La Terre tourne plus vite, et les journées d’été se font plus courtes

Les scientifiques expliquent pourquoi les jours sont de plus en plus courts : un mystère qu’ils tentent de résoudre concernant le noyau de la Terre…

De Brian Handwerk
Publication 26 juil. 2025, 10:32 CEST
Les étoiles défilent au-dessus d’un champ de coquelicots sur les pentes du mont Damavand, un sommet ...

Les étoiles défilent au-dessus d’un champ de coquelicots sur les pentes du mont Damavand, un sommet volcanique. Cette photographie longue exposition illustre la rotation de la Terre.

PHOTOGRAPHIE DE Babak Tafreshi, National Geographic Image Collection

Dans l’hémisphère nord, les habitants profitent des longues heures du soleil d’été, sans savoir qu’ils vivent certains des jours les plus courts (d’environ une milliseconde) depuis l'invention de l’horloge atomique.

Le 9 juillet a été le jour le plus court de l’été car la rotation de la Terre a été plus rapide. Selon le Service international de la rotation terrestre et des systèmes de référence (IERS, International Earth Rotation and Reference Systems Service en anglais) et l’Observatoire naval des États-Unis, la Terre a gagné 1,34 milliseconde sur sa rotation standard de 24 heures. Deux autres jours cet été seront les plus courts jamais documentés : le 22 juillet et le 5 août.

Ces fluctuations dans la vitesse de rotation de la Terre ne sont pas insolites mais les scientifiques se creusent la tête pour comprendre les raisons qui se cachent derrière cette récente augmentation de ces accélérations.

« Au cours de la dernière décennie, la longueur d’une journée moyenne a surtout diminué. Ce phénomène est d’autant plus remarquable depuis cinq ans, une journée dure parfois moins de 24 heures », explique Nicholas Stamatakos, astronome au sein du département de l’orientation terrestre de l’Observatoire naval des États-Unis.

 

POURQUOI LA TERRE TOURNE-T-ELLE PLUS VITE ?

Les variations de la rotation de la Terre sont dues à un mélange complexe de facteurs, mais les scientifiques relèvent que certains sont plus remarquables que d’autres.

La Lune affecte la Terre différemment au cours de son orbite. Lorsqu’elle est proche de l’équateur, deux fois par mois, l’attraction gravitationnelle ralentit de peu la rotation terrestre. Mais la Lune se rapproche également des pôles deux fois par mois, et lors de ces périodes, sa gravité aide la Terre à tourner légèrement plus vite.

Notre planète et son atmosphère tournent de manière synchronisée, partageant un moment cinétique qui ne peut être changé que par l’une des deux. La vitesse de rotation de l’atmosphère est plus lente lors des mois estivaux à cause des variations du jet stream. Cela signifie que la planète doit accélérer pour compenser et conserver le moment cinétique à un niveau constant.

Au l'intérieur de la planète, un événement étrange se produit également, que les scientifiques ne parviennent pas totalement à expliquer. Pour quelque raison que ce soit, la rotation du noyau de la Terre a ralenti ces cinquante dernières années et, pour compenser et conserver son moment cinétique, les couches supérieures de la Terre ont dû accélérer. « Nous ignorons ce que le noyau pourrait faire à l’avenir, ou pourquoi », reconnaît Duncan Agnew, géophysicien de l’Institut océanographique Scripps.

 

VIVONS-NOUS LES JOURS LES PLUS COURTS DE L’HISTOIRE ?

Depuis la création de l’horloge atomique, en 1955, les jours de ces dernières années ont été les plus courts jamais enregistrés. Ils sont cependant loin d’être les plus courts de l’histoire de la Terre.

En moyenne, et depuis quelques milliards d’années, les jours terrestres s’allongent. Depuis la formation de la Lune, sa gravité et son influence sur les marées océaniques ralentissent la rotation de la Terre de façon incrémentielle.

Comprendre : la Terre

Des analyses menées sur d’anciennes coquilles de mollusques datant des jours où le Soleil brillait sur les dinosaures révèlent qu’il y a 70 millions d’années, une année sur Terre durait 372 jours et un jour durait 23,5 heures. Des coraux fossilisés vieux de 430 millions d’années suggèrent qu’ils voyaient bien plus de levers et de couchers de soleil que nous, avec des journées de 21 heures.

