Qui a inventé le football ?

Si les Britanniques ont formalisé les règles du football, ce jeu trouve ses origines en Chine et en Mésoamérique.

De Erin Blakemore
Publication 13 juin 2023, 14:34 CEST
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Giovanni Navaro Cornelio (gauche), 30 ans, et Arturo Sanchez, 32 ans, jouent à l’ulama à Teotihuacán, au Mexique. Ce jeu de balle ancestral, que les Mayas auraient pratiqué il y a 3 500 ans environ, est un précurseur du football.

PHOTOGRAPHIE DE Alicia Vera, Redux

« Mais qui a inventé ce sport ? » Voilà ce que nous nous sommes demandé en apprenant, non sans stupeur, le départ de la légende du football Lionel Messi pour un club de Major League Soccer, l’Inter Miami.

Le football est, de loin, le sport le plus populaire au monde, et ce pour une bonne raison : n’importe quelle arrière-cour ou n’importe quel terrain permet de le pratiquer et de s’identifier immédiatement aux professionnels qui arpentent les stades du monde entier.

Mais si vous souhaitez savoir où ce sport collectif a été inventé, alors préparez-vous à remonter le temps, à faire tourner votre globe terrestre… et faites en sorte de ne pas perdre la tête, littéralement. 

 

LES ORIGINES ANCESTRALES DU FOOTBALL

Si les règles du football ont été formalisées en Angleterre au 19e siècle, les Chinois ont été les premiers à tirer des ballons dans des filets au 3e siècle avant notre ère. C’est toutefois vers les Amériques qu’il faut se tourner pour trouver le prédécesseur de la plupart des jeux de balle modernes. 

« La notion de sport d’équipe a été inventée en Mésoamérique », explique Mary Miller, professeure d’histoire de l’art de l’Université de Yale qui a eu l’occasion d’étudier un grand nombre de preuves attestant de l’existence d’une telle pratique.

Balle en latex d’origine olmèque fabriquée il y a 3 000 ans environ. On ignore si cette balle a bel et bien servi lors de rencontres ou bien s’il s’agissait d’une balle rituelle. À en juger par son état immaculé, il semblerait que cette dernière éventualité soit la bonne.

PHOTOGRAPHIE DE Kenneth Garrett, Nat Geo Image Collection

En Mésoamérique, la vaste région historique s’étendant du Mexique au Costa Rica, où des civilisations fleurirent bien avant que Christophe Colomb ne les « découvre », de nombreux peuples se livraient à un sport pratiqué à l’aide d’une lourde balle fabriquée à partir de substances dérivant de résine d’arbre.

Si l’on ignore quand exactement ce jeu fut inventé, on sait qu’il fut populaire au sein des cultures mésoaméricaines, et notamment chez les Téotihuacains, les Aztèques et les Mayas, il y a environ 3 000 ans. Son nom variait : ullamaliztli chez les Aztèques, pok-ta-pok ou pitz chez les Mayas. Et ses règles également. Celles-ci permettaient de garder la balle en jeu en la frappant à l’aide de parties du corps ou à l’aide de raquettes ou de battes. 

Ces jeux étaient pour beaucoup pratiqués avec des balles en caoutchouc de sept kilogrammes que les archives archéologiques conservent encore de nos jours. D’autres artefacts tels que de des récipients en céramique et 1 300 courts en pierre imposants que l’on peut trouver dans la région trahissent également l’existence d’une telle pratique.

Les joueurs aztèques faisaient passer la balle d’une équipe à l’autre à l’aide de leurs hanches et de leurs fesses seulement (pieds et mains étaient interdits). Ils tentaient de toucher le mur situé au fond du court de la partie adverse en un seul rebond et essuyaient bien souvent des blessures pouvant entraîner la mort lorsque la balle, dure et pesante, les frappait de plein fouet. Si un joueur parvenait à faire passer celle-ci à travers un anneau placé en hauteur dans la partie de terrain adverse, la victoire était automatique ; et elle auréolait le vainqueur de gloire.

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    FAIRE DES SACRIFICES

    Bien que sport populaire du quotidien, à l’instar du football actuel ou du basketball, ce jeu de balle occupait également un rang sacré dans la religion et dans l’art de la guerre des civilisations mésoaméricaines. Les rois aztèques, dit-on, s’en servaient comme d’un substitut à la guerre et obtenaient des prérogatives ou bien apaisaient des crises diplomatiques en jouant à la balle. Chez les Mayas et dans la société de Veracruz, les enjeux étaient encore plus élevés : les perdants de certaines parties rituelles étaient sacrifiés.

