Six merveilles architecturales à découvrir (avant qu'il ne soit trop tard)

La tour Garisenda, l'autre tour penchée d’Italie, les temples pillés d’Égypte et les pétroglyphes dégradés d’Australie font aujourd’hui partie de ces sites archéologiques en péril. Comment les sauver ?

De Ronan O’Connell
Publication 12 avr. 2024, 17:58 CEST
À Abydos, un garde observe les rayons du soleil s'immiscer entre les colonnes du temple. Situé ...

À Abydos, un garde observe les rayons du soleil s'immiscer entre les colonnes du temple. Situé dans une vallée isolée, ce site funéraire et cultuel de l’Égypte ancienne est menacé par les pillages et le développement urbain.

PHOTOGRAPHIE DE Gargolas, Getty Images

En raison d’un sol mouvant et de fondations instables, la tour de Pise s’est inclinée depuis sa construction en 1173. Heureusement, grâce à un système de pylônes géants et de câbles d’acier très résistants, ce site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO a été consolidé et (un peu) redressé au cours des dernières décennies

Aujourd’hui, les mêmes outils et techniques utilisés à Pise par les ingénieurs sont employés pour empêcher l’autre merveille inclinée d’Italie, la tour Garisenda, de devenir la tour Jenga de Bologne. 

La Garisenda, l’une des deux tours du 12e siècle qui surplombent la vieille ville pittoresque de Bologne, est depuis toujours déséquilibrée, explique Tomaso Trombetti, professeur d’ingénierie structurelle à l’université de Bologne. Lors de la construction de la torre en briques de 48 mètres de haut, un côté de sa fondation s’est tassé plus rapidement que l’autre. Cela a créé une inclinaison qui s’est progressivement aggravée pour atteindre quatre degrés, et qui représente aujourd'hui « un danger », explique Trombetti. L’autre tour de Bologne, l’Asinelli, mesure 97 mètres de haut et n’est quant à elle pas penchée de manière significative.

Guido Gottardi, professeur d’ingénierie géotechnique à l’université de Bologne, explique que les mêmes pylônes utilisés lors de la restauration de la tour de Pise de 1993 à 2001 seront ancrés dans le sous-sol autour de la tour Garisenda. « Il s’agit essentiellement d’une contre-mesure passive, qui servira à soutenir la tour en toute sécurité pendant que des interventions de renforcement et de restauration seront effectuées au niveau du sous-sol et de sa structure en maçonnerie. » Des collectes de fonds destinées à réhabiliter les deux tours fragiles sont également en cours.

La tour fait partie de ces nombreuses structures historiques bancales qui nécessitent une intervention humaine pour ne pas tomber en ruine. Outre les ravages du temps, de tels sites sont la cible de pillages et subissent les effets du surtourisme, de l’industrialisation et du changement climatique. Voici cinq autres merveilles en péril que les défenseurs de l’environnement tentent actuellement de sauver.

Les deux tours de Bologne, la tour Asinelli (à gauche) et la tour Garisenda, ont été construites au 12e siècle par de riches familles italiennes. La Garisenda est en train d’être renforcée et rénovée pour pallier sa dangereuse inclinaison.

PHOTOGRAPHIE DE Bailey-Cooper Photography, Alamy Stock Photo

 

LE CHÂTEAU DE HURST, EN ANGLETERRE

Le roi Henri VIII a construit le château de Hurst en 1544 sur une langue de terre le long de la côte du Hampshire. Les fortifications en pierre avaient pour objectif de défendre l’Angleterre contre les envahisseurs européens. Mais aucun ennemi humain n’a été aussi tenace que la mer, qui n'a de cesse de s’abattre sur le château. Les tempêtes violentes, l’élévation du niveau de la mer et le battement constant des vagues ont fini par saper les fondations du château, provoquant l’effondrement partiel de la batterie orientale de la structure en 2021.

Au cours des années qui ont suivi l’effondrement, 22 000 tonnes de roches et de galets ont été ajoutées pour renforcer le château. « Nous avons eu recours à un balayage laser pour créer des modèles numériques en 3D, qui nous ont ensuite permis d’évaluer quelles étaient les meilleures méthodes et pratiques [pour] restaurer le château », explique Ron Blakeley, chef de projet national pour English Heritage, qui cogère le complexe. D’avril à début novembre, les voyageurs peuvent se rendre en bateau sur le site pour explorer l’arsenal et la tour d’artillerie.

 

LA VILLE ANTIQUE D'ABYDOS, EN ÉGYPTE

Dans une vallée aride à 420 kilomètres au sud du Caire se trouve Abydos, ce site archéologique composé d'un temple et d'une nécropole tentaculaires où de nombreux pharaons égyptiens de l’Antiquité ont été enterrés. Les premiers travaux de construction datent d’il y a 5 900 ans. Aujourd’hui, les visiteurs peuvent se promener dans les salles aux impressionnantes colonnes de pierre, admirer des sculptures murales raffinées dédiées au pharaon Séthi Ier et jeter un coup d’œil à l’Osiréion, une structure souterraine en pierre qui pourrait avoir été érigée en l’honneur d’Osiris, le dieu de la mort de l’Égypte ancienne.

