondiale, la future reine était lieutenante (second subaltern) au sein du Women’s Auxiliary Territorial Service, la branche féminine de l’armée britannique. Elle reçut une formation de mécanicienne automobile. On la voit ici retirer les bougies d’allumage d’une voiture.

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L’exercice des fonctions royales n’empêche pas Elizabeth II d’assouvir son intérêt naissant pour les technologies. Durant la Seconde Guerre mondiale, la princesse persuade son père de la laisser servir son pays. Ce dernier finit par accepter qu’elle se porte volontaire au sein du Women’s Auxiliary Territorial Service, la branche féminine de l’armée britannique, où elle devient ambulancière et suit une formation de mécanicienne automobile. C’est un acte avant-gardiste : elle est non seulement le premier membre de sa famille à servir dans l’armée, mais elle banalise également le fait qu’une femme puisse démonter des moteurs et changer des pneus. Cette remise en question profonde des normes sociales et de genre se poursuivra tout au long de sa vie.

En 1952, Elizabeth accède au trône après la mort de son père. Désormais femme et mère, elle choisit pour nom de règne le prénom qu’on lui a attribué à la naissance. Cela la lie à Elizabeth Ire, dont on associe aujourd’hui le règne à un âge d’or technologique et scientifique survenu au Royaume-Uni à la Renaissance : l’époque élisabéthaine.

Dès le début, sa manière de régner est résolument moderne. L’avènement de la nouvelle reine coïncide à peu près avec le développement de la télévision et, durant les préparatifs de sa cérémonie de couronnement, elle rompt avec la tradition en autorisant la BBC à diffuser l’événement en direct. Ce premier couronnement télévisé de l’Histoire inaugure la mode des programmes « à ne pas rater ». De par le monde, plus de vingt millions de personnes suivent cette retransmission qui, selon certains, propulsera la télévision au rang d’objet grand public. (Rétrospective : la reine Elizabeth II vue par les photographes National Geographic.)

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    La reine Elizabeth II porte la couronne de Saint-Édouard lors de son couronnement à l’abbaye de Westminster, le 2 juin 1953. L’image est celle que les téléspectateurs ont pu voir immédiatement après que l’archevêque de Cantebury, Geoffrey Fisher, a placé la couronne sur la tête de la reine.

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      Gauche: Supérieur:

      Dans le monde entier, des spectateurs furent captivés par le couronnement de la reine Elizabeth II, le premier à avoir été télévisé. À Vancouver (Canada), plus de 1 200 personnes se rassemblèrent dans cette salle communale pour regarder les festivités.

      Droite: Fond:

      Dans une rue new-yorkaise, des passants se rassemblent pour regarder le couronnement de la reine sur une télévision exposée dans la vitrine d’un magasin.

      Photographies de PHOTOGRAPHIE VIA BETTMANN / GETTY, Getty

      RÉGNER SUR L’ÂGE ATOMIQUE

      D’autres technologies influenceront le règne d’Elizabeth II. À l’époque de son couronnement, l’âge atomique bat son plein. Il influence la géopolitique et stimule le progrès scientifique. La terreur nucléaire installe le monde dans une Guerre froide toujours plus glaciale et, dans les années 1950, le Royaume-Uni commence à tester ses propres armes atomiques. Le Royaume-Uni s’allie avec les États-Unis et héberge des armes nucléaires américaines, ce qui lui vaut la réputation d’être le « porte-avion insubmersible de l’Amérique ».

      La reine Elizabeth II sensibilise la nation à ces progrès nucléaires. En 1956, elle inaugure la première centrale nucléaire de grande envergure du monde, Calder Hall, en appuyant sur un interrupteur qui déclenchera les applaudissement des spectateurs présents. Mais cette technologie n’est pas sans risques : l’année suivante, le réacteur d’une centrale nucléaire voisine, Windscale, prend feu. Il s’agira du pire accident nucléaire britannique.

