Seconde Guerre mondiale : ces cinq espionnes qui ont mené les Alliés à la victoire

Ces femmes, comme tant d’autres, sont entrées en résistance au péril de leur vie.

De Neil Kagan, Stephen Hyslop
Publication 31 mai 2023, 17:41 CEST
Des soldats américains défilent sur les Champs-Élysées en 1944 avec l’Arc de Triomphe en arrière-plan.

Des soldats américains défilent sur les Champs-Élysées en 1944 avec l’Arc de Triomphe en arrière-plan.

PHOTOGRAPHIE DE Bettmann, Getty Images

Lors de la Seconde Guerre mondiale, les victoires ne furent pas uniquement le fait d’hommes. Une multitude de femmes courageuses œuvrèrent en tant qu’espionnes et en tant qu’agentes pour le compte de services de renseignement du monde entier, et ce au péril de leur vie, afin de révéler des informations secrètes qui influencèrent l’issue de la guerre. Leur travail était périlleux et la menace d’être découvertes puis torturées, incarcérées en camp de concentration ou même assassinées était bien réelles. Mais elles persévérèrent, persuadées que la victoire des Alliés était la seule option. Voici certaines des plus célèbres espionnes de la Seconde Guerre mondiale dont l'engagement s’avéra infaillible.

 

JOSÉPHINE BAKER

Dans les années 1930, alors que la ségrégation raciale fait rage aux États-Unis, l’Afro-Américaine Joséphine Baker se fait un nom à Paris en tant que meneuse de revue, danseuse et chanteuse. Elle évolue entre différents cercles sociaux, un fait que remarque le capitaine Jacques Abtey, agent de renseignement des services secrets français. En 1939, deux ans après sa naturalisation, alors que la guerre se profile, Joséphine Baker est approchée par ce dernier qui lui demande de recueillir des renseignements pour les Français. En dépit du danger, elle accepte volontiers la mission. « C’est la France qui a fait de moi ce que je suis, dit-elle. [Les Parisiens] m’ont tout donné, en particulier leur cœur. […] Je suis prête, capitaine, à leur donner aujourd’hui ma vie. »

Dès lors, Joséphine Baker assiste à des soirées diplomatiques aux ambassades d’Italie et de France et tend l’oreille pour tenter de repérer des agents de l’Axe ou des traîtres à la France. Lorsque les troupes allemandes prennent Paris en 1940, elle fuit en zone libre où, sous le couvert de ses spectacles, elle continue de travailler secrètement avec Jacques Abtey pour la Résistance. Début 1941, ils partent pour les colonies françaises d'Afrique du Nord. De là, elle fait passer secrètement des documents, des photos cachées sous ses vêtement et des messages écrits à l’encre sympathique sur des partitions, à des agents de Lisbonne travaillant pour les résistants en France Libre, menés par le général de Gaulle. Pour ses services rendus durant la guerre, Joséphine Baker se vit décerner la Légion d’honneur ainsi que la Croix de guerre. En novembre 2021, elle devint la première femme noire à entrer au Panthéon.

Joséphine Baker était danseuse, chanteuse, actrice et espionne. Cette photographie fut prise lors d’une représentation aux Folies Bergères, à Paris, dans les années 1930.

PHOTOGRAPHIE DE Popperfoto, Getty

 

NOOR INAYAT KHAN

Déterminée et calme, descendante d’une illustre famille indienne adepte de la non-violence, Noor Inayat Khan était une musicienne et une autrice d’histoires pour enfants accomplie. Après une enfance en Angleterre et en France, elle fuit l’invasion allemande de 1940 avec sa mère, Américaine et veuve, et s’installe à Londres avec elle. Là, elle se forme pour devenir radiotélégraphiste. Son aptitude technique et sa maîtrise du français attirent alors l’attention de Vera Atkins, superviseure des agentes de la Section F, la section française du Special Operations Executive (SOE), service créé par le Premier ministre Winston Churchill afin d’infiltrer les territoires occupés par les Allemands et d’« embraser l’Europe ».

Vera Atkins envoie sa jeune recrue en France, où elle évite les arrestations en changeant fréquemment de cachette. En septembre 1943, Noor Inayat Khan est la dernière opératrice du SOE à continuer de transmettre depuis Paris vers Londres. Mais une personne au courant de sa couverture la dénonce. Arrêtée en octobre, elle est brutalement interrogée et tente de s’échapper. Son calvaire prend fin à Dachau, camp de concentration où elle est exécutée en septembre 1944. Son dernier mot, prononcé alors que son bourreau lui appuyait un pistolet derrière la tête, aurait été « liberté ».

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    Noor Inayat Khan, sous-officière de section et agente du Special Operations Executive (SOE) durant la Seconde Guerre mondiale, fut assassinée au camp de concentration de Dachau, en Allemagne, en septembre 1944. Son dernier mot aurait été « liberté ».