Malheureusement, des pillards ont dégradé le site et dérobé des trésors de l’Antiquité et ont continué à déterrer illégalement des objets ces dernières années. Aujourd’hui, Abydos est l’un des sites archéologiques les plus surveillés et les moins fréquentés du pays. « Le haut niveau de sécurité et le manque de commodités pour les visiteurs contribuent au faible taux de fréquentation [d’Abydos] », explique Johnathan S. Bell, vice-président des programmes du World Monument Fund (WMF), une ONG qui protège le patrimoine culturel.

Pour enrayer le déclin du complexe archéologique, le gouvernement égyptien, le WMF et d’autres organismes ont lancé plusieurs projets de conservation. Ces projets comprennent la restauration minutieuse des frises murales colorées et l’installation d’ancrages en acier pour renforcer les points affaiblis de l’Osireion.

 

LA PÉNINSULE DE MURUJUGA, EN AUSTRALIE OCCIDENTALE

Peu de musées exposent autant d’œuvres d’art que Murujuga, ce paysage accidenté d’Australie occidentale où les Aborigènes ont gravé dans la roche plus d’un million de pétroglyphes pendant des milliers d’années. En vous rendant dans cette galerie en plein air, située à environ 1250 kilomètres au nord de Perth, vous y découvrirez des sentiers bordés de gravures de wallabies, de kangourous et de symboles indigènes. 

Cependant, l’exploitation minière et d’autres formes d’industrialisation endommagent le plus grand site d’art rupestre du monde situé sur cette péninsule isolée. À en croire les scientifiques, Murujuga (aussi appelée Burrup) pourrait ne pas survivre à un autre siècle de pollution croissante.

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    Située dans la péninsule de Burrup, en Australie-Occidentale, la région de Murujuga, célèbre pour son art rupestre, compte environ un million de pétroglyphes créés il y a plus de 40 000 ans.

    PHOTOGRAPHIE DE Viktor Posnov, Alamy Stock Photo

    En février 2024, les traditionnels propriétaires autochtones de Murujuga ont célébré deux victoires dans leur combat pour préserver le site. En effet, le gouvernement d’Australie-Occidentale a non seulement ajouté environ 253 hectares pour le développement au parc national protégé de Murujuga, mais a aussi annoncé une nouvelle mesure qui accorde une plus grande place à ces communautés dans la gestion du site.

    Ces peuples aborigènes sont par ailleurs à la tête d’une initiative visant à faire inscrire Murujuga au patrimoine mondial de l’UNESCO.

     

    LA CITÉ DE TEOTIHUACAN, AU MEXIQUE

    À 30 km au nord de Mexico, plus d’un million de voyageurs visitent chaque année les ruines de Teotihuacan. Construit entre le 1er et le 7e siècle de notre ère par une civilisation inconnue, ce site de 36 kilomètres carrés constituait il y a un millier d’années la plus grande métropole de l’hémisphère occidental.

    Connue pour ses impressionnantes structures de pierre, dont la pyramide du Soleil et le temple de Quetzalcoatl, la cité de Teotihuacan est en proie au surtourisme tandis que ses bâtiments se dégradent en raison des dommages causés par les intempéries et de restaurations mal exécutées dans les années 1900. Le World Monument Fund alerte également sur les structures informelles qui entourent désormais le site et occupent des terrains qui pourraient regorger de trésors archéologiques.

    Des mesures ont déjà été prises pour conserver Quetzalcoatl, comme l’amélioration du drainage, le comblement des fissures structurelles et l’extraction du sel corrosif qui recouvrait sa façade. Aujourd’hui, le WMF et d’autres groupes font pression pour que la communauté locale soit davantage impliquée dans le cadre d’une stratégie de tourisme durable.

     

    LA STATION-SERVICE OSTERMAN, DANS L'ARIZONA

    Située sur la Route 66 dans la campagne arizonaise, la station-service Osterman, construite dans les années 1920, a récemment été achetée par une communauté indigène qui prévoit de la restaurer et d’en faire un musée.

    PHOTOGRAPHIE DE BDP, Alamy Stock Photo

    Les sites historiques sont loin de n’être que des châteaux ou des tours médiévales. La station-service Osterman, construite dans les années 1920 et située dans la petite ville de Peach Springs dans l'Arizona, a longtemps été chérie par sa communauté et appréciée par les voyageurs de la Route 66. Construit à partir d’un bloc de briques provenant d’un magasin Sears, le bâtiment était particulièrement important pour le peuple Hualapai local, car de nombreux membres de cette communauté indigène travaillaient à la station ou s’y réunissaient avec des amis et leur famille.

    Située à 64 kilomètres au sud du Grand Canyon Skywalk, la station-service est tellement aimée des Hualapai qu'ils ont décidé de racheter le bâtiment après sa fermeture en 2005. Aujourd’hui, ils le restaurent avec l’aide du National Trust for Historic Preservation, une ONG qui protège les sites patrimoniaux à travers les États-Unis.

    « Le mur qui s’était effondré a été reconstruit et un nouveau toit est en cours d’installation », explique Amy Webb, directrice principale de la préservation au National Trust. Les Hualapai prévoient de convertir le bâtiment en un musée, un centre artistique, un café et une station de recharge pour véhicules électriques.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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