      Entre-temps, le gouvernement britannique conçoit un plan qui prévoit que la reine se réfugie dans un bunker flottant de la région des lochs écossais en cas d’attaque nucléaire. (Ce plan d’évacuation a récemment été ressuscité et actualisé, car on craignait qu’un Brexit sans accord n’entraîne des émeutes). Une allocution catastrophe de la reine est également rédigée au cas où la Grande-Bretagne venait à être attaquée, ce afin de préparer la nation à une Troisième Guerre mondiale. En 1991, des décennies après le début de la Guerre froide, la reine Elizabeth II accueille le président soviétique Mikhaïl Gorbatchev au palais de Windsor. D’aucuns s’accordent à dire qu’elle joue alors un rôle « influent » dans la fin de la Guerre froide.

       

      LA DÉFENSE DE LA SCIENCE EN HÉRITAGE

      La monarque britannique côtoie également des titans de la science et de la technologie. Elle rencontre les cosmonautes soviétiques Youri Gagarine et Valentina Tereshkova et enregistre un message de vœux déposé sur la Lune par les astronautes de la mission Apollo 11 qu’elle rencontre en 1969. Elle récompense également des centaines de scientifiques influents : la primatologue Jane Goodall est faite Dame-Commandeur de l’Empire britannique et le pionnier de l’ADN James D. Watson est fait Chevalier de l’Empire britannique.

      La reine Elizabeth II reçoit les astronautes de la mission Apollo 11 Michael Collins, Neil Armstrong et Buzz Aldrin au palais de Buckingham dans le cadre de leur tournée mondiale en octobre 1969, quelques mois seulement après leur alunissage historique.

      PHOTOGRAPHIE DE PHOTOGRAPHIE VIA BETTMANN / GETTY, Getty

      Toutefois, sous son règne, l’Empire britannique s’effrite. Les nombreuses colonies du Royaume-Uni obtiennent leur indépendance et forment une vaste coalition : le Commonwealth. Bien qu’Elizabeth II soit la cible de critiques lui reprochant de profiter du colonialisme et de ne pas en faire assez pour reconnaître (ou compenser) cet héritage brutal, elle parraine des organisations à but non lucratif dans l’ensemble du Commonwealth, dont beaucoup ont trait à la recherche médicale et scientifique. (Le Commonwealth a vu le jour sur les cendres de l’Empire britannique.)

      Amatrice de technologies, la reine est à l’initiative des retransmissions des allocutions royales en direct mais elle autorise aussi la famille royale à se servir d’Internet et est l’une des premières personnes à traverser le tunnel sous la Manche qui relie la Grande-Bretagne au reste de l’Europe. Elle effectue même une de ses traditionnelles allocutions de Noël en 3D et publie sur Instagram la photo d’une lettre que le pionnier de l’informatique Charles Babbage a envoyée à son arrière-arrière-grand-père en 1843.

      La reine fut l’une des nombreuses personnes à prendre part à des réunions virtuelles durant la pandémie de COVID-19. Depuis le château de Windsor, elle salue Gaitri Issar Kumar, du Haut-Commissariat d’Inde au Royaume-Uni, en visite au palais de Buckingham en mars 2022.

      PHOTOGRAPHIE DE PHOTOGRAPHIE DE VICTORIA JONES, AFP / GETTY, AFP, Getty

      Par la suite, elle adoptera un discours incitant au respect de l’environnement et donnera sa bénédiction à une initiative encourageant la préservation des forêts dans l’ensemble du Commonwealth. Elle ira même jusqu’à s’attaquer à l’utilisation de plastique sur les domaines royaux après avoir travaillé avec David Attenborough, célèbre naturaliste britannique qu’elle fera deux fois chevalier, sur un documentaire prenant ses forêts pour sujet. (Le règne record de la reine Elizabeth II en 14 photos.)

      La mort de la souveraine marque la fin d’une seconde époque élisabéthaine pour le Royaume-Uni, nation sur laquelle elle aura régné pendant soixante-dix ans et 127 jours. Son règne aura chevauché plusieurs ères, mené l’ancien monde vers le nouveau et mené la monarchie (dont l’existence est depuis longtemps vivement contestée au sein même du Royaume-Uni) vers un avenir qui aurait semblé inconcevable lors de son accession à la Couronne.

      La monarchie qu’elle représentait a beau avoir 1500 ans, cette nouvelle période élisabéthaine n’en demeurera pas moins une ère de progrès technologiques, sociaux et scientifiques immenses.

      Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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