    PHOTOGRAPHIE DE Photogaph By Imperial War Museum

     

    JOSEFINA GUERRERO

    En 1942, juste avant que les Japonais n’occupent les Philippines, Josefina Guerrero contracte la maladie de Hansen, mieux connue sous le nom de lèpre. Son mari la quitte sur-le-champ, et on l’éloigne de sa jeune fille. Alors que le matériel médical se raréfie et que sa maladie s’aggrave, Josefina Guerrero décide de tout risquer et de devenir espionne pour le compte de la Résistance philippine. À cause de sa maladie, les Japonais, pourtant connus pour pratiquer des fouilles corporelles poussées, ne l’inspectent pas lorsqu’elle franchit leurs postes de contrôle. Cela lui permet de transmettre des messages secrets, les mouvements des troupes ennemies, des fournitures vitales et même des armes aux résistants et aux soldats. Elle cartographie également les fortifications des Japonais et les emplacements de leurs armes, effort qui permet aux Américains d’anéantir les défenses japonaises le 21 septembre 1944 dans le port de Manille, une étape cruciale dans la reconquête de la capitale. Par la suite, elle se colle une carte dans le dos et parcourt plus de 40 kilomètres pour retrouver les Américains et les guider à travers des champs de mines dans leur percée pour libérer Manille.

    Après la guerre, Josefina Guerrero fut confinée dans une léproserie ; des révélations qu’elle fit parvenir à un ami américain en dévoilèrent les conditions de vie affreuses. En 1948, grâce à son témoignage, le gouvernement agit pour améliorer les conditions de vie de la léproserie. Josefina Guerrero fut finalement accueillie aux États-Unis pour suivre un nouveau traitement. Elle fut la première étrangère atteinte de la lèpre à se voir octroyer un visa pour entrer aux États-Unis. Son travail contribua grandement à déstigmatiser cette maladie.

     

    AGNES MEYER DRISCOLL

    Dans les annales de la cryptologie, on trouve peu de mentions du nom de l’une des plus grand.es cryptanalystes du monde. Agnes Meyer Driscoll, diplômée de l’Université d’État de l’Ohio, où elle a étudié les mathématiques, la musique, la physique et les langues étrangères, s’enrôle dans la marine américaine en 1918, durant la Première Guerre mondiale, et devient cheffe de timonerie, plus haut grade possible pour une femme à cette période. Après la guerre, elle poursuit sa collaboration avec la marine et contribue à l’élaboration de codes, de chiffres et de signaux d’exploitation. Alors que la Seconde Guerre mondiale se profile, Agnes Meyer Driscoll résout le JN-25, un code de haut niveau utilisé dans les communiqués navals japonais. 

    Bien qu’exploitable en partie seulement au moment de l’offensive japonaise sur Pearl Harbor en décembre 1941, il servit toutefois à prévoir d’autres attaques japonaises comme celle des îles Midway en juin 1942. Surnommée « Miss Aggie » et « Madame X », elle demeura une cryptanalyste de premier plan et restera au service de la marine américaine jusqu’en 1949, avant de rejoindre diverses agences nationales de cryptologie et de prendre sa retraite en 1959. En 2000, Agnes Meyer Driscoll fut intronisée au Hall of Honor de la NSA.

    Agnes Meyer Driscoll a été une cryptanalyste américaine de premier plan, et ce durant les deux guerres mondiales. Elle a co-conçu l’une des machines de chiffrement de la marine américaine, la Communications Machine, qui fut un des principaux dispositifs de chiffrement de la Navy durant la majeure partie des années 1920.

    PHOTOGRAPHIE DE Science History Images, Alamy Stock Photo

     

    ANDRÉE DE JONGH

    Surnommée la « Factrice », Andrée « Dédée » de Jongh dirigea le réseau Comète, un réseau secret actif en Belgique et en France sous l’Occupation dont la mission était d’évacuer et de mettre en sécurité les soldats et aviateurs alliés tombés en territoire ennemi. Avec son réseau, elle leur fournissait des habits civils et de faux papiers d’identité puis les menait de lieu sûr en lieu sûr avant de leur faire traverser la frontière franco-espagnole dans les Pyrénées. Là, les responsables consulaires britanniques prenaient le relais et les évacuaient par Gibraltar. Le réseau Comète secourut 800 soldats alliés au total, et Dédée de Jongh effectua personnellement des dizaines de voyages à pied. Un pilote britannique qu’elle aida la décrivit comme « une jeune fille frêle qui semble avoir vingt ans, très jolie, agréable, gentille, joyeuse et simple. »

    Les nazis finirent par l’arrêter et par l’envoyer dans plusieurs camps de concentration, dont celui de Ravensbrück. Malgré vingt-et-un interrogatoires, elle refusa de donner le nom de ses compagnons de résistance ou de trahir aucun de ses camarades, dont son père, qui était lui aussi soupçonné. Ce dernier fut exécuté, mais elle survécut, seulement parce que les nazis sous-estimèrent l’importance de cette jeune femme frêle.

    Dédée de Jongh mit sur pied le réseau Comète avec des membres de sa famille afin d’aider les pilotes alliés abattus en Belgique à fuir ce territoire occupé.

    PHOTOGRAPHIE DE Imperial War Museum

    Des parties de cet article ont déjà paru dans World War II: The Spies and Secret Missions That Won the War. Copyright ©2017 National Geographic Partners LLC. 

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