Même si la tendance va vers l’allongement des journées, des fluctuations sur le court terme ont déjà produit de nombreuses périodes de courtes journées. « Les jours étaient moins longs que ceux qui arrivent dans les années 1820 et de 1865 à environ 1880 », explique Duncan Agnew. « Et selon l’IERS, certains jours ont d’ailleurs été plus courts entre juin et août 2022 et en juin 2024. »

 

POURRA-T-ON REMARQUER L’ACCÉLÉRATION DE LA ROTATION TERRESTRE ?

On remarque aisément les jours les plus longs de l’année, comme ceux du solstice d’été, ainsi que les plus courts et froids du solstice d’hiver.

Mais si le cycle de 24 heures de la Terre était moins long d’une milliseconde, on ne s'en rendrait probablement pas compte. À titre de comparaison, un clin d’œil dure entre 100 et 400 millisecondes.

« Un seul jour isolé et plus court n’est important que pour les astronomes et d’autres spécialistes », affirme Judah Levine, physicien et chercheur de l’Institut des standards et de la technologie des États-Unis. Les astronomes ont besoin d’un chronométrage extrêmement précis pour comprendre les positions et les mouvements des corps et des événements célestes. De minuscules différences peuvent mener à des erreurs monumentales.

Lorsque le temps perdu à cause des journées plus courtes commence à s’accumuler, les astronomes ajoutent une seconde supplémentaire au temps astronomique, l’accordant ainsi avec le temps atomique qui avait pris de l’avance. On appelle cela une seconde intercalaire. Cette pratique a lieu tous les ans et demi depuis 1972, et personne ou presque ne s’en est jamais rendu compte.

Les changements minimes de la rotation de la Terre n’avaient pas tellement d’importance avant l’avènement de l’horloge atomique en 1955. Le temps atomique est constant, alors que les variations de la Terre créent une différence entre les temps astronomiques et atomiques.

Pour permettre au temps astronomique de rattraper son retard, vingt-sept secondes intercalaires ont été ajoutées depuis 1972. À présent que la Terre accélère, les horlogers pourraient ajouter la toute première seconde intercalaire négative d’ici 2029 pour ralentir le temps astronomique.

Ces secondes intercalaires sont une hantise pour les ordinateurs, les GPS et les systèmes de télécommunications. En 2012, Linux et d’autres systèmes ont d’ailleurs commis des erreurs dans leur ajustement. Une seconde intercalaire négative, du jamais vu auparavant, pourrait s’avérer d’autant plus problématique que les systèmes informatiques pensent que le temps ne se déplace que dans une seule direction. « Cela pourrait avoir un effet dévastateur sur les logiciels qui dépendent des minuteurs ou des calendriers », avertissent des ingénieurs de Meta.

 

LES EFFETS DU CHANGEMENT CLIMATIQUE SUR LA ROTATION DE LA TERRE

Des études suggèrent que certains facteurs, comme la fonte des glaces, la montée du niveau des mers et l’épuisement des nappes phréatiques pourraient changer la masse de la Terre et ralentir sa rotation. Cela ralentirait sa rotation de la même manière que lorsqu’un patineur baisse les bras en-dessous de la tête après une pirouette.

De telles variations ont toujours été le résultat de cycles naturels, mais deux études financées par la NASA suggèrent que le temps lui-même pourrait subir les effets du changement climatique terrestre.

« Notre analyse montre qu’au cours du dernier siècle, le changement climatique moderne seul a contribué à un allongement de 0,6 à 0,7 milliseconde d’une journée, un chiffre qui pourrait doubler dans notre siècle », avertit Surendra Adhikari, scientifique spécialisé dans les systèmes terrestres au sein du Jet Propulsion Laboratory.

Un tel ralentissement pourrait venir s’opposer aux facteurs qui travaillent déjà à l’accélération de la rotation de la planète, soulignant sa complexité.

Nicholas Stamatakos insiste sur le fait que, même si la rotation terrestre varie depuis des siècles, les interactions compliquées de ses différentes causes représentent toujours un défi pour les scientifiques, notamment lorsque l'on s’intéresse à son avenir.

« Les prédictions précises de la durée d’une journée au-delà d’une période de six mois ne sont plus possibles, avertit-il, à cause du manque de compréhension de tous ces phénomènes géodétiques. »

On sait que le Soleil se lèvera demain… on ignore simplement combien de temps il restera dans le ciel chaque jour.

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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