    Les détails nous échappent, mais certains courts sont décorés de panneaux représentant le sacrifice sanglant de perdants. Sacrifice et sport sont d’ailleurs étroitement liés dans un mythe de la cosmogonie maya : deux jumeaux battent les seigneurs des enfers sur le court. Ils deviennent ensuite le Soleil et la Lune.

    Ce relief représente un sacrifice humain ayant eu lieu après une rencontre. On l’a sculpté sur l’un des dix-sept courts découverts dans les ruines d’El Tajin, ville préhispanique qui se trouvait à l’emplacement de l’actuelle Veracruz, au Mexique.

    PHOTOGRAPHIE DE Martin Gray, Nat Geo Image Collection

    Selon Mary Miller, en dépit des preuves qui montrent que les vaincus perdaient parfois littéralement la tête, certains archéologues du 20e siècle refusaient de croire que quiconque, à l’exception des vainqueurs, était mis à mort. « Ils ne pouvaient pas croire que les Mayas se livraient à des sacrifices humains, explique-t-elle. Nous savons aujourd’hui que ce sont des balivernes, de même que l’idée selon laquelle tout joueur victorieux aurait été sacrifié ». Dans la mythologie maya, le perdant du jeu de balle est décapité, et les spécialistes d’aujourd’hui s’accordent largement à dire que les perdants, et non les vainqueurs, passaient sur le billot.

     

    UNE NOUVELLE INCARNATION DANS LES ÉCOLES BRITANNIQUES

    Bien que les Amérindiens et les Aborigènes aient pu se livrer à des jeux similaires, le sport moderne que certains appellent soccer mais que la plupart appellent football vit le jour dans des écoles britanniques. Quoiqu’on y ait pratiqué des variantes informelles pendant des siècles, ce sport s’est institutionnalisé au 19e siècle.

    Au milieu du 19e siècle, les progrès réalisés en matière de transports, de travail et de technologie offrirent aux gens le loisir et les moyens de se rendre à des rencontres compétitives organisées sur des terrains tondus. Dès les années 1840, de nombreuses écoles britanniques mirent au point leurs propres standards, rendant ainsi possible l’organisation de tournois entre joueurs au fait des mêmes règles.

    Avec le temps, deux systèmes règlementaires concurrents commencèrent à dominer le football. Le Sheffield Football Club octroyait un coup franc à une équipe si son adversaire enfreignait les règles. L’Université de Cambridge interdisait aux joueurs de porter le ballon à la main. 

    Devant la popularité grandissante du football, les joueurs se regroupèrent au sein de la London Football Association. En 1877, Sheffield adopta officiellement les « règles de Londres ». À cette époque, certaines équipes avaient entrepris un vaste recrutement et payaient secrètement des membres de la ligue issus de la classe ouvrière.

    Les footballeurs de la haute société voulaient que ce sport demeure amateur. Mais en 1885, ils acceptèrent finalement qu’il y ait des joueurs professionnels, ce qui entraîna un nouvel essor du sport. En 1904, le football était devenu si populaire qu’il avait franchi les frontières. La Fédération Internationale de Football Association (FIFA) fut créée la même année.

     

    LE FOOTBALL DE NOS JOURS

    À partir de ce moment-là, plus rien n’arrêta le football. Après une première apparition aux Jeux olympiques de 1908 et après l’organisation de la première Coupe du monde de la FIFA en 1930, le football professionnel poursuivit sa lancée. De nos jours, la FIFA est toujours l’instance dirigeante du football. Lors de la seule année 2021, celle-ci a engrangé plus de 700 millions d’euros.

    Mais le cœur de ce sport a toujours résidé sur le terrain, où chacun, gamins autant qu’athlètes professionnels chevronnés, peuvent prendre part à l’action. L’esprit du football, qui relève pour Mary Miller d’une « pensée d’équipe complexe », est plus vivant que jamais, que ce soit dans les incarnations modernes du jeu ou bien chez les millions de joueurs amateurs et professionnels qui courent, slaloment et shootent chaque jour sur un terrain officiel ou de fortune.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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